Chapitre 5 : Fragile

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Une colocataire entre dans le salon, stupéfaite par la différence d'ambiance. D'un côté, je suis installée sur le canapé avec un visage rayonnant et enjoué alors que de l'autre côté, Christine est tassée contre le dossier au bord de la dépression. Elsa arrive pour constater la même chose. Elle tapote son épaule.

—Laisse, je m'en occupe.

Notre colocataire décide d'évacuer les lieux. Elsa nous regarde alors tour à tour.

—Qu'est-ce que vous faîtes ?

Christine et moi levons la tête vers elle. Je me ressaisis aussitôt.

—Je travaille sur l'interview.

—Je lisais un livre.

Notre amie fronce des sourcils peu convaincue. Nous avons chacune un secret. Je n'ai rien dit à propos de mon rencard car Elsa a tendance à s'emporter très rapidement. Quant à Christine, elle n'a pas le cœur à entendre des bonnes nouvelles.

—Je comprends que Christine soit déprimée...

—Je ne le suis pas, rétorque-t-elle

—Mais pourquoi as-tu l'air aussi contente ?

—Je suis juste très heureuse de rédiger cet article.

—C'est tout ?

—Et j'ai bientôt fini.

Elsa risque de me démasquer d'une seconde à l'autre, je dois fuir au plus vite. Je ferme l'écran de mon pc et retourne dans ma chambre. Mon portable vibre à ce moment. En voyant le nom, mon corps sautille ne sachant pas quoi faire. J'applique alors la méthode de respiration apprise en sophrologie. Tout ira bien. Me sentant prête, j'ouvre enfin le message. Matthew m'invite à un rendez-vous samedi. Il propose un cinéma le matin et une balade l'après-midi. J'accepte sans hésitation et commence à choisir la tenue. Cette fois, je vais l'impressionner.

*

La veille, il m'envoie un message pour me demander à quelle heure il doit venir me chercher. Rapidement, je lui réponds de se rejoindre directement sur place.

Je me lève très tôt le samedi. En fait, je n'ai pas beaucoup dormi de la nuit à cause de l'appréhension. Jamais je ne m'étais montré aussi maladroite avec quelqu'un, il était le premier. Ce matin, je me réveille donc qu'avec des ondes positives. Tout ira bien, me répété-je à moi-même. Je file directement sous la douche, me coiffe, me maquille et m'habille convenablement. Je m'évalue ensuite devant le miroir. La robe bleue avec des motifs blancs correspondait à ma personnalité. Je ne suis ni extravagante ni sexy d'où les trois modestes barrettes qui servaient à dégager mon visage et les vieilles ballerines noires datant du lycée. J'inspire tranquillement puis me dépêche de partir. A l'entrée, je tombe comme par hasard sur Davis en tenue de jogging. Il est aussi surpris que moi.

—April ? Où vas-tu ?

—Je... J'ai un rendez-vous. A plus tard.

Je me mets à courir afin d'éviter ses questions. Davis m'observe longtemps puis monte à l'étage où ses amis peuvent remarquer son air tourmenté.

—Qu'est-ce qu'il se passe ?

—J'ai vu April, elle était très bien habillée et avait l'air pressé.

—Un rendez-vous galant, devine l'un deux

Davis a peur que j'aie un copain. Depuis le temps qu'il tâtonne à se confesser, il n'a pas envie que je lui échappe ainsi.

*

J'arrive dix minutes à l'avance au cinéma. Je devrais normalement avoir le temps de lire les résumés des films.

Les Gentlemans ChangentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant