Vingt-cinq

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 Le baiser froid du sol contre sa joue le réveilla subitement. La Marionnette se fit violence pour ouvrir les yeux, qui le brûlaient comme s'il avait plongé son visage dans de l'acide. Ses paupières étaient lourdes, et sa vision brouillée. Un atroce sifflement lui perçait les tympans.

Son regard se posa sur des barreaux en fer, émergeant de la pénombre. Thémy était dans une cellule. Un retour brutal à la case départ : c'était dans une cellule que sa vie avait pris un tournant invraisemblable.

C'était derrière les barreaux que son périple signât son dernier acte.

La Marionnette essaya de se redresser, en vain. Sa tête lui était lourde, vacillante. On avait ligoté ses bras derrière le dos, ainsi que ses jambes entre elles, par les chevilles. Le garde du corps de la reine tua un juron. Sa gorge était atrocement sèche, et sa langue pâteuse. Malgré les derniers résidus de drogue dans son organisme, Thémy ne put contenir sa colère qui se réanimait petit à petit, tel un être enterré par erreur, alors que son cœur continuât à battre – à se battre.

Il attendit pendant plusieurs minutes à même le sol, en essayant de forcer sur les liens qui le réprimaient. Le garde du corps de la reine repensa aux trois Marionnettes : quelle insanité les avait poussées à prendre les armes contre leur propre créatrice ? La fureur recommençait à bouillir dans ses veines. Thémy pensa soudainement à Gwenn, cette pauvre Marionnette qui avait essayé d'assassiner la reine... il n'avait aucun motif, aucune motivation, au premier abord. Personne n'était au courant des manigances de Kim d'Ochas, à cette époque. Le garde du corps de la reine se demanda, avec une horreur sourde, si, en leur infusant une conscience propre, des idées impies et antirationnelles s'étaient faufilées dans leur esprit lors du processus...

Une autre pensée l'assiégea : qu'étaient-ils advenus des autres ? La Marionnette hurla les prénoms de ses compagnons, les échos de ses paroles lui répondirent cruellement. Thémy était seul. Il répéta leurs prénoms à plusieurs reprises, avec l'espoir fou qu'ils étaient bien là mais encore assommés par la même drogue, en vain.

Alors qu'il essaya vainement de forcer sur les cordes qui lui brûlaient la peau, Thémy entendit des pas se rapprocher. Il s'immobilisa, le corps entièrement tendu. Quelqu'un se rapprochait. Il se concentra sur le rythme régulier des solerets en fer ébranlant le sol en pierre.

La Marionnette leva les yeux vers le roi d'Ochas.

Ce dernier arbora un sourire arrogant, cruel. Il était vêtu du même accoutrement qu'il avait porté, le jour de sa visite officielle et imprévue en Obscurum. Il laissa échapper un gloussement amusé en plongeant son sombre regard dans le regard en croix brillant de rancœur de son prisonnier.

— Bien dormi ? Je vous prie de m'excuser de mon impolitesse... vous logez dans une cellule miteuse, j'imagine que vous imaginiez quelque chose de plus digne ! Je trouve que cela correspond tout à fait à votre situation, toutefois.

— La reine ! gronda la Marionnette, en se rapprochant vivement des barreaux. Où est-elle ?

— Oh, du calme, mon bon monsieur ! Madame est bien occupée. Je crains qu'elle n'ait point le temps de vous accorder une audience privée.

— Répondez !

La Marionnette eut à peine le temps de rouler sur le côté, évitant un poignard sorti de nulle part. L'arme se planta entre deux pierres humides.

Le regard du roi d'Ochas se fait plus froid et antipathique. Son sourire avait subitement disparu.

— Silence ! cria l'homme. N'oubliez pas à qui vous faites face, malandrin. Je ne vais pas me laisser effaroucher par un maraud de votre genre. Et votre soi-disante souveraine a d'autres chats à fouetter, en ce temps !

Bad Love Cursed RomanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant