Chapitre 30

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«- J'ai tout foiré, papa. »

Les larmes que j'avais réussi à calmer, et qui ne cessaient de couler, sortent à nouveau. Mon père relève les yeux de ce foutu magazine. Celui qui a causé cette dispute avec Florian, qui me paraît tellement insurmontable. Il m'attrape par les épaules, et je me recroville au creux de ses bras, symbole de réconfort depuis mon enfance.

«- Ne raconte pas n'importe quoi., commence mon père en me serrant contre lui et en me frottant l'epaule avec douceur. Vous attendez une petite fille, vous vous êtes fiancé, vous vivez ensemble... Et surtout, vous vous aimez. Laisse passer ta colère, la sienne, et tout va s'arranger. C'est particulier, vous deux, parce que vous avez un mode de vie différent. Vos métiers incluent des difficultés. Tu sais, on se disputait beaucoup avec ta mère. Pour des bêtises, mais ça fait partie de la vie de couple.
- On ne se dispute jamais aussi fort...
- Je sais, mais il faut bien qu'il y en ait des plus intenses. Je vais te confier quelque chose. Quand ta maman m'a appelé ce jour-là pour me dire qu'elle était arrivée en France avec son fils pour vivre avec moi sans prévenir, j'étais révolté. Les mois s'étaient écoulés, et j'avais fait le deuil de notre amour d'été. J'avais repris ma vie, et jamais je n'aurais pensé la revoir. Alors, je suis tout de même aller à Paris, la chercher elle et son fils que je ne connaissais pas du tout. Sören était très remonté contre sa mère qui l'avait emmené dans un pays étranger, dont il ne parlait pas un mot de la langue, retrouver un homme qui était un parfait inconnu. Je les ai accueilli, pour ne pas les laisser à la rue étant donné que ta mère n'avait pas un rond. Quand on s'est retrouvé tous les deux, dans mon pauvre deux pièces qui convenait à ma vie de célibataire, on s'est vraiment disputé. On s'est insulté, presque détesté. Je lui ai dit plus d'une fois de retourner en Suède, qu'elle n'avait rien à faire en France et qu'elle n'était qu'un stupide amour de vacances. Alors que j'étais éperdument amoureux d'elle. Mais, avec un peu de temps et une grosse discussion, tout ça s'est apaisé. Et elle est restée ici. On s'est beaucoup disputé au sujet de Sören, qui me détestait plus que tout. Elle me disait de faire un effort avec lui qui me rejetait, et moi, j'en avais marre. C'est allé mieux, petit à petit, au fur et mesure qu'il s'est habitué à la vie en France, qu'il s'est trouvé des amis, des repères. Avec le temps, tout s'arrange.
- J'ai peur de le perdre.
- Tu ne vas pas le perdre. Il t'aime vraiment. Quand il est venu me voir, pour savoir s'il pouvait te demander ta main, j'ai d'abord bien rigolé parce que je ne m'y attendais pas, mais j'ai ensuite accepté sans hésiter. Et tu veux savoir pourquoi ?
- Pourquoi ?
- Parce que je n'ai jamais vu quelqu'un d'aussi amoureux que lui. Jamais personne n'a aussi fait attention à toi, jamais personne ne t'a autant comprise que lui, jamais personne ne t'a autant soutenue que lui, jamais personne ne t'a rendue aussi heureuse que lui. Même pendant les moments difficiles, il était là pour toi. Et, je n'ai jamais vu un homme regarder une femme comme il te regarde. L'amour transperce à travers vos regards. Je n'ai jamais eu peur de le laisser prendre ton cœur, parce que je savais qu'il allait en prendre soin. C'est pour ça que je lui ai dit que j'attendais qu'il te demande en mariage depuis des années. Les événements vous dépassent tous les deux, et vous n'avez pas su comment réagir, tous les deux. Alors, le plus simple était de s'énerver. Ça ira mieux demain, ou après-demain au plus tard. J'en suis sûr. »

J'essuie mes larmes, en restant dans les bras de mon père. Je bois ses paroles, sans me demander si elles sont bonnes ou pas. J'ai confiance en mon père, et je le crois. Malgré tout, la douleur et la peur n'arrêtent de me ronger. Un long silence plane dans l'appartement, mais je crois bien que j'en ai besoin.

«- Qu'est-ce que tu veux manger ?
- Je n'ai pas faim., répondis-je.
- Tu dois manger. Laisse-moi te préparer un bon plat. »

⌚Avril 2021⌚

«- Esmée...? »

Je souris au ton enfantin de Florian en enfournant ma fourchette remplie de nourriture dans ma bouche. Je lui fais un petit coup de tête pour l'inciter à parler.

Il Fait Mon BonheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant