Chapitre 22 (1/2)

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« Si nous sommes dans la joie, gardons-nous de porter nos pensées au-delà du présent. »


Horace

Son cœur battait pour un homme. Enfin, elle avait trouvé un être capable de l’émouvoir, comme son père et sa mère s’étaient trouvés. Songe ou pleine conscience ? Illusion ou réalité ?

Pia s’ébroua vivement, enfouissant sa tête sous un oreiller moelleux où ses pérégrinations ne parvinrent plus à l’assourdir. Quelle oiseuse introspection ! Fondamentalement, peu importait. Pourquoi chercher à comprendre ? Pourquoi entacher sa joie naissante ? Elle éprouvait un bonheur d’une rare intensité. En elle courait cette extase naïve et excessive qui conquérait chaque cœur épris. Elle ne voulait en rien dégrader cette émotion éclatante.

Aussi, sourire aux lèvres, la tête vidée, elle lévita jusqu’à sa cuisine, sur son petit nuage. Elle avait besoin d’un chocolat chaud. Surtout pas de thé, encore moins un café : imaginez si l’âpreté de la boisson parvenait à pourfendre cette douce bulle qui l’enveloppait !

Obnubilée par la concoction de sa mixture chocolatée; trois coups de sonnette furent nécessaires pour la sortir de sa rêverie.
Dani ? songea-t-elle en gagnant l’entrée à grandes enjambées. Aurait-il oublié quelque chose en partant une heure auparavant ? Les maigres espoirs érigés finirent réduits en poussière :

– Pia, si tu n’ouvres pas la porte dans les dix prochainessecondes, ce seront les pompiers qui s’en chargeront ! Et bien que je rafole de leurs lances, je ne tiens pas à les voir débarquer dans ton salon !

Craignant qu’il ne mette sa menace à exécution bien plus promptement que nécessaire – Élia idolâtrait les hommes en uniforme –, Pia fit tournoyer la clef dans la serrure.

– Bon sang ! geint-il en déboulant comme une tornade. Tu es bien vivante !

Elle adorait Élia, mais il avait tendance à se tracasser pour trois fois rien. L’expression de son caractère mère-poule, supposait-elle.

– Pioupiou, tu me refais un coup comme ça… jet’étripe !

– Éliminer la femme grâce à laquelle tu as un salaire,pas certaine que ce soit ton idée la plus lumineuse ! contrecarra-t-elle du tac au tac, de fringante humeur.

– Ah ah, très drôle ! Sérieusement, Pia, je t’ai laissé une dizaine de messages et tout autant d’appels depuis hier soir. Ça ne te ressemble pas, il s’est passé quelque chose ?

– Eh bien, Dani est passé et…

Finir son explication ? Plutôt rêver, l’esprit fallacieux d’Élia s’était déjà chargé de dresser un portrait erroné de sa soirée.

– Oh mon dieu !

– Non, non et non ! Je te connais, interromps ton imagination prolixe puisque tu vas être déçu, Élia. Il ne s’est absolument rien passé.

– Rien ? s’exclama-t-il, atterré.

– Rien.

– Mais il a dormi chez toi, non ?

– Oui, et ... ?

– Et il n’y a rien eu ?

– Non, rien. Pourquoi cela t’étonne-t-il tant ?

– Parce que si j’avais eu un tel Apollon dans mon lit, ilne serait pas resté vêtu bien longtemps !

Pia gloussa de la grivoiserie de son ami. Certes, Dani était très attirant. Et pas besoin d’être voyant pour le déclarer !

– Même pas un bisou ? lâcha-t-il finalement, la question lui brûlant les lèvres.

– Rien de plus que cela.

– C’est incompréhensible ! Qu’avez-vous bien pu vous dire pendant toute une nuit ?

– Rien.

En y songeant, ils n’avaient pas échangé le moindre mot : la parole s’était avérée superflue.

– Donc, en résumé : vous passez la nuit ensemble, vous ne couchez pas ensemble et vous n’échangez même pas deux malheureux commentaires sur la pluie et le beau temps… ?

Elle visualisa son compère, les sourcils froncés, les pupilles criant « à l’aide » et les lèvres pincées en une moue sceptique. En effet, elle était à des années-lumière des aventures abracadabrantesques qui étaient les siennes.

Pia allait à son rythme, se laissant porter ou voguant contre le courant, évoluant ou régressant dans le silence, mais ça lui convenait. On n'accomplissait pas un marathon en sprintant, ainsi elle ne souhaitait pas particulièrement que sa relation avec Dani prenne en vitesse. Les choses lui plaisaient telles qu’elles étaient, paisibles et tranquilles. Progressives.

– Exactement, pouffa-t-elle.

– Vous êtes… vraiment bizarre !

Il resurgissait, ce timbre de petit garçon moqueur.

– Enfin, je comprends mieux l’origine du lapin que tum’as posé ce matin.

Un lapin ? Ce matin ?

– Bon sang ! La répétition ! s’horrifia-t-elle.

D’un bon, Pia s’était redressée, frappée de clairvoyance.

– Tout juste, Auguste ; approuva-t-il en se faisant couler un café.

– Seigneur, je n’en reviens pas ! Ça m’était complètement sorti de la tête. Pardonne-moi, Élia.

Elle comprenait mieux l’excessive inquiétude de son agent. Pia n’avait jamais raté un seul entraînement de sa vie.

– Pas de panique. Le jour succède toujours à la nuit, lagravité demeure, les oiseaux chantent et les étoiles brillent… Bref : ce n’est pas la fin du monde. Et puis, je t’avoue que je n’avais pas trop la tête à t’entendre ce matin.

– Laisse-moi deviner… grosse soirée ? déduit-elle immédiatement.

– Soirée titanesque ; la corrigea-t-il.

Pia rit en ayant la certitude qu’il portait ses lunettes de soleil aux verres énormes. Elle les avait affectueusement renommées "les lunettes cuites".

– Je ne me souviens plus de grand-chose, mais j’aiaffolé bien des cœurs. Pour sûr !

Hilare, Pia se rappelait qu’Élia avait tenté de l’embrigader un nombre incalculable de fois dans ce genre de « fête », sans succès. Elle ne buvait pas, ne voyait pas et dansait avec la grâce d’un bambou. Dans un bar bondé, ce n’était qu’une question de seconde avant qu’elle ne s’égare, rentre dans un mur et atterrisse les fesses les premières au sol.

– Enfin ! Tu sais quoi ? Personne dans ce monde ne doute de tes talents, alors si l’on oubliait l’entraînement pour une fois ?

Pia était l’incarnation de la rigueur, aussi cette suggestion apparaissait totalement incongrue. Paradoxalement, elle avait soif d’un vent nouveau. Pourquoi ne pas le faire souffler en ce jour qui ne ressemblait à aucun autre ?

– Que proposes-tu ?

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Une petite idée de ce qui se passe dans la tête d'Elia ? ;)

Une petite idée de ce qui se passe dans la tête d'Elia ? ;)

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À vendredi !
Adriana Dreux ♡

𝐀𝐕𝐄𝐔𝐆𝐋𝐄𝐌𝐄𝐍𝐓 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant