Chapitre 38 (2/3)

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L'immobilisation de ses doigts gagna sa poitrine.

-Non.

-Que me vaut un refus si brutal ?

-Je ne sais pas... Et toi, aurais-tu une idée ?
-Si je te le demande, non.

-Retourne te coucher ; le gronda-t-elle, les sourcils froncés.

Elle s'était détournée du piano, l'affrontant bravement. Enfin, j'espère. Qu'est-ce qui lui certifiait qu'elle ne fixait pas un meuble ?

-C'est donc ça, tu es de mèche avec Leonardo !

-Si pour toi, lutter en faveur de ta santé en respectant de basiques prescriptions relève de la collaboration... Alors oui, je suis de mèche.

Inquiet, le praticien lui avait demandé de veiller sur Dani en son absence. Il le connaissait suffisamment bien pour savoir qu'il n'en ferait qu'à sa tête. Et il avait eu raison.

-Tu es têtue.

-Dit-il !

Sourire impossible à dissimuler.

-C'est plaisant, compléta-t-il d'une voix dégoulinante de suavité.

Elle rougit comme une sotte. Pia refusait de le laisser gagner aussi facilement.

-Dans ton cas, ça l'est beaucoup moins. Retourne te reposer ! bougonna-t-elle en se redressant, les poings sur les hanches.

Elle donnait l'image d'une mère exaspérée.

-Ça fait quatre jours que je suis alité et j'en ai...

-Je m'en moque ; le coupa-t-elle peu amène.

Le médecin a dit cinq jours minimum.
Il fallait la comprendre, Pia avait toutes les raisons du monde de se comporter comme une mégère acariâtre. Dani avait débarqué à l'article de la mort, on l'avait opéré en catimini à même la table du salon... Il lui sembla qu'être minutieuse vis-à-vis de son rétablissement fut la moindre des choses.

-Vous êtes dure en affaire, mademoiselle Parisi.

Elle ne se déridait pas. Il dut abdiquer... ou presque.

-Soit, je retournerai dans ma chambre sans faire d'histoire si, et seulement si, tu me laisses me joindre à toi dix minutes.

-Cinq !

-Six.

-Quatre.

-Vingt.

-Deux.

-Dix ?

-Va pour dix, concéda-t-elle finalement en songeant que cette stichomythie pourrait durer une éternité.

Il l'avait eu à l'usure. Cela ne l'étonnait guère : l'animal totem de Dani devait être l'acharné pitbull.

La pianiste retomba sur le fauteuil avec la lourdeur de la mauvaise perdante et lui alloua une place. Puis il y eut une latence. Un moment pendant lequel aucun des deux ne décocha le moindre mot. Ils n'étaient pas des individus loquaces. Pia s'exprimait à travers la musique, Dani grognait des onomatopées.

Mais l'équation : (-) + (-), formait : +. Le dialogue naquit.

-Tu comptes bouder encore longtemps ? Parce que dans ce cas, mes dix minutes n'ont aucune rentabilité ; piqua-til, malicieux.

Pia rosit adorablement, prise au dépourvue.

-Je ne boude pas !

-Oh ! et toi, comment appelles-tu cela : se tenir droite comme un piquet, la bouche scellée ?

𝐀𝐕𝐄𝐔𝐆𝐋𝐄𝐌𝐄𝐍𝐓 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant