Speed ; Victor

36. ✔️

Devil Doesn't Bargain - Alec Benjamin

Victor,
fin mai,
Imola.

- Lucy, va-t'en.

Je soupire, me pince l'arête du nez. La chaleur écrasante de l'Italie me colle à la peau, et mon ex petite amie ne m'aide pas à faire redescendre la pression. Voilà bientôt dix minutes qu'elle tente de me faire la conversation, mais je ne l'écoute pas. Par-dessus tout, j'ai peur qu'Anita la voit. Je sais qu'elle ne tirerait pas de conclusions trop vite, mais je ne veux pas que le doute s'installe dans son esprit.

- Victor, je ne veux pas te causer de problème ! s'écrie-t-elle finalement. Je suis venue m'excuser. Pour tout.

Mon attention captivée, je lui fais face, sourcils froncés, et l'incite à continuer d'un hochement de tête.

- Je... j'ai réfléchi à ce que tu m'as dit la dernière fois. Que je devais me respecter. Me trouver. Et au fond, je n'ai toujours pas compris qui je suis réellement. Mais j'y travaille, et si j'ai bien fini par comprendre une chose, c'est que je devais arrêter de vivre ma vie à travers mes actes pour attirer l'attention. Pour faire du mal aux autres. J'ai aussi compris que je te devais des excuses. Aussi bien pour ce qu'il s'est passé lors de notre relation que pour ce que j'ai manigancé avec Hugo.

Sidéré, je reste pétrifié plusieurs minutes sur place, à la fixer comme un miracle. Si j'avais du mal à croire que Lucy arriverait à se remettre en question, qu'elle vienne s'excuser était totalement inespéré. Je finis par réagir lorsque ses yeux s'emplissent de larmes.

- Vicky, dis quelque chose, je t'en prie.

- Je... suis content que tu arrives à tourner la page et que tu évolues.

Tellement que je ne la reprends même pas sur mon surnom. Son mascara dégouline le long de ses joues.

- J'essaie. Je te le promets. Mais c'est tellement difficile quand tout ce que j'ai jamais fait est du mal...

Un sentiment étrange s'incruste sous ma peau. Le comportement de Lucy me paraît bizarre. Presque surjoué. Mais devant moi se tient une nouvelle femme, qui a réussi à se remettre en question. Une femme qui devient forte. Je ne devrais pas la juger si rapidement. Je ne connais plus cette Lucy qui se dresse sur ses banales sneakers devant moi.

Lentement, elle s'approche, les bras entrouverts comme pour me demander mon accord. D'abord rétissant, je finis par céder. C'est probablement la dernière fois que je la verrai. Je peux au moins lui donner ça. Ce n'est pas comme si elle tentait de m'embrasser, cette fois.

Mes bras se referment autour de son buste et ma tête vient se poser sur son crâne alors qu'elle agrippe ma chemise comme si sa vie en dépendait.

- Je t'aime, murmure-t-elle contre ma chemise.

Et à ce moment-là, j'ai compris. J'ai compris que j'aurais dû savoir. C'était trop beau.

Et le sourire de mon ex veut tout dire.

Tout était programmé.

***

Anita.

J'écarte les pans de la tente sous laquelle j'ai vu Vic disparaître il y a une bonne demi-heure, pour se changer après la séance d'essais de ce vendredi. Dans mes mains, je tiens mon carnet de croquis, duquel je me suis servie pour immortaliser quelques scènes de course rapidement. Je ne voulais pas lui dire tout de suite pour garder la surprise, mais j'ai finalement accepté le contrat que l'on m'avait proposé pour représenter les pilotes après chaque course.