20 : Dérapage

255 27 41
                                    

- Il l'a tué.

Assis sur le bord de mon canapé, Chifuyu se prend la tête dans les mains en soupirant de désespoir. De mon côté, je ne cesse de tourner en rond devant la table basse, incapable de rester immobile. Il n'y a que la pluie qui s'écrase sans relâche contre ma fenêtre qui brise le silence pesant.

Une nouvelle semaine s'est écoulée depuis mon voyage au cœur des flammes. Et je n'ai eu aucune nouvelle de Mikey.

- Il l'a forcément tué, je répète, démoralisée.

- Je sais pas, Isuzu, souffle Chifuyu. Il aurait pu se passer n'importe quoi quand t'étais dans les vapes, même si tout ce que tu as vu et entendu montre qu'il est coupable...

Il marque une pause. Ses yeux d'émeraude n'ont jamais paru aussi perdus.

Chifuyu et moi avons passé notre semaine à ressasser cette soirée, décortiquant chaque détail qui la compose. Le choc retombé, j'ai pu réfléchir calmement à la situation.

- ... Tu m'as bien dit qu'il t'avait sauvée du feu en te portant, non ?

- Oui, j'acquiesce. Même s'il a laissé cet homme derrière lui, il m'a sauvée. Maintenant, reste à savoir pourquoi il est allé dans cette baraque.

Nouveau silence. Chifuyu ramène ses mains derrière son crâne pour les croiser avant de s'affaler contre le dossier du canapé. Je me mordille nerveusement la lèvre inférieure.

- Je ne veux pas y croire, dis-je. Même si je soupçonne Mikey depuis le début, je ne peux pas sincèrement penser que c'est un meurtrier. Ça me paraît tellement...

- ... invraisemblable, achève Chifuyu.

- Surtout après qu'on se soit embrassés... Putain, c'est un sacré merdier.

Il hausse les épaules.

- Il faut qu'on continue d'en savoir plus, affirme-t-il. On ne peut pas tirer des conclusions aussi hâtives.

- Alors, on le considère encore innocent tant qu'on n'a pas prouvé qu'il est coupable ?

- On a besoin de preuves tangibles. Là, on ne peut que faire des suppositions... On n'arrête pas depuis une semaine, et je ne pense pas que ça soit la meilleure des choses à faire.

Je hoche la tête et m'apprête à renchérir quand le téléphone de Chifuyu vibre dans sa poche. Tandis qu'il lit son message, je me laisse tomber à côté de lui. Il pianote rapidement une réponse avant de se redresser, reprenant sa veste pour l'enfiler par dessus son pull de laine.

- Je suis désolé, dit-il en arrangeant ses vêtements. J'avais complètement oublié que je devais voir Aya ce soir...

- Ah, je vois, je réponds avec un ricanement. Dépêche toi de la rejoindre, et arrête de t'excuser.

- Ça va aller ?

- Mais oui ! j'affirme en le poussant. T'en fais pas pour moi, j'ai un Harry Potter à finir.

L'évocation d'un rendez-vous amoureux a soudainement effacé l'atmosphère sérieuse et lourde qui a régné durant la semaine. Dans toutes nos affreuses théories, nous en avions presque oublié que la vie poursuivait son cours...

- Je te tiens au courant, sourit-il en s'approchant de l'entrée. De toute façon, on se voit lundi à l'animalerie.

- Profite bien de ta Aya chérie, je raille.

- Ne l'appelle pas comme ça !

Les joues rougissantes, Chifuyu ouvre la porte et se tourne une dernière fois vers moi.

Au fer rouge (Mikey Manille x OC)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant