Chapitre 18

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"I'm already high enough
I only, I only, I only got eyes for you

Do you see anyone other than me?
Baby, please
I'll take a hit of whatever you got"

Être face à elle avait toujours été une épreuve sans nom. Qu'importe les années, qu'importe les mois, j'étais toujours aussi mal à l'aise d'ouvrir mon âme à une parfaite inconnue. Mme. Lin me dévisagea, de son regard qui comprenait trop vite et je gesticulais dans l'un de ses fauteuils de cuir. J'avais toujours pensé que la thérapie, c'était une belle connerie. On n'avait pas besoin de ça par chez moi. Mais quand Adam m'avait rencontré, qu'on avait commencé à dormir ensemble et qu'il s'était rendu compte que j'étais terrassé par les cauchemars et les insomnies, il ne m'avait pas laissé le choix. Il y avait eu des séances plus rapprochées que d'autres. Parfois, je n'y avais pas été. Une thérapie de cinq ans, c'était vraiment fastidieux.

Aujourd'hui, elle avait décidé d'y aller à fond, elle connaissait mes limites, ce qu'elle pouvait dire et jusqu'où elle pouvait me pousser.

– Pourquoi ce mariage, Louis ?, demanda-t-elle une fois de plus.

J'aurai pensé que puisqu'elle était employée par Adam, elle serait de son côté, et que je n'aurais pas trop à m'épancher sur mes maigres raisons de me marier. Erreur. Il y avait bon nombre de fois où j'étais resté coi dans mon fauteuil, mais cela ne l'avait pas freiné. Elle m'avait toujours salué, plaçant un rendez-vous pour le mois prochain ou celui d'après.

– Mais j'en sais rien ! On est ensemble depuis cinq ans, c'est comme ça, c'est la vie.

C'était la pire justification que je n'avais jamais donnée. Elle eût la décence de ne pas me regarder avec des yeux ronds, mais elle griffonna tout de même quelque chose sur son calepin.

– Nous en avons déjà parlé. Vous devez prendre vos propres décisions, et manifestement, ce mariage n'est pas l'une d'entre elles. Comment voyez-vous votre avenir avec votre fiancé ?

Le néant apparût devant mes yeux, et cela me fit l'effet d'une gifle. Je ne voyais rien, parce que je n'étais pas certain d'avoir mon mot à dire sur ce qui viendrait ensuite. Lorsqu'il voudrait avoir des enfants, on en adopterait, et basta. Je déglutis difficilement, restant silencieux.

– Bien. C'est la fin de la séance, mais méditez là-dessus. Quand est-ce que nous nous revoyons ?

Lorsque la date fut fixée, je me levais et sortis de son cabinet avec l'impression d'avoir le cœur encore plus lourd qu'en entrant. Mme. Lin me confrontait à mes démons, et c'était de plus en plus difficile. Je ne lui avais même pas reparlé du fait qu'Harry était revenu. Léda savait simplement qu'on s'était vu une fois, et Adam ne savait rien non plus. J'étais un menteur, et un lâche.

Ces pensées ne m'aidèrent pas à reprendre contenance, au lieu de cela, je zigzaguais dans le quartier de Westminster, et je sus que j'allais faire de la merde lorsque je passais à côté d'un bar PMU. Le genre d'endroit où j'avais travaillé avant, le genre d'endroit dans lequel Adam ne mettrait jamais les pieds. Je passais devant, mais m'arrêtais à hauteur du magasin de chaussures voisin. Le cœur en cavalcade et les poumons en hypoxie, j'attendis. Pendant l'espace de quelques secondes, je vidais entièrement mon esprit. Ce n'était rien, juste une bière pour me remonter le moral. Tout le monde faisait ça. Alors je fis demi-tour et poussais quelques secondes plus tard la porte du bar.

De suite, une forte odeur de cigare m'assaillit, alors que je posais un œil critique sur l'endroit à l'aspect miteux. Seuls quelques piliers de bar ornaient le décor, et je pensais immédiatement que j'aurais pu finir comme eux moi aussi.

Grey - L. S. [BXB] TERMINÉE Où les histoires vivent. Découvrez maintenant