L'odeur du café chaud vient chatouiller mes narines depuis le rez-de-chaussée. Le soleil caresse de doux rayons mon visage et je garde encore un peu les yeux fermés, profitant de ce réveil à la maison qui me manque tant à l'internat. Un rire retentit d'en bas. Vivant, enchanteur, radieux.
Maman.
J'ai le cœur qui tente une percée entre mes cotes et les yeux qui s'ouvrent. Elle est revenue, si vite, si tôt, déjà. Je sors de mes draps et dévale les escaliers par quatre, encore en chemise de nuit.
Papa et elle discutent, assis autour de la table ronde de la cuisine, une tasse de café à la main. Ils sont souriants, leurs yeux pétillent.
— T'aurais pu nous ramener un primate ! je lance d'un air déçu, annonçant ma présence.
— Agathe ! s'extasie ma mère en se levant.
Elle vient m'enserrer de ses bras et les hormones du bonheur jaillissent de nos poitrines. Une pluie d'ocytocine, de dopamine et d'endorphine vient couler entre nous. C'est doux, c'est chaud, une impression que le monde s'apaise.
— Le babouin ne rentrait pas dans ma valise, finit-elle par me glisser.
Ça me fait pouffer au creux de son cou.
— Pas trop jetlaguée ? je lui demande en prenant place autour de la table et me jetant sur les tartines de pain frais.
Elle lève sa tasse de café dans ma direction, je lâche un nouveau rire.
— Je vais dormir toute la journée, désolée mes chéris.
Elle a de larges cernes et des petits yeux fatigués. En temps normal ils sont vifs, à l'affût du monde. Je remarque qu'elle a l'air un peu plus bronzée, quelques cicatrices de piqûres parsèment ses bras découverts.
— T'en fais pas, moi aussi, je bougonne en avalant ma tartine, me rappelant soudain tous les soucis qui accablent mes épaules.
Je lâche ma nourriture d'un coup. Lily ! Le message ! Trop étourdie par le retour de Maman, j'en ai oublié de regarder les notifications de mon téléphone.
Mon père n'a même pas le temps d'ouvrir la bouche pour me retenir que je suis déjà de retour dans ma chambre.
Mon portable met une éternité à se rallumer. Papa nous force à l'éteindre tous les soirs avant de dormir pour « éviter les mauvaises ondes ». Je ne sais pas si la notion de mauvaises ondes existe toujours en 2023, et si ça change quoi que ce soit, mais je le fais quand même.
J'entre mon code et patiente, patiente. Lorsque ça y est, la page d'accueil s'affiche sur l'écran, mon excitation monte en flèche. J'attends une petite minute, rongeant les ongles de mes doigts, jusqu'à ce que je m'aperçoive que je n'ai pas de réseau.
— Campagne de merde !
Je redescends au rez-de-chaussée, prenant soin de faire trembler chaque marche à mon passage, passant devant mes parents et le cadavre de ma tartine, puis je m'engouffre dans le jardin.
— Réseau de merde ! je crie, continuant sur ma lancée.
J'agite mon téléphone haut au-dessus de ma tête dans l'attente d'une notification, j'en viens même à grimper sur le cerisier qui prenait jusqu'ici un doux plaisir à profiter du soleil. Mes pieds nus s'écorchent au contact de l'écorce, je sens la brise glaciale de février s'engouffrer sous ma chemise de nuit.
— Tout va bien, ma puce ? m'interpelle Maman d'en bas.
Elle a eu l'idée d'apporter son manteau. Visiblement, les chiens peuvent faire des chats, quoi qu'en disent les théoriciens.
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La Loi de la Jungle
Teen FictionGRAND GAGNANT WATTYS FRANCE 2023 ✨ Au lycée privé Charles Darwin, la loi de la jungle fait régner l'ordre. Les lions au regard ténébreux n'ont qu'un désir : croquer les gazelles à pleines dents. Au milieu de cet environnement hostile, où l'adolescen...