Grey - L. S. [BXB] TERMINÉE

Chapitre 15

"The devil doesn't bargain
He'll only break your heart again
It isn't worth it, darling"

Je me regardais dans le miroir, le teint blafard de mes nuits trop courtes et de mes journées trop pleines.

– Qu'est-ce que tu penses de celui-ci ? demanda Léda derrière moi tout en ajustant mon nœud papillon.

Je détestais. Je détestais ce costume, je détestais mon reflet et je détestais tout ce que cela représentait. Sans répondre, je me retournais vers elle.

– On peut y aller ?

– Oh... Lou... Joan t'a planifié ce créneau exprès, tu dois bien avoir une tenue pour ton mariage non ?

Non. Non. Non. Je ne voulais pas de cette tenue, pas plus que de ce mariage. Pas en ce moment.

Depuis que nous étions rentrés à Londres, l'ambiance à la maison était glaciale. Adam ne s'était pas excusé, il maintenait que cette foire serait une bonne chose pour moi. Alors j'avais tenté de commencer un tableau, puis un autre, en vain. Mon art ne se choisissait pas sur commande. Il ne se pliait pas sous les contraintes d'un fiancé dictateur. Léda me prit la main, nous asseyant dans le canapé.

– Qu'est-ce qui ne va pas ?

Cette simple interrogation suffit à me faire monter les larmes aux yeux, et je détournais le regard, fuyant tout ce que ma meilleure amie pourrait y lire à ce moment.

– Louis ? Tu m'inquiètes. C'est le mariage ? Ça te rend anxieux ?

Elle était à des milliers de kilomètres de mes réels questionnements. Je ne pouvais pas m'empêcher de me dire que si Adam agissait ainsi alors que nous n'étions même pas encore mariés, qu'en serait-il par la suite ? Est-ce que je n'aurais plus le contrôle sur ma vie ? Est-ce que je passerais le restant de mes jours enchainé à des décisions qui ne m'appartenaient pas ?

– Non. Non, t'inquiète, mentis-je.

Elle soupira, impuissante, et je m'en voulus de la faire tanguer avec moi dans la valse de mes tourments. Elle revenait à peine de son voyage que je m'évertuais déjà à lui compliquer la vie.

– Louis. Sérieusement. Dis-moi..., m'implora-t-elle.

Lorsque nos regards s'accrochèrent, une larme incontrôlable roula le long de ma joue, bien vite rattrapé par le pouce de Léda. Elle avait l'air tellement inquiète que je m'en voulus.

– On s'est disputé avec Adam quand on était à Polperro et depuis...

Depuis, je n'arrivais plus à me convaincre d'avancer et de fermer les yeux sur la situation. Elle ne s'empêcha pas de soupirer légèrement, les traits agacés. C'était sans cesse les mêmes discussions, durant lesquelles je me plaignais de ma situation sans faire en sorte de la changer. Je voyais sur son regard que c'était exactement ce à quoi elle pensait.

– Louis, avant que je revienne, tu m'as dit que tu voulais rompre. Pourquoi tu ne t'y es pas tenu ?

Toutes les raisons qui me vinrent à l'esprit furent les mauvaises, se rejoignant en un seul mot: la peur.

– Je... Je tiens à lui.

C'était minable. Comment pouvait-on dire de son fiancé qu'on tenait simplement à lui ? J'aurais dû dire que je l'aimais comme un fou, que j'aurai pu m'ouvrir la cage thoracique pour lui, n'était-ce pas ainsi qu'on était censé aimer ? Ou est-ce que les années ternissaient tout cela ?

– Peut-être, mais est-ce que cette vie te convient vraiment ?

Il était clair que non. Mais elle m'avait convenu au début, alors pourquoi ne pouvais-je pas simplement m'en contenter ? Les yeux dans le vague, Léda continua ses interrogations rhétoriques.