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Mockingbird - Eminem

Anita,
le lendemain,
Monza.

Les quelques rayons de lune qui filtrent par les stores de la chambre diffusent une faible lueur qui éclaire les draps. Il est quatre heures du matin, et je n'arrive pas à dormir. J'ai laissé Hugo s'amuser avec ses amis, ou plutôt oublier sa défaite, et je suis rentrée vers une heure. Seulement voilà, malgré la fatigue qui engourdissait mes membres dans la boîte, je ne parviens pas à trouver le sommeil.

« Tu es resplendissante ».

Ses mots ne me quittent plus. Ils me hantent, me narguent, et se rappellent à moi lorsque mes paupières s'alourdissent. Je suis vannée, et pourtant je n'arrive pas à m'arrêter d'y penser. J'en rêverais si Morphée venait à m'accueillir. Son regard... ses yeux sur moi étaient tellement intenses. Je sentais ma peau brûler sans même qu'il me touche. Mais avant tout, je suis heureuse d'avoir accompli mon but premier. Je me suis prouvé qu'avant d'accéder aux désirs des autres, je pouvais me faire plaisir à moi. Et j'adore cette coupe.

Elle n'a pas beaucoup plu à Hugo, cependant. J'ai bien vu qu'il se forçait lorsqu'il m'a souri à mon arrivée dans la chambre. Mais ses petites remarques voulaient tout dire. Il s'est un peu détendu quand il a vu que je faisais bonne impression en boîte. Je crois même qu'il était soulagé que je parte, pour éviter à avoir à me surveiller. Car oui, ma nouvelle assurance - partiellement de façade - a fait sensation. Même moi, je l'ai senti.

— Merde, grince la voix de mon petit ami dans le hall.

Si j'en crois le bruit qui s'ensuit et sa voix pâteuse, il a trop bu et a fini par s'empierger dans le meuble de l'entrée. Je ne me redresse pas. Je l'ai aidé bien assez de fois lorsqu'il était ivre, et je n'ai pas le courage de lui parler à nouveau, alors je fais mine de dormir profondément, largement renfoncée dans mon côté du lit. Je sais qu'il ne m'aurait pas touchée, mais je souhaite éliminer toute possibilité de contact physique. Il sent l'alcool. Même du lit, je le sais.

Il fait noir autour de moi. J'entends quelques bruits fugitifs, mais rien qui pourrait m'indiquer où je me trouve. Soudain, un puissant fracas retentit en écho contre les murs de l'entrepôt froid et humide, et je me mets à grelotter. De froid, de peur ? Qui sait ?

- Lenny ? C'est toi ? S'il-te-plaît, détache-moi. Je suis fatiguée.

Son rire, cynique, retentit dans mon oreille, me faisant sursauter. Il est fou. Et il le sait.

Je me redresse brutalement dans le lit, prenant une grande bouffée d'air au passage. J'ai l'impression de m'étouffer, ma gorge serrée ne laisse plus passer l'air. Rapidement, je me dépêtre des draps dans lesquels je suis enroulée et titube vers la salle de bain. L'eau froide sur mon visage finit de me réveiller, me faisant prendre pleinement conscience que rien de tout cela n'est réel. Un cauchemar. Mince. Encore tremblante, je m'assois sur le carrelage de la douche pour reprendre mon souffle calmement. L'eau qui a coulé a mouillé mes cheveux et mon haut, mais ce n'est pas grave. Il fait chaud, tout ça séchera. Dans la chambre, je ne détecte aucun mouvement. Mon petit ami est en train de cuver, il ne m'a même pas entendue me lever.

J'ai soudain très froid dans cette salle de bain, seule avec mes démons qui chuchotent encore au-dessus de ma tête. Je me redresse, prenant appuie sur la robinetterie. Arrivée près de ma valise, j'en extirpe un pull dont je n'aurai probablement pas besoin et sors sur le balcon. Comme je m'y attendais, il fait chaud. Même ici.

— Pssst.

Je baisse la tête vers le sol, où se dresse une silhouette familière dans l'obscurité. Je mets quelques secondes à la reconnaître, surprise de trouver Barth debout à une heure pareille. Il est toujours le premier à aller se coucher, d'habitude.

Speed ; VictorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant