Chapitre 44

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▪ Magnus ▪

Maryse est restée un moment et j'ai pu remarquer qu'elle faisait des efforts pour ne pas mentionner son époux, ce qui lui a coûté sans doute, compte tenu de l'expression de son visage quand elle changeait de sujet. Au moment de partir, elle m'a invité à passer le réveillon de Noël avec eux et mes pensées se sont brusquement agitées. Je ne m'y attendais pas vraiment.

— J'y réfléchirai, ai-je répondu avec un sourire.

Elle a hoché la tête, câliné une dernière fois Anna, puis est partie.

Je suis assis sur le banc du jardin, enroulé dans un plaid à cause de la température et, maintenant que je suis seul, je ne peux empêcher mon esprit de tourner. L'énergie d'Anna m'a permis de ne pas me perdre dans mes pensées mais, puisque mon petit ami est avec elle pour la coucher, je n'ai plus rien pour détourner mon attention de mes souvenirs et de mes angoisses.

Si je n'ai que vaguement grignoté au petit-déjeuner, je me suis tout de même forcé à manger correctement au déjeuner et au dîner pour qu'Anna ne pose pas de question. Et cela me pèse. Littéralement. Je me sens mal et mes songes de la nuit ne m'aident pas du tout. Je serre les poings pour ne pas voir mes doigts trembler puis monte mes jambes sur le banc afin de ne pas être tenté de rentrer chez moi pour me faire vomir. Je ne peux pas continuer comme ça. J'aimerais passer plus de journées comme ça avec eux mais, si mon état ne s'améliore pas, je vais finir par faire une crise de boulimie devant Anna ou elle m'entendra vomir. Cela arrivera forcément à un moment ou à un autre et l'idée même me donne envie de m'enterrer. Je crains qu'elle s'imagine que c'est normal, que contrôler son poids de cette manière est acceptable.

Des mains se posent sur mes épaules et je sursaute violemment avant d'entendre le rire d'Alexander. Haletant, je lève la tête vers lui.

— Excuse-moi, articule-t-il. Je voulais pas te faire peur.

Il se mord la lèvre pour contrôler son hilarité, il faut croire que j'étais vraiment perdu dans mes pensées. Il vient s'asseoir à côté de moi et je passe le plaid autour de ses épaules pour pouvoir me rapprocher un peu plus de lui.

— Ça ne se passe pas bien avec le docteur Wells, dis-je de but en blanc. Je t'ai menti, encore...

— Comment ça « ça ne se passe pas bien » ? Pourquoi tu le vois régulièrement si ça ne te convient pas ?

— Je ne l'ai vu que deux fois, avoué-je tout bas.

Alexander fronce les sourcils et détourne la tête pour encaisser le nombre de mes mensonges. Je lui ai dit que je voyais Wells deux fois par semaine, et cela depuis plus d'un mois. Je l'avoue, j'ai profité du fait qu'il n'ose pas me poser de question.

— Tu as dit que tu voulais aller mieux, souffle-t-il, perdu. Et que tu n'y arriverais pas si tu ne te fais pas aider.

— Je le sais, je suis désolé de t'avoir menti...

— Mais ce n'est pas le problème ! Je m'inquiète pour toi... Hier tu as dit que tu lui parlerais de ce qui s'est passé, mais tu ne le pensais pas, n'est-ce pas ?

— Si ! Sur le moment, je le pensais...

— Mais tu ne vas pas le faire.

J'ouvre la bouche mais la referme sans rien dire parce que je ne sais pas si je dois nier ou lui donner raison. Sans les rêves que j'ai fait cette nuit, cela aurait été plus clair. Je reste silencieux un moment, réfléchissant aux images qui ont pollué mon sommeil, aux phrases qui se sont ancrées dans mon esprit et qui ont trop l'air d'être des souvenirs, pas juste le fruit de mes angoisses.

Du baume au cœur (Malec AU)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant