Chapitre 6

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C'était le chapelet de mon grand-père. Je le brandis au hasard dans la pièce et me mis à prier. Ma mère poussait des râles inquiétants. Je récitai la seule prière que je connaissais, Le Notre Père, essayant d'avoir l'air le plus convaincant possible. Je m'approchai de ma mère et posai la croix sur son torse. Elle se mit à hurler et fut prise de violents tremblements puis soudainement, elle s'affaissa sur le linoléum et ce fut tout. Elle avait les yeux fermés et avait le souffle haletant. Je m'approchai doucement de son visage et l'appelai. J'entendis mon père reprendre conscience au bas de l'échelle. Il monta doucement les barreaux et me rejoignit près de ma mère. Il avait le côté gauche de son visage tout enflé. Ma mère semblait évanouie et être aux prises d'un horrible cauchemar. Ses yeux roulaient sous ses paupières closes. Mon père l'appela doucement plusieurs fois, caressant son front. Elle semblait murmurer quelque chose mais c'était incompréhensible. Marc nous avait rejoints. Il regardait ma mère d'un air inquiet. Voyant que ma mère ne revenait pas à elle, nous décidâmes de la descendre dans sa chambre. Mon père la prit par-dessous les bras et je lui pris les jambes. Marc commença à descendre l'échelle pour m'assurer un équilibre. Tant bien que mal, nous arrivâmes sur le palier et nous installâmes ma mère dans son lit. Elle ne semblait pas reprendre conscience. Mon père faisait les cents pas. Il se retourna vers Marc. – Que faisons-nous maintenant ? Je ne peux pas appeler un médecin ! Que vais-je lui raconter ? Marc semblait réfléchir intensément. Il regarda mon père. – Il n'y a qu'une chose à faire. Il est temps de faire appel à l'Église. Nous disposons d'assez de preuves pour déposer une demande d'exorcisme auprès des autorités catholiques. A ce stade, je ne peux rien faire de plus. Mon père le regardait d'un air ébahi. – Que voulez-vous dire ? lui demanda-t-il. Marc observait ma mère avec attention. Elle respirait très fort et semblait souffrir. – Ce que je veux dire, Jean, c'est que votre femme est probablement possédée par la chose qui hante votre maison depuis des années. En la provoquant de la sorte, elle lui a donné la permission de s'en prendre à elle. C'était une très mauvaise idée. Quand vous autorisez une entité à s'en prendre à vous, vous lui donnez accès à votre âme. Seul un prêtre pourra nous aider. Je vais descendre et passer quelques coups de fil.

Vous, de votre côté, je vous conseille de garder votre femme à l'œil. D'ailleurs, je pense qu'il serait plus prudent de l'attacher au lit. Il ne faudrait pas qu'elle puisse s'échapper dans son état ou qu'elle s'en prenne à quelqu'un d'autre. Nous ne savons toujours pas ce qu'est cette chose. Mais la force dont elle a fait preuve me fait dire qu'il ne s'agit pas d'un petit démon de pacotille. Cette chose, quelle qu'elle soit, est d'une puissance incroyable. Mon regard passait de l'un à l'autre. Je ne savais pas quoi dire. Je ressentais toute une gamme de sentiments à la fois. La peur, la colère mais surtout la culpabilité. Car si ma mère était dans cet état, c'était de ma faute. Elle avait vu mes blessures et avait, comme toute mère digne de ce nom, voulu me protéger. Marc me regarda et sembla comprendre mon désarroi. – Ce n'est pas de ta faute, Michaël. Tôt ou tard, il s'en serait pris à n'importe lequel d'entre vous. Descends avec moi. Nous allons trouver ce Père Rosso et lui montrer les vidéos. Si avec cela, il n'est pas convaincu, il faudra trouver une autre alternative. Je suivis donc Marc dans les escaliers. Il mit ses deux techniciens au courant de la situation et demanda à Jimmy de monter rejoindre mon père dans le cas où ma mère reprendrait conscience. – Il vaut mieux ne pas le laisser seul avec elle. Prenez une caméra et installez-là au pied du lit. S'il se passe la moindre chose, appelez-moi immédiatement ! Jimmy hocha la tête et alla rejoindre mon père. Antoine regarda Marc d'un air inquiet et, se tournant vers les écrans, il indiqua les données que les caméras enregistraient. La température descendait nettement dans la chambre. Je voyais mon père se frotter les mains et faire les cents pas autour du lit. J'attrapai mon manteau et me dirigeai vers la porte d'entrée. Marc me suivit. J'ouvris la porte et tombai nez à nez avec Mario. Il me regarda d'un air étonné, le bras encore levé pour frapper à la porte, mais je ne lui laissai pas le temps de dire quoi que ce soit. Je l'attrapai par le bras et lui demandai de me conduire immédiatement chez le Père Rosso.

La prison de verre - Derrière Le MiroirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant