Chapitre 23

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▪ Alec ▪

Cette soirée est encore pire que la précédente. Je dois encore supporter la voix suraiguë de Lydia qui ne cesse de mettre la main sur mon épaule et même sur ma cuisse. Je l'ai repoussée au moins trois fois depuis que Romi et Magnus sont partis au bar. J'ai le goût de partir à l'autre bout du monde et ne plus jamais remettre les pieds en Virginie.

Mon bel asiatique semble hypnotisé par cette superbe femme qui n'a que des qualités. Elle est tout le contraire de Lydia et c'est bien ce qui me dévaste autant. Magnus est passé à autre chose et me le fait cher payer. De loin, je les vois se parler à l'oreille et qui flirtent sans vergogne devant nous. Que puis-je faire, si ce n'est me résigner à ce spectacle qui me serre le cœur.

Je ne suis pas prêt à faire mon coming out ! Pourquoi Magnus me fait ça alors que je l'avais prévenu ? Plus je les regarde et plus je me sens vider de toute sensation, excepté une : la jalousie.

Moi qui croyais avoir expérimenté le pire avec la mort de Max, ce n'était rien en comparaison. Je ne dis pas que c'était facile, seulement, maintenant, j'ai la sensation d'une fêlure encore plus puissante. Magnus n'est pas mort, c'est notre amour qui l'est et ça, j'ai beaucoup de mal à l'encaisser.

Au quatrième toucher de Lydia, je me lève subitement, incapable d'en supporter davantage.

— Je vais prendre l'air, ne m'attendez pas pour manger. Je ne me sens pas très bien.

— Tu veux que je t'accompagne ?

— SURTOUT PAS ! Je ne veux pas ruiner votre soirée. Tu peux dire à Magnus que je vais l'attendre dans la voiture ?

— Laisse tomber Magnus, il va probablement finir dans le lit de Romi. Tu ne trouves pas qu'ils se complètent bien ? Manucure et gardien d'enfants, ils sont parfaits.

— Putain Lydia ! Tu te rends compte de ce que tu fais au moins ?

— Oui, j'ai fait les cupidons pour des âmes vagabondes. Je suis géniale, répond-elle dans un rire qui aurait pu sembler mignon si elle n'était pas aussi irrespectueuse.

— Tu n'as vraiment aucune idée ! Pourquoi cela me surprend-il autant ? Les politiciens ne voient pas plus loin que le bout de leur nez. Tout ce qui les intéresse, c'est le pouvoir. Et si, comme Romi ou Magnus, ils divergent du bon petit américain blanc et dans le rang, ils tombent dans la case « rien à cirer ».

Je fouille dans mon portefeuille et en sors une carte de crédit que je sais déjà bien remplie. Je la jette d'un geste brusque sur la table. C'est à ce moment que Magnus et Romi reviennent et me voient me retourner en secouant mon bras pour me déprendre de Lydia.

— Prenez ce qui vous tente. De toute façon, je vais devoir étaler les paiements sur plusieurs mois. Ce n'est pas un repas à cent dollars le couvert qui fera la différence.

Je déguerpis sans un regard en arrière. De toute manière, j'en serais incapable. Mes larmes embrouillent déjà mes yeux et mes mains tremblent de honte face à mon manque de retenue. Je me précipite vers la voiture et m'assieds sur le siège passager. Je n'ai pas les idées claires avec tout ce whisky que j'ai pris pour oublier les grands coups de flirt de Magnus. Je prends ma tête entre mes mains et laisse la digue se briser enfin. Je ne peux plus rien retenir. J'ai mal ! J'ai si mal ! À mon torrent de larmes s'ajoutent de légers frissons qui parcourent mes épaules fatiguées à force d'être restées crispées ces dernières vingt minutes.

Je n'ai aucune idée du temps qui passe avant que je perçoive enfin des voix près de ma voiture. La porte du côté conducteur s'ouvre et la silhouette de mon prof préféré se glisse derrière le volant. Il ne me regarde pas tout de suite, mais il ne met pas la voiture en route non plus. Peut-être vient-il m'avertir qu'il s'en retourne avec Romi. Mes yeux restent longtemps à fixer un caillou qui est coincé entre deux interstices du tapis. Voyant qu'il ne parlera pas sans qu'il n'ait mon attention, je me retourne vers lui en essuyant mes larmes. Je suis pathétique, mais je n'y peux rien. Cet homme-là, je me rends compte que je l'aime. Et ça fait d'autant plus mal de savoir que ça ne sera jamais réciproque.

Du baume au cœur (Malec AU)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant