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Daylight - David Kushner

Anita,
le lendemain,
maison de Victor et Anita.

Allongée dans la pelouse, les yeux fermés, je savoure la sensation caressante que provoquent les doigts de Vicky dans mes cheveux. Depuis une demi-heure, il s'affaire à natter mes mèches raccourcies, concentré sur sa tâche comme s'il s'agissait d'un dossier important. De temps à autres seulement, il relève la tête de son œuvre pour me demander si j'ai besoin de quoi que ce soit. Depuis l'intervention de Lenny dans nos vies et mon récit de la veille, Victor ne me lâche plus. Il fait tout, me prépare les plats que j'aime, m'étreint sur le canapé devant mes séries, et le voilà à coiffer mes cheveux dans la pelouse, profitant du soleil, après m'avoir concocté un smoothie à la couleur peu alléchante mais au goût exquis.

— J'ai terminé.

Une pointe de fierté résonne dans son timbre, et sa mine satisfaite me confirme mes impressions. Je tourne la tête vers la baie vitrée un peu plus loin et me redresse sur les coudes pour apercevoir son art. Contrairement à ce que je pensais, il ne s'est pas contenté de natter mes mèches, il y a également formé une couronne tressée parsemée de pâquerettes.

— Ça te plaît ? s'enquiert-il, préoccupé.

— Je ressemble à une princesse Disney, m'esclaffé-je.

— Tu es bien mieux qu'une princesse Disney. Tu ne parles peut-être pas aux animaux, mais tu es une femme forte et indépendante qui n'a pas besoin de son chevalier servant pour réussi dans la vie. Et tu ne chantes pas à tout bout de champ.

Au-dessus de moi, il se penche et embrasse mes lèvres à l'envers, puis s'allonge de sorte à ce que nos têtes soient côte à côte. Je prends une grande bouffée de l'air chargé des fragrances des fleurs qui commencent à éclore. Le soleil caresse ma peau sans l'attaquer, un vent à peine perceptible soulève légèrement ma robe et frôle mon visage. Je pourrais rester ainsi pour la vie.

— Tu te rappelles quand je t'ai dit de ne jamais plus laisser les autres te maltraiter ?

Déconcertée par sa prise de parole, je détourne légèrement la tête jusqu'à frotter sa joue, sourcils froncés, sans pour autant ouvrir les yeux. Silencieuse, j'acquiesce contre sa peau.

— Je le pensais. Mais maintenant, je veux que tu me fasses une autre promesse.

— Je t'écoute.

— Ne laisse plus les autres régenter ta vie. Que ce soit par la peur, la culpabilité et même l'amour, ne nous laisse pas te dicter ta façon de te voir, de t'aimer. Ton grand cœur, c'est à la fois ton meilleur défaut et ta pire qualité.

— Je n'ai pas...

— Et il est grandement tant que tu apprennes la différence entre modestie et manque de confiance.

Faisant mine d'être vexée, je claque un revers de main contre son ventre. Il rit, embrasse la naissance de mes cheveux.

— Crois-moi, je connais la différence entre les deux. Quand ma mère nous a laissés, Matthias, mon père et moi, c'était par pure égoïsme. Aujourd'hui, même si parler d'elle me rend amère, ça ne me fait plus mal. Parce que j'ai conscience de ma valeur. Et ce n'est pas elle, qui m'a connu cinq ans de ma vie, qui arrivera à m'en faire douter. Alors bats-toi Anita, parce que tu es tellement précieuse que tu ne mérites pas de te tracasser pour un mensonge.

Victor parle rarement de sa mère. Si j'ai d'abord pris ça pour de la colère voire de la douleur, je comprends maintenant qu'elle n'est qu'insignifiante à ses yeux. Et ça me rassure. Ça me rend fière.

Speed ; VictorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant