En début d'après-midi, après que chacun ait pu profiter d'un moment de répit, Gandalf les invita à le rejoindre à cheval sur les hauteurs à l'Est.
Théoden, Eomer ainsi qu'un de ses lieutenant se joignirent au petit groupe qui composait la communauté de l'anneau. Elanor gravit la pente sur le dos de Nahar, suivant Gandalf qui menait la marche. Arrivés en haut, ils virent un paysage des plus inquiétants apparaître devant eux. La montagne du destin grondait, et un panache noir s'étendait jusque dans les terres du Gondor.
Le Mordor était réveillé.
- Le courroux de Sauron sera terrible, et son châtiment immédiat, déclara Gandalf.
Elanor qui était entre Legolas et Aragorn, sentit sa peau se hérisser lorsqu'elle regarda au loin. Elle pouvait sentir la malveillance et l'aura de puissance qui se dégageait du Mordor.
- La bataille du Gouffre de Helm est terminée, continua Gandalf. Celle pour la Terre du Milieu ne fait que commencer. Tous nos espoirs sont désormais entre les mains de deux jeunes hobbits, quelque part dans les régions désertes.
Elanor se demanda comment Frodon et Sam pourraient franchir ce pays sans aucune aide, privés de nourriture et d'eau. Cette pensée la fit un peu paniquer.Gandalf semblait ressentir la même chose, mais il n'exprima pas son inquiétude à voix haute.
- Il nous faut chevaucher jusqu'à Isengard. Saroumane est privé de ces forces, c'est le moment pour nous de lui porter le coup fatal.
Théoden acquiesça vivement.
- Allons régler son compte à celui qui a mis à feu et à sang la moitié de mon royaume.
Ainsi partirent-ils en direction d'Isengard.
Ils chevauchèrent dans la direction opposée, ne repassant pas par la forteresse, mais allant par la route qui avait été coupée par la forêt de Fangorn.
Le bois était désormais calme, et les arbres n'esquissèrent pas le moindre mouvement lorsqu'ils pénètrent à la lisière de la forêt. Gimli et les trois hommes du Rohan s'agitèrent un peu, nerveux de se trouver sous le couvert des arbres.
Elanor devait être la seule à se sentir parfaitement à son aise, tout comme Gandalf et Legolas qui regardait la cime des arbres avec intérêt. Elanor était juste derrière le magicien blanc.
- Dites-moi Elanor, comment avez-vous fait pour passer par la forêt tout à l'heure ? lui demanda-t-il, curieux ou bout d'un moment.
- Oh, je... je n'ai rien fait de spécial. Les arbres m'ont laissés passer.
- Ah oui ?
Gandalf l'examina avec interêt. Elanor haussa les épaules.
C'était pourtant vrai.
Elle avait chevauché presque deux jours avant d'atteindre le Gouffre de Helm. Lorsqu'elle était arrivée, la forêt avait envahi la plaine sur des milliers d'hectares.
Perdue et désorienté, Elanor n'aurait su quoi faire si Nahar ne l'avait pas guidé correctement. Son cheval n'avait pas hésité une seconde avant d'entrer dans le bois, ne laissant pas d'autre choix à sa cavalière. Les arbres étaient sombres, poussiéreux, et menaçants. Mais aucun ne l'attaqua lorsqu'elle passa près d'eux, et elle comprit vite qu'elle n'y risquerait rien sous le couvert de leurs branches.
Ils n'étaient pas ses ennemis. Et elle, ne l'était pas pour eux.
Melian le lui avait dit : « Je suis la servante de Vàna et Estë, et cela implique que les arbres, les fleurs et les oiseaux sont sous ma protection. Si tu as besoin d'aide, ils seront tes plus précieux alliés. »
Elle pouvait à présent presque entendre les arbres, et sentir leurs émotions. Et c'était quelque chose de nouveau qui la perturbait et l'enchantait à la fois. Melian lui avait offert un don étrange, mais savoureux. Un don que les elfes possédaient. Elle s'était toujours demandé ce qu'ils ressentaient dans une forêt. A présent, elle pouvait les comprendre.
Elanor sentit d'autres interrogations dans le regard de Gandalf. Elle sut qu'ils en reparleraient tôt ou tard, mais que pour l'instant la présence des autres les en empêchait.
Quelques heures passèrent et Elanor s'occupa à rattraper le temps perdu en discutant avec ses compagnons. Legolas et Gimli chevauchaient ensemble, et semblaient être devenus inséparables. Elle fut étonné de voir que leur vieille rancune l'un contre l'autre s'était envolée durant son absence.
- Vous semblez beaucoup mieux vous entendre, leur dit-elle en souriant.
- Hum, on peut dire ça comme ça... baragouina Gimli.
- Et puis-je connaître la raison de ce changement ? demanda-t-elle taquine.
Elle vit Gimli lever brièvement les yeux pour regarder Legolas, mais ce dernier ne se retourna pas, et regarda droit devant lui. Son visage était figé, et inexpressif.
- Et bien... euh, c'est que beaucoup d'eau a coulé sous les ponts lorsque vous n'étiez plus là ma petite, répondit finalement Gimli. Ah ! Nous avons d'autres ennemis à combattre !
Elanor acquiesça légèrement. Elle trouva la réaction de Legolas étrange, et se demanda ce qui avait pu arriver pour que leur comportement change aussi radicalement.
- Saviez-vous que j'ai battu notre ami elfe au combat, fanfaronna Gimli. J'ai tué quarante-trois orques aujourd'hui !
- Quarante-deux, répliqua Legolas. J'ai tué le dernier orque, ce qui fait quarante-trois en ma faveur.
- Il était mort ! objecta Gimli.
- Il bougeait encore.
- Ma hache était plantée dans sa tête, voilà pourquoi il bougeait ! Allons j'ai gagné ! Et vous avez perdu, acceptez-le !
- C'est vous qui êtes mauvais perdant, rétorqua Legolas.
L'elfe était très calme, et il avait l'air de s'amuser de la situation. Elanor songea que certaines choses n'avaient pas tant changées que ça. Elle était en train d'étouffer son rire dans une quinte de toux, lorsque Gimli se tourna vers elle :
- Elanor, dîtes lequel de nous à gagner, qu'on en finisse.
Prise en otage, la jeune fille ouvrit la bouche, et observa ses deux amis avec perplexité. Legolas et Gimli la regardait, l'un avec un calme parcimonieux et l'autre avec insistance. Même Aragorn se retourna, et elle pouvait être quasiment sûre que le reste du groupe écoutait la conversation d'une oreille.
Lequel choisir ? Legolas ou Gimli ?
Son cœur penchait davantage vers l'elfe, mais en voyant l'expression avide du nain, elle se ravisa de le déclarer vainqueur.
- Euh...vous êtes à égalité.
Le nain se mit à s'égosiller, tandis que Legolas esquissait un sourire à demi-satisfait.
- Rahh ! C'est trop facile ! s'exclama Gimli. Vous ne vous en tirez pas comme ça !
Eomer et Théoden éclatèrent de rire à l'arrière du cortège, et Aragorn se détourna en ricanant doucement.
- Allons, maître Gimli. Il est impoli de contester la parole d'une dame, le rabroua gentiment Gandalf.
Gimli ronchonna, et Elanor parvint alors à sourire. Les rires du groupe s'élevèrent sous le couvert des arbres pendant un long moment, et le voyage se poursuivit dans la bonne humeur. Hormis le nain qui passa le reste de son temps à bouder derrière Legolas.
Un peu plus tard, alors qu'ils chevauchaient en silence, un bruit retentit dans les bois.
Elanor tendit l'oreille. C'était un rire. Aigu à ce qu'il semblait. Le rire se rapprochait, et ressemblait étrangement à celui... d'un jeune enfant.
Elanor sursauta et le reconnut tout de suite.
- Ils sont ici ! s'écria-t-elle.
Elle lança son cheval au galop en direction de la source du bruit et disparut dans les fourrés, vaguement consciente que Legolas s'était lancé à sa poursuite et que Gandalf l'appelait.
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L'envoyée des Valar - livre III (LOTR-Seigneur des Anneaux)
Fanfic(Suite du livre II - à lire impérativement) Fille d'aubergiste en Eriador, Elanor ne pensait pas qu'elle se retrouverait un jour mêlée aux conflits de la Terre du Milieu. Alors que les rumeurs d'une guerre au Sud se font de plus en plus entendre, so...