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Can't Pretend - Tom Odell

Victor,
8 mois plus tôt,
Monaco.

— Debout Vic.

Je grommelle des mots que je ne comprends pas moi-même et me mets dos à Anita, espérant grapiller encore un peu de sommeil.

— C'est Noël.

Mes yeux s'ouvrent d'eux-mêmes, grands comme des soucoupes. Je me redresse d'un coup dans le lit, provoquant le rire d'Anita.

— Où sont mes cadeaux ?

— Eh bien... au pied du sapin ?

Je sors du lit péniblement, me débattant avec les couvertures qui s'emmêlent dans mes membres maintenant pleinement énergiques. Une fois dépêtré des tissus, je trottine jusqu'aux escaliers que je descends en hâte.

Je dois reconnaître qu'elle a fait du bon boulot, avec la décoration. On se croirait dans Hansel et Gretel avec leur maison en pain d'épices. Des guirlandes habillent chaque recoin du salon lui-même équipé d'un sapin aux nuances de rouge et d'or. L'odeur de pin emplit encore la pièce après des semaines et les lumières clignotantes multicolores me plongent dans l'univers féerique des fêtes. Je m'assois en tailleur devant les paquets et attends impatiemment qu'ils m'aient tous rejoint. En effet, en plus d'Anita, mon frère et mon père se sont greffés à notre duo pour ces fêtes de famille, ainsi que Barthelemy, qui ne souhaitait pas vraiment se joindre à ses parents britanniques étouffants de l'autre côté de la Manche.

— Alors, ça c'est ma pile. Débrouillez-vous avec les vôtres.

Je m'attelle avidement à la tâche d'arracher les paquets cadeau, instaurant le mouvement chez mes proches. Je découvre avec joie de nouveaux gants pour la compétition offerts par mon meilleur ami, une bouteille de Dom Pérignon par mon père et une montre de la part de Matthias, mon grand frère. Je m'empare du dernier paquet avec désinvolture, reconnaissant déjà l'écriture gracile d'Anita. L'emballage est carré, épousant manifestement les formes d'une boîte, mais le paquet est plutôt léger.

— Ce n'est pas grand chose, s'excuse-t-elle presque.

Mon père pose une main réconfortante sur son épaule, le regard chaleureux qui, je le vois, la détend immédiatement.

— Je suis sûr que ça fera l'affaire.

J'enlève les bouts de scotch avec une précaution singulière que je ne me reconnais pas pour découvrir un boîtier floqué d'un logo à la forme d'une couronne. À l'intérieur repose une montre au bracelet d'argent, le cadran incrusté de fines lamelles de verre. La lentille recouvrant les aiguilles laisse entrevoir une brèche qui donne une pleine vue sur le mécanisme du bijou. Je lève les yeux vers Anita, stupéfait. Elle me fait signe de le retourner, et je découvre une gravure sur le métal gris.

Nous brillerons dans l'obscurité quand la vitesse nous aura emportés.

Ces mots ne me sont pas inconnus. Et pour cause, ce sont ceux que j'ai adressés à un journaliste particulièrement lourd lors de nos débuts, à Barth et moi. Apparemment, nous étions trop jeune et inconscients. Peut-être qu'il avait raison. En fait, il avait vu juste. Mais c'est grâce à ça qu'on en est là, aujourd'hui. J'avais malgré tout trouvé cette phrase pour le contrer. Et c'est devenu mon crédo.

— Merci, Anita. C'est vraiment magnifique.

Une étincelle de soulagement que cache celle de la fierté luit dans ses iris, et je crois même apercevoir ses joues rosir.

— Tu ne veux pas ouvrir tes cadeaux, Anita ?

Surprise, elle se tourne vers Matthias, qui la considére avec bienveillance.

Speed ; VictorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant