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Another Love - Tom Odell

Victor,
un an plus tôt,
Monaco.

— Aaanita, Anita, A-A-Anita, chantonné-je en esquissant quelques pas de danse ridicules vers elle.

Anita rit. Et je l'imite.

Anita n'est pas Lucy, ça, c'est certain. Elle ne lui arriverait pas à la cheville. Mais je l'aime bien. Elle a toujours été gentille avec moi. Elle est plutôt jolie, et puis son humeur est toujours légère comme une plume, sans prise de tête. J'aime ce côté chez elle. Elle m'aide à me remettre de cette rupture. Je sais que mes intentions ne sont pas tout à fait louables. Que je ne devrais pas mentir ainsi à Anita. Mais je ne compte pas lui faire de mal à proprement parler, et j'ai bien conscience qu'elle m'aime un peu plus qu'un ami depuis un certain temps. Quand je me serai remis, je la laisserai partir en douceur, sans la blesser. Jusque-là, je crois pouvoir tenir le rôle du petit ami amouraché.

— Tu sembles bien joyeux aujourd'hui, remarque-t-elle, un sourire aux lèvres.

— Ça, c'est parce que je t'aime.

J'enserre sa taille et la soulève jusqu'à la poser sur la table, puis m'assois sur une chaise la tête posée sur sa cuisse.

— Oh, Victor... soupire-t-elle en plongeant ses mains dans mes cheveux. Je t'aime.

Elle m'embrasse, et dans ce geste tellement anodin pour un couple normal, j'ai du mal à réprimer un mouvement de recul. Sa bouche n'a pas le même goût que celle de Lucy. Elle sentait la menthe. Celle d'Anita a un parfum sucré.

— Est-ce que je pourrai venir avec toi au gala ?

Je m'apprête à refuser quand je me rappelle que nous sommes sensés être fraîchement ensemble. Je lui accorde alors mon assentiment d'un sourire pincé. Je vois dans ses yeux qu'elle remarque ce détail, mais la joie explose alors en elle et ses doutes sont balayés quand elle me remercie d'une étreinte ferme.

Elle part ensuite à l'étage pour se trouver une tenue, et je prie pour avoir bien enlevé toutes les affaires de Lucy de mes tiroirs.

***

— Assis-toi là, l'invité-je en tirant sa chaise.

— Un parfait gentleman, remarque Hugo, pince-sans-rire.

Je lui lance un regard d'avertissement avant de m'asseoir à côté de ma soi-disant bien-aimée.

Hugo a vu clair dans mon jeu, dès le départ. Je n'ai pas démenti. Et j'admets éprouver un plaisir intense à lui voler celle pour qui il a toujours éprouvé un amour infini, alors même qu'il a contribué à la perte de mon amour à moi. À la perte de Lucy.

— Est-ce que tu sais ce que tu veux prendre, mon cœur ?

Je sens le sourire d'Anita qui irrite ma peau, mais mes yeux sont rivés à ceux d'Hugo, un air de défi implanté dans mes prunelles et un sourire supérieur sur ma bouche. Au début, il me contemple avec mépris, attaqué par la jalousie et la rancune à la fois. Puis ses iris se fixent à ceux d'Anita. Et j'y vois le désespoir. Parce qu'il pourrait crever rien que pour obtenir un de ces regards. Ou plutôt un de ses regards.

— Je crois que je vais opter pour...

Mais je ne l'écoute déjà plus. Mon attention est détournée par la carte des vins. Je sens toute le haine d'Hugo me transpercer de part en part. Cela ne fait que redoubler ce rictus qui ne quitte plus mes lèvres. Anita prend ça pour de l'amour quand il n'exprime que mépris.

Speed ; VictorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant