chapitre 39 : le magicien blanc

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Gimli les suivis dans la forêt, bien qu'à contrecœur.

Plus ils avançaient, plus les arbres étaient sombres et menaçant. Ils sentirent très vite qu'ils n'étaient pas désirés dans cette forêt. Le nain s'approcha d'un buisson, et vit qu'il était parsemé d'un liquide noir.

Il le toucha et le porta à sa bouche, mais le recracha aussitôt avec une grimace.

- Du sang d'orque !

- Ils n'étaient pas seuls, dit Aragorn.

Ils arrivèrent bientôt près d'un ruisseau, et découvrirent des branches et des troncs d'arbre cassés. Aragorn s'arrêta pour les observer.

- Ces traces sont étranges...

- Je sens que l'air est lourd ici, dit Gimli.

- Cette forêt est vieille, remarqua Legolas. Très vieille. Pleine de souvenirs. Et de colère.

Les arbres grincèrent, et Gimli leva sa hache, apeuré.

- Les arbres se parlent entre eux ! s'exclama Legolas.

- Gimli, abaissez votre hache, lui ordonna Aragorn à voix basse.

Le nain s'exécuta, et les arbres se turent.

- Ils ont des sentiments mon ami, dit Legolas, et cela grâce aux elfes. Ils ont réveillés les arbres, et leur ont appris à parler.

Legolas murmura quelques paroles elfiques pour rassurer les arbres les plus coléreux, mais il avait l'impression de s'adresser à un mur. Aucune réponse ne lui parvint si ce n'est des relents de colère. Les arbres ici étaient sauvages. Ils avaient oubliés le langage des elfes. Qu'avait-il bien pu se passer pour que les arbres soient aussi hostiles ? Fangorn lui rappelait en bien des points sa Forêt Noire, excepté peut-être que celle-ci était encore vierge de l'emprise maléfique de Sauron. Il aurait tant aimé venir ici dans des temps de paix.

- Des arbres qui parlent, hum. Et de quoi est-ce que ça parle un arbre, hein ? A part de la consistance des crottes d'écureuil ? se moqua Gimli.

Legolas l'ignora, bien qu'il fût partagé entre la consternation et l'amusement. Il sentit soudainement une présence anormale dans les parages.

- Aragorn, nad no ennas (quelqu'un vient) !

- Man cenich (Que voyez-vous) ? lui demanda Aragorn.

Legolas tourna ses yeux perçant en direction des fourrés, et vit l'éclat d'un manteau blanc.

- Le magicien blanc approche.

Legolas désigna l'arrière, et Aragorn comprit aussitôt que l'ennemi se trouvait derrière eux.

- Ne le laissons pas parler, dit Aragorn, il nous jetterait un mauvais sort.

Les deux autres acquiescèrent, et ils tirèrent leurs armes.

Ils pivotèrent d'un seul coup. Une lumière blanche les aveugla, obligeant Aragorn et Gimli à mettre une main devant les yeux. Legolas tira sa flèche, qui alla se briser sur le bâton du magicien, tandis que Gimli lançait une hache qui explosa en mille morceaux. Aragorn brandit son épée, mais celle-ci chauffa comme de la braise, et il fut obligé de la lâcher.

La silhouette du magicien se détacha de la lumière, et ils lui firent face, désarmés et impuissants.

- Vous êtes sur les traces de deux jeunes hobbits, dit le mage d'une voix grave.

- Où sont-ils ? interrogea Aragorn.

- Ils sont passés par ici, avant-hier. Ils ont fait une rencontre à laquelle ils ne s'attendaient pas. Est-ce que cela vous rassure ?

- Qui êtes-vous ? demanda Aragorn, qui ne parvenait toujours pas à voir le visage du mage. Montrez-vous !

Le visage du magicien blanc se dévoila alors dans la lumière, sous des traits familiers.

- Gandalf ! s'exclama Gimli.

Estomaqués, ils le regardèrent avec les yeux écarquillés. Tel un fantôme revenu d'entre les morts, Gandalf se tenait là, vêtu d'un manteau blanc.

- Cela ne se peut, marmonna Aragorn.

- Pardonnez-moi, s'exclama Legolas. Je vous ai pris pour Saroumane.

L'elfe s'agenouilla devant Gandalf, honteux.

- Je suis Saroumane. Ou plutôt Saroumane tel qu'il aurait dû être.

- Mais vous êtes tombé, murmura Aragorn incrédule.

- A travers le feu et l'eau, répondit Gandalf. Du plus profond cachot au plus haut sommet je combattis le Balrog de Morgoth. Jusqu'à enfin je pus jeter à bas mon ennemi, qui alla se briser sur le flanc de la montagne. Les ténèbres m'entourèrent alors, et je m'égarais hors de la pensée et du temps.

Legolas, Gimli et Aragorn restèrent pendu à ses lèvres, écoutant son récit avec fascination.

- Les étoiles tournaient au-dessus de moi, et chaque jour était aussi long qu'une existence sur la terre, reprit Gandalf. Mais ce n'était pas la fin, je sentis la vie revenir en moi. Je fus renvoyé, jusqu'à ce que ma tâche fût accomplie.

Legolas regarda Gandalf, et un sentiment étrange lui noua le ventre alors qu'une pensée saugrenue lui venait à l'esprit. Il sentit un rayon de chaleur contre sa peau et toucha le collier qui pendait à son cou. Elanor était-elle aussi revenue ?

- Gandalf, dit Aragorn.

- Gandalf... oui, c'est ainsi que l'on m'appelait. Gandalf le gris. C'était mon nom.

Le regard de Gandalf accrocha celui de Legolas.

- Je suis Gandalf le Blanc. Et je reviens vers vous en ce moment décisif.

L'envoyée des Valar - livre II (LOTR-Seigneur des Anneaux)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant