Chapitre 34 - Dazai

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Je me lève sans bruit, en faisant attention à ne pas réveiller Chûya.
Je me prépare mais ne mange pas. Je n'ai pas faim. Certains jours sont plus difficiles que d'autres. Je vois mon ancien partenaire s'entraîner et je me souviens du regard agonisant de mes ennemis. On a tous des prédispositions pour quelque chose. Je me souviens de la petite Kiôka, qui avait un don inné pour le meurtre mais qui a choisi une autre voie. Ça n'a pas été facile pour elle, alors qu'elle n'avait tué que trente-cinq personnes. Seulement trente-cinq.

Imaginer Chûya rentrer chaque soir avec du sang sur les mains ne me plaît pas particulièrement. J'ai l'impression que cet univers m'appelle, me chuchote de le rejoindre à nouveau.

Pourtant je n'en ai aucune envie. La résilience ajoute quelque chose de plus doux, comme une crème cicatrisante sur mes blessures.

~

Quand je reviens à la maison, il est huit heures du soir et la nuit est déjà tombée. Chûya m'accueille d'un coup de poing dans le ventre.

- T'as pas répondu à mes messages.

Je grimace de douleur et me penche vers Vitalie, blottie dans les bras de Chûya.

- J'ai oublié, je réponds tranquillement.

- Ah oui ? Tu m'as oublié ? rétorque-t-il sur un ton furieux.

J'attrape délicatement Vitalie et la pose par terre, puis je prends les mains de mon petit ami dans les miennes pour les passer autour de ma taille.

- Je n'ai pensé qu'à toi, je souffle tendrement.

Chûya rougit, mais se dresse tout de même sur la pointe des pieds pour m'embrasser.

Je me demande à chaque fois si mon cœur ne va pas s'arrêter à force de battre aussi fort, mais ça n'est encore jamais arrivé.

Je porte Chûya dans mes bras jusqu'au canapé et m'y installe avec lui. Il s'allonge sur moi et pose sa tête contre ma poitrine.

- Alors ? Comment ça s'est passé ?

J'essaye de ne pas prêter attention à son corps près du mien pour pouvoir répondre :

- Tout est réglé. Je suis allé voir Mori et je lui ai expliqué la situation. Il n'y voit aucun problème, et mon patron est d'accord aussi, même si il a un peu râler à propos de ces jeunes qui ne savent pas se tenir.

- Tu rigoles ? Le Boss n'aurait jamais fait ça ! Un de ses capitaines sort avec un membre de l'Agence, et il n'y voit "aucun inconvénient"? Il aurait dû mettre une récompense sur ma tête, plutôt !

J'écarte une mèche de cheveux qui a glissé sur son front.

- Fais-moi confiance, d'accord ? Je m'en suis occupé.

- Je ne sais pas ce que tu as fait, et je crois que je ne veux pas savoir, marmonne Chûya en soupirant.

Mon sourire cruel le convainc de ne plus poser de questions à ce sujet.

On mange en discutant de tout et de rien. Chûya a fini hier d'installer ses affaires chez moi. Ça change tout. J'ai l'impression de ne plus vivre au même endroit.

Comme si je n'étais plus tout à fait la même personne.


{Soukoku} Seul un diamant peut en polir un autreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant