Hellion High

CHAPITRE II

Les iris ambre d'Andreas me lorgnent avec un mélange de curiosité et d'indifférence. Un paradoxe qui a le don de me déstabiliser.

— Donna Tartt est réservé à l'élite de Hellion High ? Je n'étais pas au courant. Je réplique sur le même ton supérieur que lui.

Il reste de marbre face à ma réponse. Aucune émotion ne transparaît sur les traits de son visage. D'une immobilité semblable à celle des statues de dieux grecs.

— Je n'ai jamais sous-entendu cela. J'ai simplement émis le fait que venant de toi, c'était surprenant.

— Pourquoi ça ?

— Parce que je t'ai toujours prise pour une petite ignorante qui a pu accéder à Hellion High seulement grâce au fait que ses parents ont de l'argent.

Je reste bouche bée face à sa remarque cinglante. Il a dit cela avec une telle aisance que j'en demeure pantoise.

— Le simple fait que je lise ce genre de livre suffit à te faire changer d'avis ? Je demande sans pouvoir cacher la stupeur dans ma voix.

Andreas prend un air pensif, regardant par-dessus mon épaule avant de revenir à moi.

— Pas du tout. Mais disons que tu me parais moins insignifiante.

Je pousse un long soupir qui laisse entrevoir mon exaspération et rouvre l'ouvrage que j'ai dans les mains, une manière de mettre fin à cette conversation qui ne mène à rien.

Les mots défilent sous mes yeux mais impossible pour moi d'en comprendre le sens. D'une part, parce que mon esprit est complètement accaparé par le portrait peu mélioratif que m'a fait Andreas à mon propos. D'une autre, parce que je sens ses yeux peser lourdement sur moi.

Je relève la tête et constate qu'il m'observe avec une attention particulière.

— Je peux bien savoir ce que tu regardes comme ça ? Je demande, agacée.

Il ne cille pas une seule seconde, pas le moins du monde impacté par ma mauvaise humeur soudaine.

— Toi.

— J'avais cru comprendre, merci !

Avant qu'il n'est le temps de répliquer quoi que ce soit, des mains s'abattent sur mes épaules me faisant sursauter.

— Tu es prête ? On y va. M'annonce Octavia.

J'acquiesce et me lève, Andreas épiant chacun de mes gestes. Mon livre sous le bras, je contourne son fauteuil et quitte l'Austen Coffee, suivis de près par ma meilleure amie.

— Je rêve ou tu étais en grande conversation avec Andreas Wright ? Me dit-elle, perplexe.

— Joute verbale serait plus appropriée pour décrire notre bref échange.

Alors que Neil m'a toujours quelque peu effrayé, Andreas n'a cessé de m'agacer depuis notre première année au lycée.

Ce dernier est l'incarnation même de l'excellence. Pas une seule note en dessous de quatre vingt-dix-sept sur cent, félicité à chaque fin de trimestre par les professeurs et un savoir qui frôle la connaissance absolue. On pourrait presque croire qu'il donne à lui seul la réputation d'élite que détient le lycée. D'autant plus lorsque l'on sait qu'il descend de la famille fondatrice de Hellion High.

Je me suis toujours senti ridicule à côté de lui. C'est la raison pour laquelle je ressens une certaine amertume à son encontre. Il m'a ramené les pieds sur terre en me démontrant qu'il existait plus fort que moi. Mes projets pour Ambrosia, l'université la plus sélective de tout Londres, ont directement étaient remis en question. Chaque année, elle ne choisit qu'un seul élève de Hellion High. Ce qui me met en concurrence directe avec Andreas.