Chapitre 8

254 22 22
                                    


"I know I've done wrong, and I paid for it

It's your time to talk, and I'm listening

Say that you don't want me
Say that you don't need me
Tell me I'm the fool"


Je restais un moment les yeux clos, immobile, comme si ça pouvait le faire disparaître. Mais il m'appela à nouveau.

- Louis ?

Non, non, non.

-Qu'est-ce que tu fous ici ?

Le cœur battant à tout rompre, j'ouvris les yeux pour le détailler des pieds à la tête. Il avait deux sacs de courses entre les mains, et portait ses anciennes fringues un peu trop justes pour lui maintenant. Il inclina la tête. Le silence nous enveloppa, lourd sur nos poitrines. Je ne pouvais pas lui donner d'explications, moi-même je n'en avais pas. Il le vit dans ma posture, parce qu'il leva les yeux au ciel avant de s'avancer dans son allée.

- Allez, entre, ordonna-t-il.

Que pouvais-je bien faire ? J'étais dans ma ville natale, sans argent, sans vêtement décent, et avec l'impression persistante et désagréable de n'avoir plus d'air. Je me relevais avec le peu de dignité qu'il me restait, c'est à dire presque aucune, et j'époussetais mon jogging avant de baisser la tête. Harry ne me regarda plus à partir de ce moment-là. Il poussa simplement la porte, entrant dans ce qui devait être chez lui à présent. Forcément, si Lavinia n'était plus là, c'est lui qui devait avoir investi les lieux après sa sortie.

Il posa ses courses sur la table, toujours en m'ignorant. Caleb devait être dans sa chambre, et moi, j'étais coincé avec son cousin qui était devenu soudainement muet. Pourquoi m'ordonner de rentrer si c'était pour faire comme si je n'existais pas ensuite ? Trop d'années étaient passées, je ne le décryptais plus aussi bien qu'avant.

J'analysais rapidement la pièce en restant dans l'embrasure, essayant de voir ce qui avait changé. L'atmosphère, sûrement. Il n'y avait plus cette chaleur caractéristique, celle qui me donnait envie de rester et d'y vivre pour toujours, comme avant. Tout simplement parce qu'elle émanait de Lavinia elle-même et non du foyer en question. Aujourd'hui ce n'était plus qu'une bicoque habitée par deux jeunes hommes. Et ça se ressentait.

Harry rangeait ses courses une à une, toujours silencieux, et je me raclais la gorge, mal à l'aise.

- Alors tu habites ici ?

Il fallait meubler, tout plutôt que de ne pas me sentir à ma place.

- Ouais. J'habite ici, répondit-il toujours sans me regarder.

- Et c'est bien ?

- Ouais.

Bon. Je n'avais plus qu'à aller me pendre en espérant qu'il ait une réaction. Je sentais qu'il attendait quelque chose de moi, mais comme avant, j'allais devoir me creuser les méninges, parce que je n'aurais ni son aide ni son soutien pour trouver. Je soupirais doucement, les bras ballants, et les yeux vissés sur mes chaussures.

- Tu... Tu as dit que ce n'était pas toi ? demandais-je finalement avec hésitation.

C'est là que je pus véritablement attirer son attention. Il suspendit son geste et posa le pot de confiture qu'il s'apprêtait à ranger tout en se tournant vers moi. Enfin, il me voyait. Il arborait une mine qui se voulait neutre, mais je voyais qu'il ne l'était pas tant que ça. Une bataille menait rage dans ses yeux. La raison, le cœur, la logique... Des concepts qui l'assaillaient tous en même temps.

Grey - L. S. [BXB] TERMINÉE Où les histoires vivent. Découvrez maintenant