COQUILLE

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— Bah oui, mais non ! Je suis désolée, mais quand on part à Coquille, il faut un minimum de préparation !

— D'accord, j'ai compris ça, mais magnez-vous les miches, plus vite on sera parti, plus vite ça sera fini.

— Mais pourquoi vous êtes si pressé d'y aller, aussi ?! Je croyais que vous détestiez cette île...

— Justement, c'est pour ça !

— Alors là, je ne vous comprends vraiment pas...

— Il n'y a pas grand-chose que vous comprenez !

— Hé, ho ! ça suffit, oui ?! Je vais commencer par mal le prendre !

— Pardon, c'est que j'aime pas attendre, et en plus on part pour Coquille... alors, bon...

— Mais, dites... qu'est-ce que vous avez contre cette île, en fait ?

— Je sais pas, c'est physique, ça pue la morue, il y a des mouettes partout, il fait tout le temps moche, les gens sont dégueulasses, il n'y a pas une plage sans galets, non vraiment, il n'y a rien qui va sur cette île !

— "Les gens sont dégueulasses", quand même, vous abusez... Coquille, je trouve ça p-

— Si vous me dites poétique, je vous jure que je me barre !

— Non, pittoresque, je trouve ça pittoresque !

— Pittoresque ?!

— Tout à fait monsieur ! C'est un endroit charmant, rustique, fidèle à lui-même, non, vraiment j'ai des bons souvenirs d'enfance, de quand j'y allais en vacances avec mes parents !

— Oh, mais oui, mais bien sûr, quand on est nourri et logé dans les cabanes cossues, là, je ne dis pas, c'est la belle vie, on peut trouver ça pittoresque ; mais quand on patauge toute la journé les deux pieds dans de la bouse de mouette, à se demander à chaque pas si on a pas écrasé quelque chose de vivant dans la merdre, à manger deux bouts de crevettes par jour, dans des cases qui tiennent on ne sait comment sur piloti, là, c'est pas la même limonade, excusez-moi !

— Pfff...

— Allez leur dire aux pêcheurs de Coquille à quel point leur île est pittoresque !

— Mais vous aussi, à ramener la misère du monde à toutes les sauces ! Ce n'est pas de ma faute à moi, s'ils ne savent pas profiter de ce qu'il y a sous le nez à ces pauvres gens...

— Avouez quand même que c'est fort de café, ce que vous dites, Coquille, c'est de la merde, ça a l'odeur de la merdre, le goût de la merde, la texture-

— Bon, c'est bon, j'ai compris... Toujours à se plaindre celui-là !

— Et bien vous, vous ne le faites pas assez !

— Zut !

— Bon, allez, on peut y aller maintenant !? J'en ai assez de vous attendre, elle est très bien votre tenue !

— Vraiment ? Vous trouvez ?

— Mais oui !

— Non mais je crois que je vais prendre la première, finalement !

— Mais c'est pas possible d'être aussi indécise !

— De toute manière, comme vous dites, une fois arrivés là-bas, je vais me mettre de la bouse partout...

Paavo & Petra ou L'Improbable AventureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant