Billy s'affairait devant sa valise, le front plissé par la réflexion. Depuis l'appel de Mark, qu'il avait connu par l'intermédiaire de Jimmy lors d'une enquête à laquelle il participait également, ses pensées ne cessaient de tourner en rond dans sa tête. Quelle histoire ! Ce que Mark lui avait raconté était complètement inédit. Billy, qui enquêtait sur les phénomènes paranormaux depuis plus de vingt ans, avait déjà entendu parler de mondes parallèles, mais n'avait jamais su qu'il était possible d'y accéder physiquement. Il savait qu'avec les voyages astraux, il était possible à un médium de transférer sa conscience dans un monde alternatif, mais être physiquement transporté de l'autre côté, et par un démon de surcroît ? Pauvre Jimmy ! Son petit frère avait toujours eu du mal à accepter ce don qu'ils avaient depuis l'enfance. Il lui avait fallu l'aide de Billy pour accepter cette capacité et s'en servir pour consoler des familles en deuil. Billy, par contre, était enchanté par cette capacité. Il faut dire que son don lui était très utile lors de ses nombreuses enquêtes. Il lui suffisait de rentrer dans un lieu pour y ressentir toutes ses présences et pouvoir parfois retracer des événements du passé. Mais aujourd'hui n'était pas une enquête comme les autres. Cette fois, Jimmy était en danger de mort. Et bien que l'idée de découvrir tous les dessous de cette affaire ait attisé son obsession pour le paranormal, l'inquiétude était présente. Il finit de remplir sa valise et se dirigea vers le téléphone. Pendant ces nombreuses enquêtes, il avait eu l'occasion de rencontrer des personnes intéressantes avec des capacités exceptionnelles. Le téléphone sonna et une voix féminine, légèrement enrouée, lui répondit. Billy soupira de soulagement. Vu l'heure tardive, il avait craint que personne ne lui réponde.
— Salut, Andréa. C'est Billy. Je t'appelle car...
Andréa lui coupa la parole.
— C'est Jimmy, n'est-ce pas ?
Comme toujours Billy était impressionné par les dons de médium de cette femme. Il avait des capacités, mais s'il devait se les représenter, elles auraient eu l'air de la lueur d'une petite bougie. Andréa était un vrai phare qui illuminait n'importe quel endroit le plus sombre.
— Oui c'est Jimmy. Qu'as-tu vu exactement ?
Andréa ne répondit pas tout de suite, certainement parce qu'elle venait de se réveiller. Après un moment de silence, elle lui annonça son arrivée. Elle raccrocha avant même que Billy n'ajoute quelque chose. Il se dirigea vers la cuisine, la valise à la main, et mit le percolateur en route. Andréa était une accro à la caféine. Il s'assit sur une chaise et attendit. Le bruit d'un moteur se fit entendre. Billy se leva et regarda par la fenêtre. C'était Andréa. Il alla lui ouvrir et la suivit à la cuisine. Andréa, petit bout de femme d'une cinquantaine d'années, les yeux tirés par le manque de sommeil, se servit directement au percolateur. Elle remplit une tasse et en prit une pour Billy. Installés autour de la table, Andréa raconta à Billy les rêves étranges qu'elle avait faits récemment. Toujours les mêmes en fait. Elle voyait Jimmy dans un endroit sombre et froid. Mais Jimmy n'était pas seul. Elle avait aussi vu un vieil homme et des jumeaux d'une vingtaine d'années. Ils avaient l'air prisonnier et criaient à l'aide. Mais ces présences n'étaient pas ce qui l'avait le plus terrifiée. Outre ces âmes en détresse, elle avait senti que quelque chose habitait ce lieu, une chose horrible, une chose inhumaine. Elle avait eu du mal à la discerner mais elle avait senti les vibrations de haine et de violence qui émanaient de cette créature. Quand Billy l'avait appelée, elle était en plein cauchemar. Jimmy était en danger. Mais il n'était pas le seul. Un nom lui revenait sans cesse en tête.
— Michaël.
Billy lui demanda de qui il s'agissait mais Andréa secoua la tête. Elle n'avait pas pu ressentir la présence de cette personne. Comme si quelque chose l'en empêchait. Billy l'informa qu'il se rendait à l'adresse indiquée par Mark. Andréa hocha la tête, se leva, rinça sa tasse de café au-dessus de l'évier et la posa sur l'égouttoir. Elle se tourna vers Billy.
— Allons-y alors !
Billy la regarda d'un air inquiet. Depuis leur dernière rencontre, Andréa avait l'air amaigrie et fragile.
— Je ne pense pas que ce soit une bonne idée, Andréa. Dans ton état,...
Andréa le regarda d'un air sévère. Sa peau ébène était atténuée par une nuance de gris et ses yeux étaient cernés.
— Mon état, c'est mon affaire, Billy. Je ne sais pas pourquoi mais je sais que je dois me rendre là-bas. Je sens que je dois y aller.
Billy la regarda un moment et soupira.
— Donc, c'est réglé, dit Andréa. Ma valise est dans ma voiture mais vu la distance, nous prendrons ton pick-up, si tu le permets.
Billy hocha la tête. Il alla rincer sa tasse à l'évier, Andréa avait horreur du désordre, et se dirigea vers sa veste. Il prit sa valise, ses clés, son téléphone et se dirigea vers sa voiture. Il chargea également la valise d'Andréa. Elle avait sûrement dû emporter toutes ses amulettes, protections et objets quelconques qu'elle possédait car la valise était lourde. Andréa s'installa sur le siège passager et attacha sa ceinture. Billy s'installa au volant, encoda l'adresse et attendit que l'itinéraire s'affiche. Une fois enregistré, le GPS commença à débiter le trajet de sa voix artificielle féminine. Durant le trajet, Billy lui raconta les informations qu'il tenait de Mark. Andréa l'écoutait et son visage devenait de plus en plus pâle au fil du récit. Elle ne posa aucune question. Elle garda le silence jusqu'à la fin. Billy la regardait, attendant un commentaire, mais elle l'informa simplement qu'elle allait se reposer le temps du voyage. Billy la laissa donc dormir. Au vu de ce qui les attendait, quelques heures de sommeil lui feraient le plus grand bien. C'est dans ce silence funeste que Billy conduisit vers ce destin incertain. Toute cette histoire lui laissait comme un mauvais goût dans la bouche. Il ne savait pas pourquoi mais il avait l'impression que sa vie ne serait plus jamais la même après ça. S'il s'en sortait vivant du moins. Cette réflexion le laissa perplexe. Il n'avait jamais eu peur de mourir lors d'une enquête, alors pourquoi ce sentiment de terreur semblait-il lui serrer le cœur ? Il avait l'impression de foncer vers un énorme précipice où ne l'attendait que terreur, souffrance, et pire encore. Mais Jimmy était là-bas. Il n'avait pas le choix. Jimmy aurait fait la même chose pour lui. C'est ainsi perdu dans ses pensées que Billy se dirigea vers le champ de bataille.
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La prison de verre - Derrière Le Miroir
TerrorMichaël Blanchart, adolescent français doit quitter la France avec sa famille pour vivre en Belgique dans un petit village reculé de la région binchoise. Dès son arrivée dans la maison de son grand-père, une sinistre maison de corons, des phénomènes...