« Son père n'était effrayant que si l'on avait déjà peur. »
Jours avant l'accident : 169
Je sens tout de suite que ce n'est pas pareil que d'habitude. C'est sans doute un vrai rêve. Je ne suis pas habitué : je n'ai pas fait de vrai rêve depuis très longtemps, trop occupé à rêver éveillé et m'occuper de ce monde dans lequel je suis roi, aux côtés de Thaïs.
J'ai l'impression de flotter dans une faille spatio temporelle. Autour de moi, tout est noir, et je suis en apesanteur. C'est là que j'entends des mots chuchotés, et que je vois ma sœur s'avancer.
Au début, elle a l'air normale, comme d'habitude. Seulement, après quelques secondes d'observation, je me rends compte qu'elle saigne de plusieurs endroits : des yeux, du nez, des oreilles, des cheveux. Ses pupilles sont encore plus noires qu'elles ne le sont habituellement, si bien qu'on ne voit plus la couleur initiale de ses yeux. C'est là qu'elle ouvre les bras et dit :
— Regarde. Regarde ce que tu m'as fais.
Je sais, rationnellement, que ce n'est pas moi, que je n'ai rien fais, mais je ne peux pas m'empêcher de me défendre quand même.
— Je te jure que c'est pas moi, tu te trompes ! Regarde, tu penses vraiment que j'aurais pu te faire ça ? Je te promets que c'est pas ça.
— Je ne te pardonnerai jamais, grogna-t-elle en s'avançant vers moi.
Je me mets à pleurer.
— Sarah, Sarah, s'il te plaît ! Je t'en supplie, ne m'abandonne pas. Reste ma sœur. S'il te plaît, j'ai besoin de ma soeur.
— Je ne veux plus être ta sœur. Tu m'as fait trop de mal.
Elle prend mon cou dans sa main et serre, et j'ai l'impression qu'elle va m'étouffer. Ses yeux virent rouge, et je commence à suffoquer.
— Je ferais tout ce que tu veux pour me racheter, Sarah, je te promets, mais ne me laisse pas, je la supplie, même si c'est pathétique.
Elle me lâche et je tombe. Le sol est revenu, mais tout est toujours noir. Elle descend son sac d'école de ses épaules et fouille dedans, malgré son visage et ses genoux qui saignent toujours.
— On devrait t'emmener à l'hôpital, tu saignes, fais-je remarquer inutilement.
— C'est inutile. Par contre, ce qui serait utile c'est que tu prennes ce couteau.
Avec une certaine réticence, je le prends tout de même dans ma main, qui tremble tellement fort que j'ai peur de lâcher l'arme sans faire exprès.
Ma sœur me regarde dans les yeux et me dit :
— Maintenant, plante le couteau dans ton cœur.
Je pèse le pour et le contre. À ce moment-là, j'oublie que je suis dans un rêve, pour moi, ma vie est vraiment en jeux.
Et ce qui m'effraie le plus, c'est que je lui obéis.
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La cabane en haut de l'arbre | TERMINÉE
Teen FictionSPIN - OFF D'ÂMES PERDUES deux collégiens, une cabane, leur premier chagrin d'amour. et l'année où tout a dérapé.