fragment numéro 27

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« Un poème sur un phoenix. Il était la pire décision qu'elle ait pris jusqu'à présent, mais elle ne pouvait s'empêcher de la prendre encore et encore. »

Jours avant l'accident : 157.

Cent cinquante sept jours avant l'accident, je suis allongé sur le sol de la cabane, juste à côté de Thaïs, et on dessine ensemble les plans de nos mondes respectifs. Thaïs rajoute des créatures qu'il avait oublié la première fois, et moi je dessine encore et encore mes vêtements de roi dans l'espoir de réussir à leur rendre hommage ailleurs que dans mes rêves.

— À combien tu notes le mois dernier sur dix ? Finis-je par demander à Thaïs, parce que ça m'intéresse vraiment.

— Ça dépend dans quel sens tu me demandes de prendre la chose.

Je bascule sur le dos et hausse un sourcil tandis qu'il fait de même.

— Il y a plusieurs sens par lesquels prendre cette question ?

— Oh, oui ! Répond Thaïs. Disons que par exemple, j'ai envie de mettre dix parce que toi et moi on a passé du temps ensemble littéralement tous les jours, qu'on s'est embrassés et qu'on a fait des trucs que je ne m'imaginais jamais faire avec quelqu'un. Mais disons aussi que j'ai dû te voir pleurer et avoir mal à cause de ton père et de ta sœur, et que du coup j'ai envie de noter le mois 10. Si on suit cette logique, en vérité, je note ce mois à cinq, pour faire une moyenne. Sauf que cinq sous-entendrait qu'on a passé un mois moyen, alors que le mois n'était absolument pas moyen...

— Tu m'as complètement perdu, ris-je. Va pour cinq.

Quelques secondes de silence où je dessine tranquillement et Thaïs attrape sa guitare pour réviser la partition d'une musique qu'il apprend. Il a déplacé sa guitare et ses partitions dans la cabane, pour qu'il puisse y jouer pendant que je dessine ou que je lis ou qu'on parle.

— Thaïs, tu sais que t'es ultra populaire auprès des meufs ?

Il s'arrête de jouer pour me regarder.

— Tu racontes n'importe quoi Jonas, j'ai dû mettre genre, maximum deux râteaux pendant toutes mes années collège.

— Nan mais je te promets, tout à l'heure sur le groupe de la classe y'a Lilas qui parlait du fait que "si Thaïs n'était pas une pédale j'aurais trop voulu sortir avec lui".

— Je ne sais pas comment je devrais me sentir par rapport à ce message : flatté, ou offensé ?

— Je ne sais pas non plus, honnêtement. Mais genre, vraiment, même en sixième et en cinquième et en quatrième, j'entendais tout le temps des filles dire qu'elles auraient voulu sortir avec toi, ce genre de trucs. Quand on est devenus amis en troisième à cause de ça je pensais un peu que t'étais quelqu'un qui changeait de copine toutes les semaines.

— T'as déjà entendu parler de sentiments non réciproque, Jonas ? Rit-il. Heureusement qu'elles se sont pas déclarées, elles se seraient juste pris un râteau.

— Pourquoi ?

— La question c'est plutôt, pourquoi est-ce que je sortirais avec quelqu'un de qui je ne suis même pas amoureux ?

— Plein de gens font ça, surtout les hétéros. Ils apprennent à se connaître en espérant se plaire et développer des sentiments, enfin de ce que j'ai compris. Je crois que c'est le principe des rencards.

— Si tu veux mon avis, je trouve ça complètement idiot. En plus je suis sûr que toutes ses filles qui crushent hypothétiquement sur moi, c'est juste que ça leur donne envie, un copain qui pourrait faire des séances manucures et make-up avec elles, et avec qui elles pourraient jouer à la Barbie, parce que personne ne sait que je suis non-binaire, et par conséquent ça fait de moi le seul "mec" (Il mime des guillemets avec ses doigts) du bahut à être féminin. C'est pas une question d'apprécier ma personnalité ou quoi.

La cabane en haut de l'arbre | TERMINÉE Où les histoires vivent. Découvrez maintenant