Attention ce livre est destiné à un public averti. Il contient des scènes de violence, de torture, de sexe, et de viols. Certaines d'entre elles, peuvent heurter la sensibilité. Je suis responsable de tout ce que j'écris même si je ne le cautionne pas. Ceci est une fiction et doit être perçue comme cela. Toute reproduction est interdite même partiellement. Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existé serait purement fortuite.
J'entends la porte claquer, ça y est, il vient de rentrer. Ses pas lourds résonnent sur le plancher, comment va-t-il être aujourd'hui de bonne ou mauvaise humeur ? Si c'est la deuxième réponse, alors je vais encore en prendre plein la tête ou le corps plutôt.
— Luna ! Amène ton cul ici bordel de merde !
C'est la deuxième réponse...
— Qu'est-ce que tu fous bordel ! J't'ai dit de venir ici ! MAINTENANT !
Je n'ai plus le choix, ne pas y aller, risquerait de me couter beaucoup plus cher. J'avance pieds nus dans ce couloir sombre. Les murs de frondes* ont par endroit des taches ou des impacts. Taches de vomi, de sang, de débauche.... Impacts de colère faits par le tranchant d'une lame ou par des coups tout simplement, comme ma tête projetée dans ces murs de bois. Ces cloisons faites des mêmes essences sont dures, pas comme mon crâne. Les micro chocs les recouvrant, n'en altèrent pas leur solidité. Ce sont des malocas*, des maisons faites en bois. La couverture est soutenue par des stipes* de palmiers. Des solives* sont attachées à ces piliers par des lianes résistantes. Des palmes disposées d'une façon régulière, recouvrent la charpente. Quant aux murailles, elles sont faites de bambous ou d'éclats de frondes de palmiers. Ce clayonnage est tellement fort, qu'il est à l'épreuve des balles. À l'intérieur une rangée de cellules séparées les unes des autres, par un clayonnage analogue à celui de la muraille, définie les espaces comme les chambres, le coin repas et cætera.
— Luna ! j'vais v'nir te chercher par la peau du cul si tu t'ramènes pas de suite !
Ça y est, je suis à l'entrée de la cuisine. Je le vois debout, près de la gazinière, le regard noir et trouble, il a consommé, j'en étais sûre, mais ce n'est pas de l'alcool qui coule dans ses veines, c'est de la cocaïne, la poudre la plus destructrice !
— Oui père ?
— Qu'est-ce que t'as branlé ! Y'a rien à bouffer dans cette baraque !
— Il... n'est... que... cinq heures... père... c'est le matin...
— ... tu me prends pour un con ! c'est ça ? Tu te fous de ma gueule ! Tu crois que je ne sais plus distinguer le matin, du soir ? Hein ? c'est ça que tu es en train d'insinuer ?
— Non... je pensais...
— ... j'te demande pas de penser ! juste de bosser espèce d'imbécile ! Qu'est ce qui m'a foutu une fille aussi conne ! Juste bonne à récurer les chiottes !
C'est reparti, je vais avoir droit à tout un tas d'injures, il va me dire que je suis une sale traînée, que ma mère a engendré un déchet, que je ne suis pas digne de porter son nom. Comme mes silences seront pesants, il finira par me frapper. Si j'ai de la chance, je n'aurais qu'une côte ou deux de fêlées, si je n'en ai pas, ce sera une fracture.
— Réponds moi bordel ! Qu'est ce qui m'a foutu une sale petite trainée sous mon toit ! J'ai faim, alors magne toi de me faire à bouffer !
En deux pas, il est sur moi. Il m'attrape par les cheveux, me trainant jusque devant les fourneaux, baissant mon visage vers la plaque qu'il vient d'allumer, une autre de ses idées, me défigurer. Je pose mes mains de chaque côté de la gazinière, opposant une résistance contre la force qu'il utilise pour me faire ployer. Je sens que la chaleur diffusée par cette plaque, augmente dangereusement, je suis terrifiée à l'idée d'être brûlée alors dans un ultime combat, je déploie toute mon énergie dans une dernière poussée en criant ma détresse.
— Pitié père... je vais vous faire à manger... je m'y mets de suite... je vais le faire...
— C'est trop tard espèce de sale garce ! Tu m'as mis en colère ! Je n'ai plus faim !
Il me propulse contre la table de la cuisine. Je prends l'angle dans l'arcade et vois quelques étoiles. Pas le temps de m'appesantir sur cette douleur qu'une autre bien plus forte m'atteint alors que je suis encore à genoux sur le sol. Un coup de pied dans le ventre, celui-ci me coupant le souffle, me faisant vomir de la bile sur le sol.
— C'est pas ta mère qu'aurait dû crever, c'est toi ! Elle au moins me rapportait du fric, toi, tu m'apportes que des emmerdes !
Une autre pluie de coups vient frapper mon flanc, je me mets en boule attendant que l'orage passe. Je protège ma tête, elle en a assez pris pour aujourd'hui.
— Dire qu'il faut que je te nourrisse alors que tu ne m'rapportes rien, mais ça va changer ! Je vais te foutre sur le trottoir pour que tu puisses faire le bonheur des touristes et de mon portefeuille !
— Quoi ? Non père... par pitié... pas ça...
— FERME TA PUTAIN DE GUEULE !
Il va pour me frapper de nouveau mais son portable sonne, arrêtant pour un instant ce déferlement de violence. J'en profite pour me réfugier dans ma chambre. Je me laisse glisser le long de la cloison, les genoux repliés contre mon corps, mon menton posé sur ces derniers. Je suis dans un coin du mur, à la tête de mon lit, seul endroit qui n'est pas baigné par la lumière et je laisse mes larmes couler. Ma mère me manque, elle seule pouvait l'arrêter mais voilà, elle est décédée alors que je n'avais que douze ans, avant que mon père ait sa société de transport de bœufs truffés de cocaïne. Elle était une mule* pour le cartel El Greco, mais un sachet a percé dans son estomac, lui provoquant une overdose. Mon père a perdu sa femme ainsi qu'une rentrée d'argent. Moi j'ai perdu ma mère et ma liberté. Je pourrais partir me direz-vous, mais ici dans ce petit village de Puerto Nariño, il n'y a pas de véhicules, pas de scooters, tout se fait en pirogue, ou alors il faut se réfugier dans la forêt amazonienne. Mais est-ce vraiment un refuge, quand on sait tous les dangers qu'elle renferme ?
Ma mère m'a appris le nom de certaines plantes et leurs pouvoirs, elle m'a appris à ne pas m'aventurer dans la forêt sans un équipement digne de ce nom. Un équipement regroupant hamac, moustiquaire, machette, pierre de feu, petit contenant en métal, gourde, un petit pochon de sel, mais aussi vêtements longs, larges et antimoustique. J'ai ajouté au fur et à mesure des années des petites choses, comme des bouts de ficelle, du fil de fer, des bandes pour se soigner... et bien encore d'autres objets. C'est vraiment la caverne d'Ali baba. A chaque fois que ma mère m'emmenait dans la jungle pour y passer quelques heures, à chaque fois, je me disais qu'il serait bien de rajouter telle ou telle chose. Cela la faisait rire, elle disait que mon sac serait trop lourd à porter si je ne cessais de le remplir. Ce dernier est dissimulé sous mon lit, espérant avoir le courage de me lancer dans cette jungle hostile.
— Quoi ? Putain de merde ! C'est pas vrai ! Il va me tuer !
J'entends mon père hurler au téléphone, les nouvelles n'ont pas l'air d'être très bonnes à ce que j'entends. Si ce qu'il dit est vrai, alors pour moi, ce serait peut-être ma chance de vivre enfin tranquille, sans un bourreau quotidien à mes côtés.
— Je serai là à vingt heures ! rassemble-moi ceux qui se sont fait piquer la cargaison ! Je veux tous les détails.
J'entends ses pas s'éloigner, la porte claquer... quelques heures de répit avant une nouvelle tempête qui changera ma vie à jamais...
Lexique :
* Frondes : La fronde désigne l'organe végétal qui joue le rôle de feuille chez certaines plantes telles que palmiers et fougères.
* Maloca : maison traditionnelle des communautés indigènes en bois.
*stipes : Le stipe (ou faux-tronc) est, en botanique, la tige robuste de plantes terrestres comme les palmiers, les yuccas, les dragonniers, les fougères arborescentes ou encore les bananiers.
* Solives : Une solive est une pièce de charpente placée horizontalement en appui sur les murs ou sur les poutres pour constituer le plancher d'une pièce.
* Une mule ou un coursier est unepersonne qui fait passer personnellement de la contrebande à travers unefrontière pour une organisation de contrebande.
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Amazon Devil's ( En réécriture)
Ficción GeneralLuna, un prénom que ma mère m'a donné et qui signifie heureuse en hawaïen, heureuse je l'étais avant que ma mère ne meurt d'une overdose. C'était la mule du Cartel El Greco, sa mort a signé la mienne mais ce ne sera pas une mort douce, on me réserve...