TW : language grossier
Ash ne savait pas quoi faire. Il était perdu. Il redescendit, cherchant conseil auprès de Ten. Celui-ci semblait avoir inspecté toutes les chambres. Sa mine, et surtout ses mains vides, affichaient clairement qu'il n'avait rien trouvé. Les servantes avaient aussi changé de chambre. Ason venait de monter les escaliers. Lui non plus n'avait rien trouvé. Ash ne pouvait y croire. Où était l'argent ? Ils n'allaient tout de même pas repartir les mains vides, si ?
Par précaution, et surtout parce qu'il ne savait pas quoi faire d'autre, Ash inspecta les chambres de l'étage à son tour. Ason fit de même, pendant que Ten rangeait l'escalier du grenier. Ason était plus rapide qu'Ash, il avait fouillé toutes les pièces en à peine une minute, sans succès. Ash fit de même.
Première pièce : rien. Deuxième pièce : rien non plus. Troisième pièce : rien...
Ou plutôt...
Ash, qui allait quitter la chambre, se retourna encore une fois, croyant avoir aperçu quelque chose...
Ce matelas était un peu bizarre, non ? Ash avait l'impression qu'un côté du matelas était un peu plus haut que l'autre. Enfin ce n'était peut-être qu'une impression. C'était à peine visible, si bien qu'Ash lui-même n'était pas sûr de ce qu'il avait entraperçu.
Il déplaça les oreillers, il n'y avait rien en dessous. Il enleva alors la couverture, puis le drap, toujours rien. Pourtant le problème persistait. Ash souleva alors un côté du matelas. Il avait enfin trouvé.
Du bois blanc. Celui dont la Banque Royale possédait le monopole, qu'elle découpait en fines plaquettes sur lesquelles elle gravait des sommes, et qu'elle échangeait aux plus riches contre une poignée de pièce correspondant à la somme en question. Des billets de bois.
Une couche incomplète de billets de bois de mille nui s'étalait sur une autre parfaitement répartie sous le matelas.
Ten et Ason s'invitèrent dans la chambre en fermant la porte, semblant se cacher des servantes. Voyant les billets, ils aidèrent Ash à déplacer l'immense matelas. « Bravo ! » fit Ten à voix basse. Ash avait trouvé le trésor qu'ils cherchaient.
Ash, Ten et Ason commencèrent à mettre tous ces billets dans les sacs, Ason se réservant le sac le plus lourd. Au fur et à mesure qu'ils enlevaient les billets de bois de leur place, ils découvraient une troisième couche enfouie sous la seconde. A vue d'œil, il devait bien avoir cent, peut-être deux-cent mille nui. Un véritable trésor.
Les trois voleurs se dépêchèrent de tout mettre dans leurs sacs, puis ils remirent le matelas, les draps et les oreillers en place.
Ils se tournèrent vers la porte, mais soudain ils entendirent les deux servantes se rapprocher. Mince ! Ils allaient être découverts ! Il ne fallait surtout pas que ça arrive.
Sans l'ombre d'une hésitation, Ten se cacha sous le lit. Celui-ci était bien assez grand pour eux deux, alors Ash fit de même. Cependant la carrure imposante d'Ason l'empêchait de les suivre. Il se retrancha donc sur l'armoire dont il ferma la porte à peine une demi-seconde avant que les servantes ouvrent celle de la chambre. A peine entrée, l'une d'elle râla :
— Sérieusement, ils pourraient faire un effort, regarde-moi ce lit ! Ils pourraient au moins nous éviter d'arranger leurs draps puants !
— De quoi tu te plains ? Rétorqua l'autre. On est payées pour ça.
— Mon cul, on n'est même pas payées, on est juste nourries et logées comme des animaux de compagnie. On bouffe leurs restes et en plus on n'a même pas de chambre à nous, je suis obligée de supporter tes ronflements toutes les nuits !
— De quoi tu parles, rigola l'autre, c'est toi qui ronfle !
— Même pas, fit la première. Et regarde-moi ces fringues, ils pourraient au moins nous les donner pour qu'on les lave, au lieu de les laisser pourrir ici !
— Ouais, tu m'étonnes que ça pue, ici !
Elles s'arrêtèrent de parler un instant, l'une refaisait le lit, et l'autre passait le balai. D'ailleurs il passait un peu trop près d'Ash à son goût. Son cœur battait la chamade. Il commençait à suffoquer sous son manteau, et il avait tellement peur de se faire remarquer qu'il se retenait de respirer. Ten, à côté de lui, semblait en faire de même. Puis les deux servantes reprirent leur conversation :
— Tu penses qu'ils vont voir, si je mets la poussière sous le lit ? Fit celle qui nettoyait le sol.
— Tu exagères ! Fais au moins le travail correctement, fit l'autre, amusée.
— Pourquoi ? Ce n'est même pas à moi de faire ça, je te signale ! Tout ça c'est à cause de Gina.
— Et puis quoi ? Tu vas te plaindre à elle ? Tu vas lui dire « Arrête de tomber malade, ça me rajoute du boulot. » ?
— Ouais, exactement ! Répondit l'autre. »
Elles continuaient de parler... De vraies pipelettes. N'arrêtaient-elles donc jamais de piailler ? Ash avait envie de sortir de sa cachette pour leur dire de se taire. Celle qui nettoyait les sols avait décidé de mettre toute la poussière sous le lit. Ash en reçut dans les yeux et les narines, il eut une forte envie d'éternuer, mais dut se retenir tant bien que mal.
Au bout d'une dizaine de minutes, les deux servantes semblaient avoir terminé leur travail dans cette chambre. Par chance, elles n'avaient pas remarqué leur présence.
De là où il était, Ash voyait leurs pieds se diriger vers la porte. Ils attendirent quelques secondes, le temps qu'elles se rendent dans la pièce suivante, puis sortirent de leur cachette respective.
Sans un mot, sans même prendre le temps de retrouver leur souffle après l'avoir tant retenu, ils sortirent de la chambre, leurs sacs sur leur dos, et prirent la direction des escaliers.
Ils pouvaient enfin rentrer.
Ils descendirent quelques marches, victorieux. Mais soudain, la porte d'entrée s'ouvrit. Deux personnes entrèrent. Un homme et une femme, tous deux très élégants.
C'étaient les Asghint. Ils étaient rentrés plus tôt que prévu.
L'homme leva la tête dans leur direction. En voyant les sacs sur leur dos, il comprit tout de suite. « Fumiers ! » cria-t-il avec une fureur qui faisait trembler le sol. Il se précipita dans les escaliers à leur poursuite. « Venez », fit Ason, en s'engouffrant dans la chambre d'où ils sortaient.
Le bruit avait alerté les servantes, qui étaient sorties dans le couloir.
Ason tira les rideaux, ouvrit la grande fenêtre et sauta sans hésiter. Ash, effaré, passa la tête dehors. Il vit Ason sain et sauf en bas, la neige avait amorti sa chute. Il leur faisait signe de descendre vite. Ten prit un peu d'élan, puis le suivit. Mais Ash hésitait, il avait beaucoup trop peur ! Ason lui cria : « Fais-moi confiance, je te rattrape !». Mais Ash était toujours effrayé, c'était trop risqué pour lui ! Il regarda par la fenêtre encore un peu, puis se décida finalement à y aller.
Il recula pour prendre de l'élan, comme Ten, mais des bras s'agrippèrent à lui par derrière et le stoppèrent. C'était monsieur Asghint, Ash avait trop trainé. Il lui avait enlevé la capuche et l'écharpe qui cachaient son visage. Ash tenta de se débattre sous les insultes de l'homme, mais il n'arrivait pas à s'enfuir.
Finalement, il décocha un violent coup de tête dans le nez de son assaillant, qui le lâcha et recula en titubant, puis sans réfléchir, Ash se jeta de la fenêtre.
Le sol se rapprochait, il se rapprochait dangereusement. Ash ferma les yeux un instant, puis quand il les ouvrit, il vit qu'Ason l'avait effectivement rattrapé dans sa chute. Décidément, Ash lui en devait une ! Mais il n'eut pas le temps de dire merci, ils couraient tous les trois en direction du grillage. Bizarrement, cette fois-ci, Ash n'eut aucun mal à escalader la grille. Sûrement à cause de l'adrénaline.
Ason, Ten et Ash coururent aussi vite que leurs jambes leur permettaient afin d'échapper à la colère de l'homme qu'ils venaient de voler. Ash pensait qu'une fois que ce serait fini, il n'y aurait plus à avoir peur. Le moins qu'on puisse dire, c'est que c'était mal parti. Monsieur Asghint avait vu son visage. Ash s'était mis à dos l'un des hommes les plus puissants de la ville.
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Crowns / 1. Sous la neige
AdventureTreize ans après la fin d'une guerre sanglante, la vie à Athelcor est toujours difficile, sous le joug d'un roi impitoyable. Lorsque le père d'Ash est exécuté pour des soucis d'argent, ce dernier se retrouve perdu. Il rencontre un groupe de rebelles...