6. pleine lune - février 2021

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Chaque matin, en buvant son thé, Sofia fait une liste des défauts de Max. C'est un rituel qui lui permet de conditionner la journée à venir. Elle énumère tout ce qu'elle déteste, comme son sale caractère et son arrogance, mais aussi tout ce qui fait du Néerlandais un privilégié qui s'ignore: son enfance heureuse et sa fortune familiale. Elle repense aussi à la description que Mattia Binotto faisait du pilote: un enfant gâté devant qui toutes les portes s'ouvrent. Elle jalouse son compte en banque et sa célébrité. Elle a visionné des dizaines de fois cette vidéo de lui en train d'agresser un autre pilote après le Grand Prix du Brésil en 2018. Elle s'est également plongée dans le passé de Jos Verstappen pour découvrir avec horreur ce qu'il a fait subir aux femmes qui ont partagé sa vie. Elle prend le temps de façonner sa haine. Il faut qu'elle soit solide et affutée pour que la jeune femme ne perde pas son objectif des yeux.

Car Sofia se sent faiblir. Elle doit admettre que Max la surprend. Il ne ressemble en rien à ce que Mattia lui a décrit. Si elle excepte ce petit air suffisant qu'il affiche en permanence, elle le trouve calme, intelligent et étrangement agréable. Ses yeux d'un bleu profond lui compliquent la tâche. Quand il les plonge dans les siens, elle a toutes les peines du monde à rester insensible. Car elle se sait attirée par le Néerlandais. Elle a peur qu'il réussisse à l'attendrir. Pour toutes ces raisons, Sofia ne cesse de se répéter: Max n'est pas quelqu'un de bien.

Jusqu'à maintenant, c'est elle qui a été la plus entreprenante. Elle a planifié leur première rencontre dans le parking, la sortie en boîte de nuit et le rendez-vous avec Natacha. Il est temps de lui laisser rênes. Du moins en apparence. Elle va lui donner l'occasion de se muer en héros le temps d'une soirée, histoire de nourrir son égo de mâle alpha.

Face à son miroir, Sofia s'entraîne à pleurer sur commande. Elle repense à tout ce qu'elle a vécu ces dernières années: à ses parents absents, à la faim qui faisait rugir son ventre alors qu'elle n'était qu'une enfant, à ces enseignants qui n'ont jamais cru en elle et surtout à tous ces hommes qui profité d'elle et de sa naïveté. L'exercice est efficace. En quelques secondes, les premières larmes font leur apparition. L'Italienne laisse le mascara salir ses joues.

Elle quitte son appartement à la hâte. Il est déjà vingt-deux heures. Max devrait bientôt rentrer de son dîner avec son ami Daniel Ricciardo. Il n'est pas du genre à jouer les prolongations un soir de semaine. Comme tout athlète qui se respecte, il a pour habitude d'aller se coucher tôt.

Sofia emprunte l'ascenseur. Elle craint d'être en retard. Le visage parcouru de larmes, elle débarque dans le souterrain en reniflant. Elle n'a pas fait deux mètres qu'elle tombe nez à nez avec Max qui vient de quitter sa voiture. Elle en sursaute. Il est en avance. Surprise, la jeune femme n'en oublie pas de jouer la comédie. Elle se dérobe en fixant son regard larmoyant sur le sol pour s'avancer vers sa McLaren. Alors qu'elle pose sa main sur la poignée de la porte, la voix du Néerlandais retentit:

- Qu'est-ce que tu as?

Sofia se fige. Elle ferme ses paupières pour que ses yeux restent humides. Puis elle se retourne en affichant un sourire triste. Elle balaie l'air d'un geste de la main pour signifier qu'il n'a pas à s'en faire. Inquiet, Max s'avance jusqu'à lui faire face. Il pose sa main sous le menton de la jeune femme pour l'obliger à relever la tête. En sentant ses doigts sur sa peau, Sofia frémit. Elle détourne une nouvelle fois le regard. Elle se décale pour tenter une nouvelle fois d'ouvrir sa voiture. Max l'en empêche en poussant la porte du genou:

- Tu ne peux pas conduire dans cet état.

- J'ai besoin de rouler un peu. Et de me vider la tête.

- Je comprends. Mais laisse-moi prendre le volant.

Mission Ferrari // Max VerstappenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant