Il suffit d'un mot

Chaleur

Il n'y a pas de temps. Pas de songes non plus. Le repos est seulement le repos. Lorsque j'ouvre les yeux, rien n'a changé. Ombre me recouvre, oiseau chante, arbre protège...

Je ne suis plus solitaire. Plus totalement. J'apprends à traduire l'oiseau au fond de mon âme et la lumière m'imprègne un peu plus. Je ressens sa présence dans les battements très lents et très infimes de l'arbre. L'arbre qui n'est pas enchainé à la terre. L'arbre qui est noué à elle, relié, uni par le partage de leur essence. Ma main caresse l'arbre puis la terre et remonte, rien ne change. L'essence est la même, elle pulse tout autour de moi. Mon cœur se calque sur elle sans vraiment parvenir à l'imiter. Je ne suis pas de la même nature.

Mon âme se serre, plus solitaire que jamais à présent. Rejetée inconsciemment par ceux qui sont unis, ils ne peuvent rien y changer. Je me lève, je dois avancer. Je remercie simplement arbre, oiseau, terre d'avoir été présents. Je remets mes pieds sur la pierre et continue mon chemin.

Lentement.

L'autre est devant moi. Je m'arrête net. Je ne comprends pas. Je regarde l'autre, l'autre me regarde. Il semble m'attendre, tout simplement. Il ne semble pas perdu, il ne semble pas guidé non plus. Il n'a pas l'air d'en savoir plus que moi mais il est là, l'autre. Nous nous observons et nous approchons l'un de l'autre. Je ne ressens pas l'envie de fuir, je n'en ai pas besoin.

Je sais.

Nos âmes vibrent sur la même pulsation. Je n'ai pas besoin de toucher pour le sentir. Le voyage sera moins pénible, parce qu'il sera partagé. Le temps sera construit avec les souvenirs, modelé à notre convenance. Même Ombre ne le fait pas fuir, parce qu'il en a une aussi.

Dans ses mains, il a une couverture brune. Comme la couleur de l'arbre. L'autre la pose sur mes épaules et je le couvre d'une couverture bleue. Je ne sais pas d'où elle vient, je sais seulement que c'est la sienne.

L'autre.

Je ne suis plus solitaire.

Le ciel n'est plus rouge maintenant, il est bleu. La pierre est moinsfroide sous mes pas. Je ne veux plus cesser de marcher tant que l'autre est là.Je veux savoir. Je veux apprendre. Je veux partager... M'écoutes-tu ?