Chapitre 48

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▪ Magnus ▪

Je ne m'attendais pas à ce que les premiers jours de l'année soient si difficiles. J'ai toujours accueilli les nouvelles années avec enthousiasme, me concentrant sur les défis qu'elles annonçaient. C'était si exaltant de voir ma passion m'emmener toujours plus loin, dans de nouvelles villes, de nouveaux pays, de nouveaux spectacles. J'ai pris conscience – grâce au docteur Wells – que je me suis accroché à la danse comme à une bouée de sauvetage pour ne pas me laisser entraîner vers le fond par ma maladie et ce qui l'a causée. Je me suis plongé dans ma passion pour n'avoir le temps de penser à rien d'autre.

À présent que j'ai franchi une nouvelle étape de ma vie, tout est plus calme et j'ai le temps de penser. J'ai même encore plus de temps que prévu puisque Robert n'a, sans surprise, par réussi à faire changer d'avis le conseil. La décision n'a pas encore été annoncée aux élèves et à leur famille, elle le sera sûrement au cours de la semaine puisque les cours de danse reprennent bientôt.

Enfin, je n'ai pas seulement « plus » de temps, j'en ai beaucoup trop. Anna a repris l'école ce matin, Alec est au travail, Wells a annulé notre rendez-vous et je viens de passer trois heures à courir pour perdre les kilos que j'ai pris pendant les fêtes, alors que j'ai déjà couru deux heures ce matin. Je sais que ce n'est qu'un changement de comportement compensatoire mais j'essaie de voir comme un mieux le fait que je ne me suis pas fait vomir depuis plus de deux semaines. Malheureusement, la course est moins efficace sur mes angoisses et je ne suis pas sûr que la fatigue parvienne à me calmer. Le chemin vers ma guérison s'annonce long et périlleux, encore pire que la première fois.

Alors que je rentre chez moi d'un pas mesuré, mon téléphone sonne pour m'annoncer un appel de Tessa. Je décroche et elle s'exclame aussitôt.

— Tu peux m'expliquer ce qui se passe dans cette ville de fous ?

— Ah, tu es enfin rentrée.

Tessa a passé les fêtes avec un ami et est partie avant même que Robert ne fasse un scandale en pleine rue. Bien sûr que je ne lui ai pas dit ce qui se passait et, apparemment, je ne suis pas le seul à m'être dit que ce n'était pas une bonne idée de parler de ce genre de chose alors qu'elle n'était même pas là.

— Je viens de croiser Victor qui m'a demandé si je pouvais assurer les cours de danse le temps qu'ils trouvent une remplaçante ! Ils ont osé te renvoyer ? Pourquoi ?

— Oui, ils l'ont fait avant Noël. Officiellement, les cours que je propose aux adultes sont trop débauchés. Officieusement, je crois qu'ils n'acceptent pas mon orientation sexuelle.

— Oh chéri... Sérieusement ? Quelle bande de vieux bigots ! Et dire que je n'étais pas là pour toi, que s'est-il passé ?

Après un léger soupir, je lui raconte l'incident dans les grandes lignes et en profite pour lui dire que je suis en couple avec Alexander. Ce qu'elle accueille – je n'en doutais pas – avec une joie non-dissimulée.

— Ça fait combien de temps que vous êtes ensemble ? Je n'avais rien vu, je deviens vraiment étourdie...

— Quelques mois et c'est normal que tu n'aies rien vu, on ne voulait pas s'afficher parce qu'il n'avait pas fait son coming out et... en fait, moi non plus.

— Et qu'est-ce qu'il en dit, Alec, de la décision du conseil ?

— Je ne lui en ai pas encore parlé, avoué-je, mal à l'aise. À cause de ce qu'a fait Robert, il y a beaucoup de tensions et je n'ai pas voulu en rajouter.

— Je pense qu'il va se rendre compte que ce n'est pas toi qui donnes des cours à sa fille samedi, tu sais ?

— Oui, je sais... Mais je n'ai pas trouvé le bon moment, ni comment lui dire... J'ai vraiment pas envie d'empirer les choses ! Encore !

Du baume au cœur (Malec AU)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant