fragment numéro 21

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« Gansey n'oublierait jamais la légèreté et la liberté qu'il avait éprouvées alors : moins de la joie qu'une absence de douleur. »

Jours avant l'accident : 184.

À huit heures, je suis déjà en route pour aller chez Thaïs. Après ce qu'il s'est passé la veille, j'ai juste envie de m'enfuir de chez moi et ne jamais revenir. C'est tentant, parfois. Ça serait bien, de juste prendre un billet de train avec l'argent que j'entrepose sous le matelas de mon lit, et puis de partir sans jamais revenir.

Mais il y a trop de choses qui me retiennent ici : Sarah, Anna et Noémie, Thaïs, mes études, les attentes de tout le monde. Parfois, je m'imagine comme Atlas, qui doit supporter le poids du monde : excepté qu'au lieu du monde, le poids sur mon dos, c'est les attentes de mes proches.

J'ai emprunté un sweat gris à ma sœur, et il fait froid dehors. On est en décembre, le moment où il commence à faire zéro degré dehors et à neiger, et honnêtement, je suis glacé. J'essaie de ne pas y penser en me rendant à l'adresse de Thaïs. J'y suis déjà venu plein de fois, alors je commence à connaître par coeur où c'est.

En tapant le code, je songe au fait que je n'ai encore jamais vu la famille de Thaïs. Chaque fois, que je viens, ils sont au travail ou quelque chose du genre, et ça devient suspicieux, mais dès que je mets le sujet sur le tapis, Thaïs le détourne. C'est comme si le père et la mère de Thaïs étaient des fantômes.

Je frappe à la porte de son appartement et mon ami vient m'ouvrir. Il sourit en me voyant, et ça me réchauffe le corps plus que de raison.

— T'as pas froid, comme ça ? Demande-t-il en me dévisageant de haut en bas.

Voir Thaïs démaquillé, ça fait très bizarre. Non pas que je dise qu'il est moche démaquillé, pas du tout, il est tout aussi beau que maquillé. Seulement son maquillage est une part tellement importante de sa personnalité que je suis surpris de le voir sans, même en sachant qu'on va juste passer la journée dans sa chambre sans sortir.

— Si, j'ai un peu froid, j'avoue.

Thaïs attrape mon poignet et me pousse à l'intérieur. Il récupère un plaid sur son canapé et le pose sur mes épaules.

— On se regarde une série ? Demande-t-il.

— D'accord, dis-je en m'installant à côté de lui sur le canapé. Tu veux un bout du plaid ?

Il secoue la tête.

— Non t'inquiètes pas.

Je le fixe avec de gros yeux.

— Thaïs, fais un effort. C'est une excuse pour qu'on soit assis proches l'un de l'autre.

Je vois un sourire lentement se dessiner sur son visage, et j'ai l'impression de gagner une petite victoire, comme chaque fois que je le fais sourire.

— Dans ce cas, je ne vois pas de raison de refuser. Tu veux regarder quoi ?

On se colle l'un contre l'autre sous la couverture et je parcoure le programme Netflix.

— J'en sais rien moi, je regarde jamais de séries, j'ai pas le temps. T'as pas un truc bien queer ?

Thaïs sourit.

— Ça, je suis l'expert. (Il se tourne vers moi.) Deux choix : Heartstopper si tu veux un truc joyeux, Young Royals si tu veux un truc triste.

— Allez, brise moi le cœur.

On passe la matinée à regarder la série que Thaïs kiffe, et j'avoue, j'aime beaucoup aussi. On est collés l'un contre l'autre sous le plaid, et j'ai même pas chaud. Je sais pas pour lui, par contre, et ça me stresse un peu.

La cabane en haut de l'arbre | TERMINÉE Où les histoires vivent. Découvrez maintenant