[ Point de vue : Sora / Animals - Architects ]
Nous franchissons la porte avec peine et posons Gabi sur le sol.
— J'ai vraiment mal...
— Ne t'inquiètes pas, je vais te remettre en forme, dit Théo en accourant vers lui.
Il pose ses mains sur ses jambes et ferme les yeux. Sa concentration semble intense et une énergie semble se dégager de ses mains, c'est assez énigmatique. Nous le regardons tous avec attention, y compris les autres participants, dont quelques-uns sont également blessés. Ce serait donc ça les pouvoirs ? Un ressenti. Je sais qu'il se passe quelque chose mais je ne le vois pas.
Le visage de Gabi se décrispe peu à peu et il semble bien plus serein. Théo retire ses mains et reprend son souffle, comme s'il avait couru. Nous le remercions et Chang lui indique de s'occuper des autres.
— Tu vas mieux ?
— La douleur est partie, ça devrait faire l'affaire, répond Gabi en se redressant difficilement.
— Une fois que tout le monde sera soigné, nous allons reprendre, intervient Chang.
— C'est un peu rapide, quand même ! je m'indigne.
— Ne vous inquiétez pas, nous sourit-il.
Il s'en va sans un mot de plus. On se croirait vraiment à l'armée, comme si on était des robots. On se blesse ? Pas grave, un petit coup de magie et c'est reparti !
Quelques minutes plus tard, Théo a terminé de soigner les autres participants. Nous nous remettons en route pour la troisième épreuve des clés, située dans une autre partie enfoncée de la forêt. Une fois derrière l'une des portes habituelles, nous arrivons dans une plaine où l'on progresse avec hésitation.
Un léger vent fait bouger les feuilles et nous rafraîchit dans le même temps. Une petite maison pointe le bout de son nez en haut d'une petite colline. C'est une petite maisonnette en pierre et tuiles rouges, comme si l'on revivait la première épreuve des clés.
— Ça va aller pour te battre, Gabi ? demande Dylan en observant le blessé.
— Je vais faire ce que je peux, répond-il simplement en boitant.
Le sol tremble. Un bruit inquiétant retentit. Gabi et moi dégainons nos katanas et Dylan ses pistolets, qu'il recharge rapidement. J'ai hâte que ça se termine, la fatigue mentale et physique sont difficiles à tenir.
Le sol se rompt, et une sorte de wyverne proche d'un dragon jaillit de terre. Blanche, ailes bleues, écailles, long visage allongé, grands yeux de dragon, dents acérées et taille imposante.
La wyverne nous jette un regard menaçant, mais triste à la fois. Ça me percute ; ils auraient donc des sentiments et ne seraient pas une sorte de simulation bien trop réaliste ? Je ressens un mal dans mon cœur, comme si son regard m'avait transmis ses émotions. Nous nous fixons quelques secondes, avant d'être interrompus par des tirs de Dylan en direction de ses ailes.
— Dylan ! Cette créature souffre, on ne peut pas lui faire du mal comme ça, j'interviens aussitôt.
La wyverne se protège et esquive les tirs en poussant un cri de mécontentement.
— Mais c'est un monstre et on doit aller chercher...
— On s'en fiche, de la clé ! Est-ce que ça vaut le coup de blesser et de faire autant de mal ?
Je commence à courir vers la maisonnette que l'on a aperçue plus tôt, suivie par le reste du groupe. Arrivés près de la maison, j'essaye de l'ouvrir, mais ça ne fonctionne pas. Dylan se met contre la porte, imité par Gabi, et ensemble, ils donnent quelques coups d'épaule violents. Le bois cède et nous entrons rapidement à l'intérieur du refuge.
— Bon, on fait quoi, maintenant ? D'habitude, quelqu'un s'occupe du monstre, entame Gabi.
— Je sais bien mais, vous devez me croire, elle est triste. J'ai l'impression, qu'on l'a force à se battre contre nous et qu'elle ne veut pas.
— Tu fais de la télépathie avec les monstres, maintenant ? se moque Dylan et fouillant sous une table basse poussiéreuse. Ces épreuves se ressemblent toutes.
— Non, j'ai simplement ressenti ses émotions, j'explique, adossée à un mur en lambris.
— Ouais, bien sûr. C'est logique, rationnel et totalement normal, réplique avec sarcasme Dylan, affalé sur un canapé en velours marron.
— Dans tous les cas, il faut qu'on trouve la clé, fait Gabi en croisant les bras.
Notre discussion est aussitôt interrompue par la disparition de Dylan, propulsé hors du toit brisé dans un bec écaillé.
— C'est pas vrai ! s'écrie Gabi en tiquant.
Nous sortons rapidement pour rejoindre la wyverne, armes en main. La créature nous fait face, serrant Dylan dans sa gueule pendant que celui-ci se débat, mais rien n'y fait, elle ne veut pas le lâcher.
— Rends-le nous, s'il te plait ! je demande avec inquiétude.
Elle me regarde et m'écoute, mais je n'arrive pas à savoir ce qu'elle pense.
— J'ai vu que tu souffrais. On te force à nous attaquer, je me trompe ?
La wyverne fait un petit bruit, comme une sorte de "Oui" quand on a la bouche pleine.
— Alors laisse nous partir. On prend la clé et on y va.
Elle semble comprendre ce que je dis, puisqu'elle se décide à déposer Dylan sur le sol. Je pousse un soupire de soulagement ; c'est un bain de sang évité. Elle s'allonge par terre, se met en boule et ferme les yeux ; je crois que ça veut dire qu'on a le champ libre. Je m'approche d'elle avec hésitation, tend ma main vers son visage, et caresse ses écailles. Elle me regarde à nouveau et fait mine d'apprécier.
— Merci, j'espère que tu seras libre, un jour. Malheureusement, je ne peux pas t'aider, je lui explique, les larmes aux yeux.
Elle refait un petit bruit et se remet en boule. Je rejoins les gars, qui m'attendent devant la maison, séchant rapidement mes larmes. Je suis à bout avec toutes ces questions et si peu de réponses.
— Et dire que j'ai failli mourir mangé par un petit dragon, lance Dylan d'un air penaud en fouillant la maison.
— On a eu de la chance d'avoir quelqu'un qui murmure à l'oreille des dragons, dit Gabi en riant.
Je souris à mon tour mais ne relève pas sa remarque. Nous sommes pressés de nous reposer, si on le peut, et de manger, boire, nous laver, bref, faire autre chose que tuer et ressentir de la douleur. Heureusement, Gabi la trouve dans une boîte en fer, posée sur la cheminée ; c'est plutôt facile, encore une fois.
En regardant la montre, je constate qu'il nous reste quatre minutes pour sortir de cet endroit. Nous nous mettons en route, et arrivés devant la porte de retour, je me retourne pour faire un signe à la wyverne, qui se relève et fait des bruits en guise d'adieux.
Un son violent retentit alors. Le son d'une balle. Percutant, bruyant, choquant. Le poitrail de la wyverne se couvre de rouge. Mon cœur s'est arrêté, mon esprit s'est brouillé. Quelqu'un vient de lui tirer dessus, alors que je lui disais au revoir. C'est... Chang. Chang vient de lui tirer dessus, en toute impunité, un fusil dans la main.
Il nous lance un regard froid, qui semble dire "Cassez-vous". On s'exécute, l'estomac noué. Je regarde une dernière fois la wyverne, qui s'écroule dans un cri de douleur qui me transperce le cœur.
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Blue Story - Tome 1 [1ER JET]
Fantasia[⚠️ Histoire précédant la réécriture, cette version reste similaire, c'est surtout le début qui change] Sora, Gabriel et Dylan, 18 ans, ont tout perdus et se retrouvent malgré eux agents spéciaux, dotés de pouvoirs, à Seeds, une organisation secrète...