Chapitre 29

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▪ Magnus ▪

Imasu est mon plus vieil ami et le seul lien que j'ai encore avec Chicago. Nous sommes proches, nous l'avons toujours été même lorsque nous vivions loin l'un de l'autre. Il sait presque tout de moi. Presque, parce que comment aurais-je pu avouer à quelqu'un d'aussi parfait que lui à quel point j'étais faible et complexé ? Il n'a jamais rien su de mes troubles et il ne le saura jamais. Il ne comprendrait pas.

Pendant que nous descendons au garage, je glisse ma main contre celle d'Alexander mais il la retire pour attraper son téléphone. J'essaie de ne pas m'inquiéter et nous suivons Imasu en arrivant au parking. C'est le seul en qui je pouvais avoir confiance pour la garder en mon absence, il n'est pas passionné d'automobiles comme je le suis mais il aime les belles choses, et encore plus les choses qui ont de la valeur.

Je l'aide à retirer la bâche qui couvre mon trésor et je sens mon cœur s'affoler comme la première fois où je l'ai vue pour de vrai. Je passe ma main sur la carrosserie intacte et froide. Ça fait une éternité que je ne l'ai pas conduite et j'ai hâte de pouvoir le refaire, même si ça va devoir attendre quelques jours.

— Vous restez longtemps ? me demande mon ami.

— Trois ou quatre jours. Je t'appellerai quand on partira.

— Et tu disparaîtras à nouveau. Pour toujours peut-être !

— Ce que tu peux être mélodramatique, lui rétorqué-je en riant. Rien ne t'empêche de venir me rendre visite.

— J'y penserai. Alors, Alexander, que penses-tu du trésor le plus précieux qu'il possède ?

Relevant la tête vers mon petit ami, je réalise qu'il nous prête à peine attention et une boule se forme dans mon ventre. Il regarde vaguement la voiture et hoche la tête sans dire le moindre mot. Je n'ai pourtant pas rêvé, il était enthousiaste à l'idée de la voir. Peut-être pas autant que moi, mais je ne lui ai pas forcé la main, si ?

Imasu, égal à lui-même, continue de parler et, après un quart d'heure, il nous invite à boire un verre. Mal à l'aise, je refuse en prétextant que je suis fatigué à cause du voyage. Il m'enlace longuement dans le hall de l'immeuble et nous rentrons.

— Sayan, quelque chose ne va pas ? demandé-je quand on se retrouve seuls, dehors.

Il m'ignore et met les mains dans ses poches. Le trajet se termine en silence, mes pensées s'envolent dans ma tête. Je savais que c'était une mauvaise idée de lui montrer ce foutu album, je n'avais pas envie qu'il voie à quoi je ressemblais quand j'étais adolescent. Je ne suis pas surpris qu'Imasu ait gardé ces photos, il est magnifique, il l'a toujours été. Comme moi, déjà à cet âge, il savait ce qu'il voulait être. C'était, certes, plus évident pour lui. Mon père me répétait sans cesse que j'étais trop gros pour être danseur, que ma professeur me laissait assister aux cours uniquement pour l'argent et qu'elle ne pouvait décemment pas croire en mon talent.

Mon ventre se tord davantage. Machinalement, je serre les dents pour contenir mon envie de manger. Je me force à me calmer, bien sûr que j'ai envie de manger, il est tard et nous n'avons pas dîner. Ce n'est rien, rien de plus qu'un besoin vital, pas... pas une compulsion.

La porte de notre chambre se referme derrière moi, j'ai à peine remarqué que nous étions rentrés. Mon regard se pose aussitôt sur mon petit ami, dans l'espoir de le voir se calmer mais il jette sa veste sur le canapé. Cette fois, je sens qu'il est énervé et je suis de plus en plus perdu. Est-ce qu'il m'en veut pour lui avoir caché ce à quoi je ressemblais quand j'étais jeune ? Je le dégoûte peut-être maintenant qu'il a vu... ça.

N'y tenant plus, je m'approche de lui pour lui demander une nouvelle fois ce qui ne va pas. Ma voix tremble et mon angoisse monte d'un cran quand il se tourne enfin vers moi.

Du baume au cœur (Malec AU)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant