Bad Love Cursed Romance

Quatorze

 Thémy se réveilla en sursaut, violemment arraché de ses rêves incompréhensibles. Ses yeux le brûlaient encore. Quelqu'un toquait à la porte.

Il avait été congédié par le général Baptiste Lyraispaix à l'instant même où le roi d'Ochas avait enfin quitté le château. La Marionnette avait eu bien du mal à garder les yeux ouverts quand l'homme à la chevelure blonde avait enfin pointé le bout de son nez. Sans perdre la moindre seconde, Thémy avait accouru jusqu'à sa chambre pour s'effondrer dans son lit, trop exténué pour penser à manger. Et voilà qu'on l'extirpait de son sommeil si désiré !

On toqua encore plus fort. Dans un grognement désapprobateur, la Marionnette se redressa. Combien de temps avait-il dormi ? Pas assez, sans le moindre doute : sa tête lui faisait un mal de chien, et ses paupières n'arrivaient pas à rester ouvertes. Il enfila un haut afin de cacher son torse tatoué – Thémy n'avait même pas eu la force de se déshabiller complètement, avant de littéralement tomber de fatigue – avant d'enfin ouvrir la porte.

C'était Laureline. La servante écarquilla légèrement ses yeux froids avant de faire un pas en arrière.

— Vous avez une sale mine, souffla-t-elle avant de se fondre dans son indifférence habituelle.

— Merci. Qu'est-ce qu'il se passe ?

— Les généraux aimeraient vous voir. Ils vous attendent dans la salle de trône.

La Marionnette poussa un soupir, avant d'opiner du chef. Il rejoignit les généraux tout en se peignant rapidement les cheveux, avec l'aide de ses doigts. Il avait l'impression que ses yeux allaient se consumer dans leur orbite. Il bâilla avant d'entrer dans la salle de trône, en priant que les hommes de la reine ne remarquassent pas son état qui était loin d'être digne du garde du corps personnel de la souveraine.

Les généraux étaient juste devant le trône, et discutaient entre eux. La Marionnette vit immédiatement leurs traits rongés, eux aussi par la fatigue, mais aussi par la méfiance et la contrariété. Leurs yeux se posèrent sur Thémy quand il arriva enfin. Seul le général Gabriel Young l'accueillit avec un semblant de sourire.

— Navré de te faire sortir du lit si abruptement, fit-il. Nous allons procéder à une réunion d'urgence.

— Entendu, général, répondit la Marionnette après un hochement de la tête. J'imagine que je dois surveiller les appartements de la reine, jusqu'à la fin de votre réunion ?

— Exceptionnellement, non.

— Comment ça ?

Le général Baptiste Lyraispaix poussa un soupir exaspéré, les bras croisés. Il lui répondit sèchement :

— Réfléchis. Si nous avons demandé à Laureline de te réveiller, c'est pour que tu participes à la réunion.

— Quoi ? Mais... si c'est cela, personne ne peut surveiller la reine, et...

— Nous sommes plus malins que tu peux le croire, Marionnette, cracha soudainement le maître en Sombre Alchimie, avec un demi-sourire. Maintenant, arrêtons de perdre du temps inutilement. Allons-y.

Thémy regarda le général Michel Igalle, troublé. Puis, il repensa à la conversation qu'il avait eue avec la reine.

Le général allait utiliser la magie pour veiller sur la reine, pour le temps de la réunion. Quelque chose de bien temporaire, la Marionnette l'avait compris : étant donné l'exténuation visible de l'homme, Thémy sut que le maître en Sombre Alchimie ne pouvait pas maintenir cela éternellement. Ce fut la première fois que la Marionnette se demandait sérieusement où se trouvaient les limites de cet art ésotérique.