Vous devez tous les connaître, ces sensations qu'on a après avoir vomi. Le goût amer dans la bouche ; les yeux et le nez qui piquent ; la peur ne serait-ce d'avaler sa salive ; le corps qui tremble, n'osant pas faire un seul mouvement.
On se sent sale, on se sent faible, on se sent mal.
Elwina avait nettoyé les toilettes, elle les avait désinfectés encore et encore, telle une forcenée, jusqu'à ce que l'odeur agressive des produits ménagers l'oblige à s'arrêter. Puis, elle s'était brossé les dents. Trois fois, et pourtant, ça ne lui avait pas paru assez. Elle s'était lavé le visage, trois fois aussi. Et les mains, le même nombre. Ses pauvres mains qui tremblaient toujours autant, et qu'elle avait fourrées au fin fond de la poche centrale de son sweat.
La jeune femme était ensuite redescendue jusqu'à la salle à manger, se rasseyant discrètement à table avec un petit sourire penaud.
Mais rien que se retrouver dans la même pièce qu'eux lui fit remonter la bile à la gorge.
Elle n'avait jamais vomi de peur, avant. En fait, elle ne savait même pas que c'était possible.
Heureusement pour elle, la brunette travaillait cet après-midi, et usa donc de cette excuse pour partir à la bibliothèque bien plus tôt que prévu. Elle arriva avant Berhed elle-même. Et partit après, restant comme une idiote cachée derrière une rangée de livres, faisant tout son possible pour ne pas exploser.
Exploser comment, d'ailleurs ? En sanglots, de rage, de peur. Il n'y avait que les horribles émotions qui semblaient avoir le mérite de pouvoir exploser.
— Bien le bonsoir.
La jeune femme sursauta si violemment qu'elle serait tombée à la renverse, si Poséidon ne l'avait pas rattrapée au dernier moment par le poignet. Elle se détacha de son emprise, et chancela un peu avant de retrouver son équilibre.
— Tu as l'air... en alerte.
— Juste fatiguée. Mentit-elle tout en reculant d'un pas, pour mettre une distance respectable entre eux deux. Elle n'avait pas vu l'homme depuis un bon bout de temps, et il ne lui avait pas manqué plus que ça. La jeune femme se souvint qu'elle avait fait une peinture de lui.
— Alors, ton boulot, ça se passe bien ?
— Je suis contente.
Et ça, pour le coup, c'était la vérité. Le brun sembla le sentir, car il lui sourit sincèrement :
— En fait, tu as fait mon portrait ?
— Oui.
Elwina écarquilla les yeux à la seconde où les mots franchirent sa bouche. Qu'est-ce qui lui avait pris de dire ça ? Son interlocuteur afficha un air fier :
— Montre-moi.
— Il est dans ma chambre...
— Je te raccompagne.
— Non !
Le visage de Poséidon se crispa. Sa colère se sentait à plein nez, et il fit un pas vers elle, de manière presque menaçante. Pourtant, il ne lui faisait pas peur. Ou du moins, pas peur comme les De Fleurie lui faisaient peur : de manière si profonde et intrinsèque qu'elle donnait envie de se jeter par la fenêtre.
— Nous ne nous entendons pas, je sais. Les pêcheurs et les fermiers, ajouta-t-il en souriant. Mais la rue n'est par privatisée, que je sache : je t'attendrai dehors.
— Ils ont du monde à la maison. La famille de Daniel.
— Intéressant... Lui avait-il répondu avec un regard provocateur, pour ensuite commencer à marcher sur le trottoir :
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La malédiction des chats noirs
ParanormaalBizarre. Misanthrope. Asociale. Introvertie. Et toujours accompagnée d'un chat noir qui semble se volatiliser par intermittence. Voilà comment l'on décrirait Elwina. Maudite. Seule. Voilà comme elle-même se décrirait. En arrivant à Kerdoueziou, u...