Chapitre 10 - Prophétie

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Aina ne comprenait pas pourquoi Lust était si obsédé par Void, au point d'arborer un tel regard. Elle était presque sûre qu'il aurait pu s'en prendre à dame Sorrow, si son père n'avait pas été présent. Il était d'un naturel très violent et colérique et pouvait perdre son sang-froid à la moindre contrariété.

« Il suffit Lust. » l'avertit enfin Wrath, qui semblait en avoir assez des jérémiades de son fils aîné.

Celui-ci se tut immédiatement et le silence revint, bien que le jeune homme paraisse particulièrement frustré par la situation. Aina soupirant en imaginant l'humeur massacrante dans laquelle serait le jeune maître, après le repas. Quelque chose lui disait que la fin de journée s'annoncerait difficile, pour quiconque aurait le malheur de croiser son chemin. C'est à cet instant qu'Elvan amena le repas, fait à partir des ingrédients qu'Aina avait achetés au marché.

« J'ai faim... » chantonna Despair en se dandinant sur sa chaise.

« Le repas arrive ma chérie. » souffla l'épouse d'une voix redevenue douce.

Cette dernière fit signe à Elvan de servir sa fille, ce qu'Aina prit l'initiative de faire et qui lui valu d'être remerciée par sa maîtresse de la tête. Elle remarqua que la plupart de ses maîtres la fixaient avec attention, suivant ses moindres faits et gestes. La sensation d'être observée la mit mal à l'aise, mais elle fit semblant de rien avant de se replacer le long du mur, comme si elle n'en avait jamais bougé avant.

Le bruit des couverts glissant contre les assiettes se fit entendre et l'on n'entendit plus rien à part les discrets sons de mastication de la famille et particulièrement des enfants. Tous maîtrisaient l'art des bonnes manières et de maintenir les apparences, mais de jeunes gens comme Despair et Fear étaient encore jeunes pour être tenus responsables de leurs erreurs.

« J'ai entendu qu'ils étaient revenus. »

Aina tendit l'oreille, en entendant la voix hésitante de la matriarche. Wrath souffla du nez, en plantant violemment sa fourchette dans la chair tendre et sanguinolente de sa viande à peine cuite.

Une bête sauvage.

C'est ce que lui inspira la vue de cet homme tandis qu'il déchiquetait littéralement sa viande avec un certain plaisir, vu le petit rictus qui étirait ses lèvres.

« Ces satanés chiens ailés. » grogna-t-il, son couteau aiguisé à la main. « Ils sont tout juste bons à diffuser leur venin partout où ils passent. »

Il doit parler des Salvatoris.

Il n'y avait guère qu'eux, envers lesquels le patriarche exprimait autant d'animosité.

Les ennemis naturels et ancestraux de la famille, qui habitaient ces terres depuis presque aussi longtemps qu'eux. Le Salvatoris étaient une autre famille prestigieuse de l'empire, qui, curieusement, possédait une demeure juste à côté de celle des Signavit. Il était juste de dire que ces deux grandes lignées se partageaient la totalité du territoire par-delà la forêt obscure.

Les gardiens d'argent.

C'était ainsi que tous les surnommaient.

« Je pensais pourtant qu'ils avaient été envoyés à la frontière. », souffla l'épouse, pensive.

Wrath haussa les épaules en soupirant.

« Il a dû les rappeler ici. »

Le patriarche agrémenta sa remarque d'un regard pincé à l'intention d'Elvan, qu'il porta ensuite sur Aina. Il avait l'air particulièrement contrarié par la situation, probablement parce qu'il haïssait la famille d'argent depuis toujours.

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