Chapitre 32

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J'aurais aimé pouvoir poser la question qui me taraude sur le loup plutôt vieux mais je n'en n'ai pas l'occasion car en quelques secondes, nous nous retournons tous vers la voix quelque peu familière qui m'indique que ce n'est autre que Shelley. Aigüe, faussement innocente et mielleuse, ce timbre ne peut que lui appartenir. Son rictus méprisant, quant à lui, ne passe pas inaperçue et je suis presque certaine, avec appréhension, qu'il m'est destiné. Je déglutis avec difficulté avant de me mettre entièrement face à elle.

— Bonjour à toi aussi Shelley, rétorque froidement Alexia qui n'a visiblement pas apprécié son ton condescendant, la main sur mon bras.

— Oui oui désolée, et bonjour.

Mais elle ne se départit toujours pas ce sourire narquois qui lui confère un aspect de peste. Et je suis sûre que si on lui faisait remarquer, elle n'en serait que plus honorée. Je serre les poings mais ne dis rien, je crois qu'après cette réunion épuisante, je n'ai pas la force de me battre. Je suis impuissante, comme tout à l'heure. Et ça n'accentue que ce malaise qui enfle dans ma poitrine peu à peu.

— Je vois, comme toujours, que tu fais en sorte d'être au centre de l'attention. Tu cherches à te faire aimer, c'est ça ? dit-elle avec un ton moquer.

— Pardon ? je murmure, soudainement surprise.

Et je suis sûre que cela doit se lire sur mon visage et dans ma voix. Les yeux écarquillés et mes sourcils levés, je le regarde comme si elle m'avait dit que je venais de la planète Mars. C'est sûrement une attaque mais je ne comprends pas un traître mot tout simplement parce que cela m'est inimaginable.

— Oui, fais pas genre. J'ai très bien vu comment tu cherches l'attention de Alexander et celle de mon frère, aussi, évidemment. Et je comprends vraiment pas pourquoi tu fais ça, continue-t-elle en me regardant droit dans les yeux, ceux-ci aussi dur que du silex.

Je souhaite ouvrir la bouche pour me répondre mais encore une fois, je me retrouve rapidement désarçonnée. Mon incapacité à lui répondre est surtout due au fait que c'est tellement ridicule. Je hais que tous les regards soient tournés vers moi alors pourquoi j'irai courir après ? L'attention ne me laisse que des traînées froides dans le dos et je suis aussi à l'aise qu'une étrangère ici. J'aimerais tellement lui répondre mais il est tellement plus facile de se taire et de serrer les poings. Je suis lâche non ?

— Arrête, grogne Ale en serrant les dents, la mâchoires terriblement tendue.

— Quoi ? Elle n'est pas capable de se défendre toute seule ? Je comprends mieux pourquoi tes parents ont abandonné leur incapable de fille.

Je recule sous le coup de l'impact abrupt et douloureux. Je n'en crois pas mes oreilles et j'en saignerai presque. Mes oreilles bourdonnent désagréablement et je sens que mes paupières sont encore plus écartés que tout à l'heure. Non... Elle n'a pas osé. Je n'ai pas de bons rapports avec mes parents, ma relation avec mon père étant inexistante et celle avec ma mère est plus qu'houleuse. Mais ça ne lui donne pas le droit de dire ça car elle ne sait absolument rien. Mon cœur crie avec des piqûres plus sifflantes les unes que les autres mais je reprends contenance. Si je ne peux pas me défendre, je ne dois surtout pas montrer que je suis touchée en commençant à trembler.

Je fais ce que je sais faire de mieux : rester aussi muette qu'une carpe.

Quant à elle, cette pimbêche, elle ricane tout bêtement. Ale, comme toujours, reprend les devants et me défend à ma place :

— Tais-toi, tu ne sais rien Shelley. Alors range ta langue de vipère et dégage fissa.

— Oh mais bien sûr que si. Nous sommes tous menacés par votre petite protégée. Très franchement je comprends tes parents. Qui voudrait s'encombrer d'une menace ?

La Malédiction de La Luna (S1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant