Chapitre 71 [Fin]

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[ Point de vue : Gabi / Kerosene - Vanish ]


Sur la route en direction de la maison, la pluie fait son apparition, comme si l'événement n'était pas assez dramatique comme ça. Malgré sa voix calme, Waes conduit dangereusement et, à chaque virage, je me sens comme un pilote de Need For Speed. Mais bon, ça me fait du bien de sortir du campus. Il faudrait que j'achète un vélo, ça me permettrait de me balader aux alentours.

Nous arrivons rapidement sur place et je peux enfin sortir de la voiture dont le silence devenait pesant. La maison se situe dans une zone pavillonnaire similaire à celle où nous a emmenés Eskild pour la fête. Le modeste portail en bois entoure un petit jardin avec, en son centre, la bâtisse datant des années soixante.

Les murs et le toit sont calcinés, noirs et endommagés. Des tuiles sont parties et la nature a repris ses droits avec une armée de plantes grimpantes présente à peu près partout. L'ambiance est vraiment étrange mais pour l'instant, je n'arrive pas à savoir ce que je ressens.

Waes, la trentaine, vêtue d'un tailleur et coiffée d'un chignon blond, prend son porte-documents et me rejoint devant l'entrée, dont la fenêtre est cassée. La pluie nous tombe dessus comme un raz-de-marrée alors nous nous précipitons à l'intérieur, la porte étant déjà ouverte.

L'intérieur me fait un choc. La moitié de la baraque est partie en fumée et des graffitis ornent les murs mangés par la moisissure et le feu. Seule la cuisine semble encore intacte, seulement habitée par des insectes en tout genre et la saleté.

Je nous revois, mes parents et moi, assis sur le canapé déchiré, en train de regarder une télé qui n'existe plus. La couleur du tissu était horrible - un marron chocolat délavé - mais son confort était sans égal. Le soir, on avait l'habitude de regarder le journal, qui nous indiquait que le monde s'effondrait un peu plus chaque jour, puis on lançait un film parce que mon père collectionnait les DVD de blockbusters hollywoodiens.

La petite table basse où ma mère posait ses magazines de médecine est elle aussi brisée. Quant à la bibliothèque qui contenait les DVD et le bureau qui était muni de l'ordinateur sur lequel j'allais quand j'étais petit, ils ont disparu. La table de la salle à manger en bois est couverte de mousse et la brûlure s'étend sur quasiment tout le meuble.

Le carrelage a eu plus de chance, seulement cassé à certains endroits, laissant apparaître le sol en béton gris et noir. Je prends le temps d'analyser chaque pièce, chaque meuble restant et de me souvenir de tout. Je demande à Waes de m'attendre dans la voiture pour me laisser le temps d'examiner tout ça, ce qu'elle accepte de faire pour aller flâner dans les magasins.

Au moment où je retrouve quelques DVD épargnés sous un tas de cendres, la porte s'ouvre et en me retournant, je constate que Dylan, Sora et Eskild sont là. Je pensais que Théo aurait pu se libérer, mais il avait beaucoup de travail à rattraper, à mon grand regret. Je suis tout de même content de voir le petit groupe, ne m'attendant absolument pas à les voir, étant donné les circonstances dans lesquelles nous nous sommes quittés. En ce qui concerne Eskild, je ne comprends pas du tout ce qu'il fait là.

— Salut, lance Dylan en souriant. Théo nous a dit pour ta maison et malgré ce qui s'est passé, on se voyait mal te laisser affronter ça tout seul.

— Remercie-le, réplique Sora en croisant les bras. C'est lui qui m'a forcé à venir comme gage de réconciliation.

— Pour ma part, c'est l'autre homme d'affaires, là, qui m'a demandé de faire un rapport, comme Théo ne pouvait pas, explique Eskild de son ton blasé habituel.

Je les regarde et reste bouche-bée un instant avant de sourire. Dylan, Sora et moi nous mettons en quête d'objets à sauver au rez-de-chaussée pendant qu'Eskild fume sur le perron, qui ne doit plus être très stable. Au bout d'une demi-heure, nous nous réunissons dans la cuisine pour faire l'inventaire.

Blue Story - Tome 1 [1ER JET]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant