Chapitre 46

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90 jours.

Très tôt, ce matin, je me suis levée pour dire au revoir, bien à contrecœur, à Alexia. Simplement vêtue d'un débardeur et d'un short, je patiente devant la porte tandis que les trois ont rassemblé leurs affaires en direction de la Meute de l'Ouest. Je n'ai pas envie qu'Ale s'en aille, si loin d'ici, de moi, et mon cœur se serre à cette seule idée mais je ne peux rien y faire. Un devoir est un devoir et je ne suis rien ni personne pour empêcher ça.

Sur le seuil m'accompagne Alex qui depuis le début, n'a pas croisé une seule fois mon regard alors que je m'évertue à l'observer. Je mentirais si je disais que ça ne me blesse pas, comme une brûlure qui s'étend peu à peu sur ma peau mais tant qu'il subsistera cette gêne, il continuera de fuir mes yeux. Alors j'aurais toujours aussi mal.

Je soupire, l'humeur un peu plus basse que d'habitude. Ma nuit y est pour beaucoup. Longue, sans rêves, je n'ai pas eu pour autant l'impression de m'être reposée et devoir supporter le mur entre Alex et moi est d'autant plus douloureux. Sa sœur nous rejoins, son sac à la main et un sourire fade qui étire son joli visage.

— Ça va aller ? demande Alexander.

— Bien sûr, arrête de t'inquiéter, ce n'est que pour deux-trois semaines.

— Deux-trois semaines de trop, Alexia.

Celle-ci soupire en voyant le jeune homme serrer des dents. Quand je vois le regard sombre que darde Alexander sur sa sœur, je déglutis, le cœur qui commence à battre plus fort, conscient que quelque chose.

— Alex... Tu sais très bien que tôt ou tard, ça allait arriver.

Ledit concerné coule un bref regard vers moi mais si rapide qu'en un clignement d'œil, j'ai peur de l'avoir totalement imaginé. Cependant, les minutes qui suivent confirment que j'avais raison. Les deux se décalent pour parler de sorte à ce que je n'entende pas un traître de mot de ce qu'ils échangent. Son geste, pourtant si anodin, me brûle le cœur. Je déglutis, la douleur coincée dans le plexus solaire et je me ratatine sur moi-même. En soit, je peux comprendre. Mais mon cœur, lui non.

S'il m'évite et se tient maintenant loin de moi, je ne sais pourquoi, c'est parce qu'il ne me fait pas confiance. Ce manque blesse mon palpitant plus profondément que je ne le croyais quand je sens le coin de mes yeux me piquer. Bordel. Je ne peux tout simplement pas me mettre à pleurer ici.

De toute façon, tu es égoïste, me souffle ma petite voix intérieure.

Je me mords la lèvre et regarde la forêt un peu au loin de la maison. Quand je vois les feuilles remuer sous la brise légère du vent, la tranquilité qui semble régner, comme une reine, sur les lieux, me donne envie d'y aller mais je ne peux pas partir avant d'avoir dit au revoir à tout le monde. Je jette un coup d'œil à ma meilleure amie et à son frère et me fige quand ils reviennent.

Je reprends ma respiration et cache ma blessure sous un masque mélancolique qui n'est triste qu'à cause du voyage d'Alexia. Elle ne doit surtout pas savoir qu'être mise de côté et ignorée par son cher jumeau me consume à petit feu. Je ne fais plus qu'y penser, à ce que nous avons partagé et je me rends folle tandis que lui a préféré faire la technique du lâche. Et ça me tue plus que je ne le voudrais.

De nouveau devant moi, Alexia me prend dans ses bras spontanément et je reste un instant surprise avant d'en faire de même. Mon cœur se serre quand je la sens s'échapper de mon étreinte mais je tiens bon. Le masque doit rester en place. Quand je tourne le regard vers Alex, nos yeux se rencontrent étonnement mais il rompt rapidement l'échange. Je grimace mais je n'oublie pas qu'Alexia est toujours là, entre nous deux.

La Malédiction de La Luna (S1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant