Une personne ne meurt que si on l'oubli !
A KENADSA , la ville houillère à la porte du sud de l'Algérie , au vieux Ksar, aux blanates , au pourigny , à la gare , ou même dans les nouveaux quartiers , je suis sûre qu’à une certaine époque , femmes , hommes et enfants ont connu cet homme . Les plus agés ne l'ont toujours pas oublié et se rappellent encore aujourd'hui des soins qu'il leur a prodigués à eux, ou jadis à leurs parents .
Je suppose aussi que les moins jeunes connaissent le dispensaire actuel sous le nom de “ Sbitar Abderrahmane el fermelli “ sans savoir exactement d'où vient ce nom . Les anciens peuvent les éclairer et leur fournir des témoignages surtout vécus .Cet homme est mon père. Bakhtaoui Abderrahmane dit ; “Abderrahmane el fermelli “
Car les siens , les vrais Kenadsiens ont l’ont toujours appelé “ Sbitar Abderrahmane et fermeli “ . Les fois où ils le prononcent restent une reconnaissance pour son dévouement et surtout un hommage pour sa mémoire .Mon père est né presumé en 1912 . Autodidacte dans
plusieurs domaines , il jouait entre autre de plusieurs instruments tel que le piano et la mandoline . Mais il avait une prédilection certaine pour le banjo . Il faisait parti du seul groupe musical de kenadsa des années 1950 et 1960 . Avec des musiciens de grand talent .
Monsieur Herlandez un musicien espagnol renommé leurs donnait des cours de solfège à lui ainsi qu' à ses amis .
Mais c'est la MEDECINE qu'il a choisi et qu'il a pratiqué avec passion et dévouement durant toute sa vie.
Très jeune , Monsieur Roux un médecin français l'a pris sous son aile et l'a formé et le 1et juillet 1929 il fut nommé comme infirmier au dispensaire de kenadsa qu'on appellait "dispensaire indigène" où il a suivi plusieurs formations . depuis ce temps Il a géré le dispensaire de kenadsa tout seul sans jamais se plaindre de la charge de travail qu'il faisait avec abnégation . Et cela pendant 49 années de travail acharné !
Bien plus tard son collègue est venu le soulager .
Le premier janvier 1944 il est nommé maître infirmier à Kenadsa dans les territoires du sud de l'Algérie. Par le gouverneur général de l'Algérie.Il a connu toutes les misères et les maladies des six années de la guerre mondiale de 1939-1945 et toutes ses horreurs . Les épidémies terribles et ravageuses comme la tuberculose et le typhus qui étaient répandues surtout dans les classes pauvres et ouvrières .
Il n'y avait pas de medecin en ce temps là . Une fois par semaine , un medecin militaire passait pour superviser son travail , compléter ses connaissances et sa formation par des conseils . Il a même dû être formé en medecine légale . Il devait assiter le medecin legiste à faire des autopsies en cas de mort suspecte ou tout simplement pour initier les futurs médecins légistes français .
De toutes ces horreurs que mon père devait affronter de plein fouet sans alternative, mon père en a tiré des connaissances du discernement et des bagages qu'il a mis au service de ses semblables .
Il cotoyait les malades de très près . Son travail ne consistait pas seulement au contact de ses patients au dispensaire , plus encore , après le travail il se rendait à leur chevet , chez eux . Ces derniers trop affaiblis ne pouvaient se déplacer .
Il se battait avec eux contre leur maladie . Il les accompagnait parfois même jusqu’à la mort. Lui même fut atteint de typhus en 1941 . Il s'en est sorti par la grace de Dieu .
Pour cela il a reçu la médaille d'honneur des épidémies .
Puis quelques temps après nommé chevalier d'honneur de la santé publique. Par le directeur de santé des territoires du sud .
Il en est encore de nos anciens qui se rappellent de ces années terribles . De leurs parents ou de leurs proches . Il suffit de les questionner , de les entendre et de les écouter .Puis vint la guerre de libération , son engagement revolutionnaire et ses actions à fournir secrètement les médicaments aux moujahidines lui a valu d’être emprisonné et torturé pendant une année entière d' avril 1958 au début du mois de mars 1959 au CTT puis à Ksar djedid .
Il s'en est sorti vivant mai hélas avec 9 côtés cassées sous la torture dont il a souffert longtemps après .
Encore une fois sa sagesse et son abnégation lui ont dicté une conduite désintéressée . Il a toujours refusé de demander ses droits d'ancien moujahid . “ Fissabil Allah “disait-il , “ je n'ai fait que mon devoir d’algérien”Son insertion dans la vie des kenadsiens qu'il considérait comme les siens n’était pas que professionnelle . “Abderrahman elfermili “ est connu pour sa bonté , son humanité et surtout son altruisme . Volontaire de jour comme de nuit . Il était à la fois medecin , pharmacien , secouriste , urgentiste , dentiste et même souvent psychologue . Aujourd'hui circulent encore certaines de ses anecdotes qu'il utilisait pour soigner les malades malgré eux .
Un jour une femme timide et réservée a refusé de se laisser faire une injection intramusculaire . Sans la forcer Il a soigneusement découpé un rond dans son “sarouel" juste de quoi lui faire la piqûre .
Il lui a surtout recommander de revenir avec le même sarouel pour les prochaines injections . Avec humour , tact et philosophie, il soignait les malades malgré eux . Des tas d'anecdotes comme celle-ci existent . Beaucoup d'entre les kenadsiens les connaissent ! Moi même je n’ai apris certaines qu'à travers eux .J'usqu'à sa mort le 30 juin 1978 , mon père fut un infirmier notoire de la ville de kenadsa . Après 49 ans de service . À l'àge de 66 ans , mon père , (qu’il repose en paix ) , pouvait enfin prétendre à la retraite .
Le destin et la mort ont décidé autrement . Car au terme de ses 49 ans de service et au même mois de juin 1978 où la décision de sa mise à la retraite a été signée . Il est décédé .
Oui le 30 juin 1978 ! Hélas , il n'a pu en profiter ne serait-ce qu'un jour !
en effet c'est au début de l’année 1978 qu'il a eu confirmation définitive de la maladie qui l'affaiblissait de plus en plus . les médecins lui conseillaient de se reposer pour préserver ses forces . Il n'en fera rien .En dépit de son état , il prendra en charge de consolider sa conscience professionnelle et d’affermir son abnégation en consultant les malades j'usqu'à sa dernière heure . Oui jusque dans son lit lorsque son état ne lui permettait pas de se déplacer à son travail . Les malades lui rendaient visite à la maison en sollicitant ses services .
5 jours avant sa mort , je garde un net souvenir de lui assis fouillant dans sa pharmacie de fortune qui n'était autre qu'un carton posé à côté de son lit . il finissait par remettre un ou deux petits plis contenant des comprimés ( en ces temps les medicaments existaient en vrac dans des contenants ) à son visiteur souffrant qui ne repartait jamais bredouille et surtout rassuré . C'est ainsi que mon père aura assumé son rôle jusqu’à son dernier jour .j'insiste sur le fait que , les siens , les vrais Kenadsiens appellent ce dispensaire “ Sbitar Abderrahmane el fermeli “ . Merci à eux pour ce symbole de gratitude et de reconnaissance .
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Billets D'évasion
RandomDans ce recueil intitulé "Billets d'évasion", je vous invite à un voyage intérieur où chaque texte représente une exploration personnelle profonde . À travers ces pages , je cherche à capturer l'essence de l'écriture comme un cri silencieux , où cha...