Chapitre 32

193 17 20
                                    

▪ Alec ▪

Le temps s'arrête pendant quelques heures. Un moment si paisible ne peut être que de bon augure. Magnus a fermé ses yeux quelques dizaines de minutes, après notre fabuleuse union charnelle. Quel dommage qu'il ne se voie pas comme je le vois. Il n'a pas une once de graisse et sa musculature est si magnifique. J'ai peine à croire que je me suis voilé la face. Tous les indices qu'il laissait derrière lui et que j'ai interprétés autrement. Maintenant que j'ai quelques cartes en main, je dois aller voir son jeu, pour m'assurer qu'il ne tente pas de me cacher autre chose.

Je jette un œil à mon téléphone et m'étonne qu'il soit déjà si tard. Peut-être ai-je moi aussi dormi. Ça ne serait pas étonnant. Les bras de Magnus sont faits pour y dormir. Un soupir de contentement traverse mes lèvres et je penche la tête pour embrasser sa chevelure très en désordre. Un tout petit rire m'échappe. Lui qui est toujours tiré à quatre épingles, il lui faudra du temps pour aboutir à un résultat de coiffure qui satisfera ses standards. En attendant, je profite du moment et ne me gêne surtout pas pour glisser mes doigts au travers de ses cheveux soyeux à l'odeur si caractéristique de bois de santal. J'hume son parfum comme un idiot, incapable d'arrêter de le sentir.

— Tu veux peut-être utiliser mon shampooing, marmonne mon amant en se replaçant un peu plus confortablement, sa jambe se replie un peu plus et passe par-dessus ma propre jambe.

— Nope ! Je l'aime trop sur toi. Je préfère que tu en sois le seul utilisateur. Comme ça, j'aurais de bonnes raisons pour me coller à toi. Quel serait le plaisir si je ne distinguais plus ton odeur ?

— Plaisir ?

— Oh oui ! Plaisir coupable, mon coeur. Je m'enivre de toi. Je deviens un véritable junky de ta personne.

— N'exagère pas, je ne suis pas parfait, loin de là.

— Je le sais.

Aussitôt que mes paroles s'échappent, aussitôt Magnus se crispe. Quel maladroit je fais !

— Je ne parlais pas de ton corps, mon amour. Même si tu en doutes, je t'assure que je pourrais passer notre séjour sous la couette à l'embrasser, le cajoler et l'utiliser pour mon plus grand plaisir. Je parlais plutôt de ta piètre performance avec ton jardin. Cela fait des semaines que j'ai tout remis en place et, pourtant, j'ai l'impression que tu le négliges.

— Bien sûr que je le néglige. As-tu déjà vu à quoi tu ressembles lorsque le soleil plombe sur ton torse luisant de sueur ? J'oublie tout ce qui se trouve à proximité.

— En parlant de corps... Te sens-tu capable de me parler un peu plus de ta maladie ? Je sais que tu en souffres mais, pour t'aider, j'aurais besoin que tu élabores un peu. Je sais que le déclencheur vient de tes parents. Ils n'étaient pas heureux ? Te battaient-il ? questionné-je un peu trop vite.

J'attends sa réponse avec beaucoup d'appréhension. Et si j'ai raison ? Ne suis-je pas justement en train de le faire replonger ?

— Ils étaient juste de très mauvais parents. Jamais de compliments, toujours la critique facile, surtout quand il s'agissait de la danse. J'ai eu un passage difficile entre mon départ de la maison et mon arrivée à Juilliard. Une fois là-bas, ça s'est calmé un moment et j'ai même cru que c'était terminé parce que j'étais heureux d'enfin y être. Mais entre la pression et les commentaires des autres étudiants, des professeurs... J'essayais de suivre leurs conseils au mieux pour maintenir mon poids malgré les pulsions qui me reprenaient.

— Alors tu te fais vomir depuis aussi longtemps, m'étonné-je que sa santé ne soit pas plus précaire.

— Non ! Un ami m'a obligé à voir un spécialiste. Il avait peur pour moi, ça l'inquiétait beaucoup, alors j'ai fini par l'écouter. Le docteur Carstairs a été mon thérapeute pendant trois longues années. Il m'a été d'une grande aide. Lorsque j'ai définitivement intégré la troupe de Broadway, les envieux étaient au rendez-vous, mais les trucs de mon psy m'ont aidé à passer par-dessus leurs petites crises de jalousie. Ce n'est que depuis un an environ que tout a recommencé. Mon metteur en scène était un pur emmerdeur, rien n'était jamais assez bon, à ses yeux. Alors petit à petit, j'ai recommencé à me gaver en cachette. Camille, ma petite amie, était aussi ma partenaire sur scène. Quand elle m'a surpris, elle ne s'est pas privée pour faire comme mes parents. Au lieu de vouloir m'aider comme tu le fais, elle me criait des insultes, m'humiliait aussi à chaque fois qu'elle me surprenait. Et ça ne faisait qu'aggraver les choses...

Du baume au cœur (Malec AU)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant