Mission Ferrari // Max Verstappen

11. Emma - mars 2022

L'hymne des Pays-Bas retentit. Une toute petite semaine et tout bascule. Ce n'est plus Charles qui se tient sur la plus haute marche du podium. Max a pris sa place. Souriant, le Néerlandais savoure sa victoire au Grand Prix d'Arabie Saoudite. Elle est encore meilleure, sachant qu'il a passé le Monégasque à seulement quatre tours de la fin. Il jette quelques regards amusés à sa droite pour provoquer un peu plus encore le pilote Ferrari. Le duel que tout le monde annonçait a bel et bien commencé. Max contre Charles. Charles contre Max. Deux courses et déjà, les deux hommes font l'étalage de tout leur talent, se rendant coup pour coup, aussi bien sur la piste que dans la vie.

Max a décidé de marquer le coup. Il invite tous ses proches à festoyer. Le destin veut que son père soit présent, lui qui n'assiste plus à toutes ses courses, mais qui a eu la bonne idée de venir à Djeddah. Le groupe d'intimes se retrouve dans un restaurant chic de la ville, le genre d'endroit tape-à-l'œil que les pilotes de Formule 1 fréquentent. Max est reçu comme un roi. Pour lui, on a mis les petits plats dans les grands. Une somptueuse salle - alliant modernité et sobriété - a été privatisée pour l'occasion. Jos, Christian, Helmut, Checo, Daniel et Lando sont notamment de la partie. À ces personnalités s'ajoutent quelques petites mains de Red Bull. Des hommes et des femmes à qui Max doit énormément. Et puis, il y a Emma. La Française est assise à côté du Néerlandais. Elle est si fière d'être sa compagne qu'elle lévite de bonheur. Sa présence intrigue. Plus loin, au bout de la table, les intrus de McLaren font les commères. Daniel et Lando n'ont toujours pas compris pourquoi Max s'était mis en couple. Ils en parlent à voix basse:

- Il déraille complètement...

- La semaine passée, il était à deux doigts d'aller enfin parler à Sofia. Sept jours plus tard, il est là à faire le beau à côté de sa copine. J'y comprends plus rien, Lando.

- Si tu veux mon avis, il fait de son mieux pour oublier. C'est pour ça qu'il s'est mis avec Emma.

- Excuse-moi d'être un connard, mais comment est-ce qu'Emma pourrait éclipser Sofia?

- Bah... elle est super jolie.

- Je ne dis pas le contraire, mais c'est la fille la plus gnangnan que je connaisse. Quand je pilotais encore pour Red Bull, elle était déjà là avec son sourire niais. Chaque fois qu'elle l'ouvre, je suis obligé de bailler.

- Et le pire Daniel, c'est que c'est nous qui l'avons poussé dans ses bras.

- On est vraiment des cons des fois...

Jos ignore tout de leur discussion, mais s'il était assis à côté des deux pilotes, il partagerait leur avis tranché. C'est la première fois qu'il voit Emma. Et rien chez cette fille ne l'inspire. Elle est fade. Une espèce de labrador servile qui rigole un peu trop fort et dont la voix stridente fatigue. Ça ne ressemble pas à son fils tout ça. Max a toujours aimé les femmes de caractère. Celles qui savent se montrer discrète, mais qui haussent le ton quand il le faut. Les femmes intelligentes, drôles, fières, pleine d'esprit et qui n'ont peur de rien. Comme Sofia. Emma ne tient pas la comparaison. Elle ne sert qu'à sourire et à écouter religieusement tout qui sort de la bouche de Max. Jos a bien essayé de faire la conversation, mais la Française n'a aucun répondant. Il se dit qu'il doit sûrement s'agir une déformation professionnelle. À force de faire des courbettes devant les personnalités que Red Bull accueille dans ses garages, elle a dû prendre le pli.

Jos n'attend pas d'avoir mangé son dessert pour se retirer et aller s'installer sur le patio. Assis face à la Mer rouge, il s'allume un cigare. Un serveur lui amène un cognac. Exactement le genre de fin de soirée qu'il apprécie. Le cinquantenaire ne se prend plus la tête. L'effervescence de la Formule 1, les paddocks, les courses sous haute tension, les journalistes toujours plus intrusifs, tout ça... il a déjà donné. Depuis que son fils a remporté son premier titre de champion du monde, il est plus serein. Il le laisse voler de ses propres ailes. De toute manière, il le sait, il n'a plus rien à lui apprendre. L'élève a dépassé le maître.