Au fer rouge (Mikey Manille x OC)

6 : Amis, tu dis ?

- Mon téléphone.

Habillé du même costume coûteux de la veille, Mikey s'installe à ma droite. En me tournant vers lui, je remarque un détail que je n'avais pas noté hier : il porte le même tatouage de dragon qu'avait Draken. Cette vue me conforte dans l'idée que je dois tout faire pour qu'il ne disparaisse pas de nouveau.

- Qu'est-ce qu'il a, ton téléphone ? je demande en prenant un air étonné.

- Je sais que c'est toi qui l'as.

Je bois une gorgée de ma limonade pour éviter de répondre.

- Ce que je t'ai dit il y a 10 ans tient toujours, poursuit-il. C'est encore plus le cas aujourd'hui.

- Dans ce cas, ça veut dire que t'es un imbécile.

Mikey reste silencieux et replace une mèche de ses cheveux derrière son oreille. Il paraît agacé mais n'en dit cependant rien.

- Pourquoi t'es têtue comme ça ?

- Parle pour toi, je réplique.

- Arrête d'insister.

Nouveau silence. Assis face au comptoir mais la tête tournée l'un vers l'autre, nous nous observons en chien de faïence. Je ne compte pas décamper de ma position, et Mikey ne semble pas disposé à le faire non plus.

Impossible que je lâche l'affaire après avoir remis la main sur lui.

- Rends moi mon téléphone, reprend-il. Ensuite on repartira chacun de notre côté.

- J'ai 26 ans, Mikey. Ce n'est plus à toi de décider ce que je dois faire.

- Tu ne comprends rien, s'impatiente-t-il. C'est pour toi que je fais ça.

- Tout comme c'est pour toi que moi je fais ça.

- Tu n'as vraiment pas changée, soupire-t-il.

Mais derrière cet air exaspéré qu'il se donne, je perçois une teinte de nostalgie dans sa voix. Il paraît s'être un peu déridé et je saute aussitôt sur l'occasion :

- Où t'étais passé pendant tout ce temps ?

- Là où j'étais sûr que tu ne me retrouverais pas.

- Mais je t'ai retrouvé, je souligne, et je n'ai pas l'intention de te laisser repartir.

- Il va bien falloir que tu le fasses, tranche-t-il. Ces 10 dernières années se sont déroulées sans problème, et je ne vois pas pourquoi ça changerait.

Nous nous fixons. Les yeux noirs de Mikey sont décidés, mais j'ai l'impression d'y voir autre chose au fond de ses pupilles... Une lueur d'espoir, une supplication pour que j'insiste... Ou est-ce seulement un effet de mon imagination ?

Il est le premier à ciller. Il oriente son regard sur mes mains, presque crispées sur mon verre de limonade.

- Tu n'as pas refait ta vie, hein ?

- Comment ça ? je réponds en fronçant les sourcils.

- Tu n'as pas de bague, donc je suppose que tu n'es pas mariée, et tu me voles mon téléphone juste pour me revoir. Je t'avais demandé d'être heureuse, Isuzu, alors pourquoi tu continues de t'accrocher à moi ?

Ses yeux remontent de nouveau vers les miens. Cette fois, c'est de la déception que je perçois.

- Eh bien, les amis sont là les uns pour les autres, non ? dis-je.

- Amis, tu dis ?

Sans rien ajouter, Mikey me prend le verre des mains avant de le finir d'une traite. Puis, toujours dans le silence, il se lève après avoir déposé un billet sur le bar.