8. Jack

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Point de vue de Jack

Je ressens encore des coups de marteau dans ma tête suite au maléfice de cette sorcière, mais je devais arrêter ma lanterne. Heureusement, elle n'a pas eu le temps de faire du mal à Andreia, mais je sens sa peur m'effleurer.

En fait, la sorcière est terrorisée et elle ne tente même pas de le cacher. Je ressens ses émotions et ça se répercute dans ce maudit lien magique comme une vibration presque douloureuse. Toucher à un fil de 240 volts et ça, c'est sensiblement pareil et je déconseille fortement à essayer.

Au moins, mon bras recommence à me répondre.

Je souffle un coup avant de tendre la main pour toucher mon amie. Les flammes lèchent ma peau et elle me lance un regard. Derrière la haine, je peux voir les larmes qu'elle retient. Elle sait que je la gronde lorsqu'elle pleure, parce que ça sent le brûlé là où les gouttes de lumières tombent. Je lui souris, mais un sourire que seule elle a le droit et je contemple sa colère fondre en tristesse. Elle reprend sa forme de lanterne et je l'entends sangloter pour moi. Elle lévite pour se réfugier entre mes bras.

Ne me chicane pas !

— Mais non, je ne vais pas te chicaner, la rassuré-je en caressant délicatement la structure rouge-orangé. Par contre, tu as donné une trouille bleu à Andreia.

Mais elle t'a fait mal ! Je l'ai vu ! Je l'ai senti !

Je grimace légèrement alors que sa voix part dans les aigus, mais je continue de l'apaiser. Ma lanterne continue de sangloter, se lamente sur la sorcière, sur moi et même sur un sac qui fait un peu trop de bruit non loin de nous. Je lui répète que je vais bien, que je n'ai pas mal et j'en profite pour remplir son réservoir d'alcool, ça l'aide à se détendre. La lumière troublée au départ commence à devenir calme et je commence à l'entendre marmonner. Je me mets à rire en sachant qu'elle va s'endormir ; ça lui apprendra à monter sur ses grands chevaux avec le réservoir vide, mais j'apprécie sincèrement son geste. Elle est gentille, soupe-au-lait, dévouée et bête, mais je tiens à elle. Lorsque je me suis trouvé seul, sans aucun endroit pour me reposer, seule elle m'a ouvert sa porte. Elle a veillé sur mon sommeil, elle m'a protégé des brigands et des bêtes dans la nuit. Elle a été la gardienne de mes rêves et de mes nuits, la seule à toujours prendre des risques pour moi, même si cela a signifié se liguer contre les siens.

Elle a été l'exception à ma règle de ne faire confiance à personne, elle est mon trésor le plus précieux.

— Tu peux dormir, je veille sur nous cette fois.

Un marmonnement me répond et j'entends le ronflement unique de ma lanterne. Ça ressemble vaguement au bruit d'un moteur diesel en bonne santé, mais je trouve ça mignon à ma façon. Je l'accroche à la ganse à main de mon sac et j'accorde enfin un regard à la sorcière. Elle est toujours au sol, sous le choc.

— Ton dildo s'est mis en marche tout seul ou quoi ? la narguer-je dans une tentative de détendre l'atmosphère.

Tentative échouée, on dirait qu'elle ne m'a pas entendue. Ses yeux me rappellent légèrement des merlans frits, mais je me réserve ce commentaire. Je crois qu'elle a eu sa leçon pour aujourd'hui, elle me fait presque pitié. Je ne crois pas que d'autres auraient mieux fait qu'elle en pareille situation.

Je laisse tomber la tentative d'humour et je lui dis :

— Je suis peut-être ton prisonnier, mais je ne suis pas sans défense, sorcière. Allez, lève-toi.

Je tends ma main pour l'aider à se lever, mais elle louche simplement dessus. J'attends, mais elle se contente de déglutir avant de se lever toute seule. Je lève les yeux au ciel en soupirant ; j'ai presque oublié qu'elle m'énerve royalement. Mes mains suivent le même trajet que mes yeux, agacée par cette chipie de sorcière. Si ce n'était pas une question de maléfice qui m'entrave à elle, je la laisserai finalement dans cette ruelle.

On peut me rappeler pourquoi je voulais être gentil ?

Je jette un œil au nouveau tatouage, gracieuseté d'Andreia. Je ne l'ai pas remarqué sur le coup à cause de mes autres tatouages, mais maintenant je le distingue au premier coup d'œil. Le dessin fait de rouge et de noir a un style semi-tribal, semi-géométrique et elle s'enroule le long de mon avant-bras entre les autres dessins gravés sur ma peau. Lorsque Andreia active sa magie, j'ai l'impression qu'une corde d'acier s'imprime dans ma peau dans l'intention de me couper l'avant-bras ; j'ai aussi des sales douleurs qui m'envahissent si je m'éloigne trop d'elle. De la perte de vue aux engourdissements en passant par la migraine, son maléfice est aussi puissant que handicapant ; meilleure méthode pour dissuader.

Un mouvement me ramène les pieds sur terre et je lance un regard belliqueux à Andreia. Celle-ci me fixe, son regard indéchiffrable tant d'émotions y succèdent, mais je crois y lire de la culpabilité. Qu'elle vit ses émotions, j'en ai rien à cirer, elle aurait dû y penser avant de jouer la carte du sadisme sans aucune considération pour autre chose que sa personne. Je n'essaie même pas de cacher ma grimace de dégoût pour elle et je grince avec un mépris non dissimulé :

— On attend après quelqu'un ou on peut se tirer, concubine ?

J'ignore si ma remarque l'a blessée, mais je l'espère. Andreia essaie de montrer une façade impassible, mais elle est encore chamboulée par l'intervention de ma lanterne. Elle secoue sa tête et elle me répondit d'un ton vague :

— Non, on peut partir.

Je fronce les sourcils en ne la voyant pas bouger. Où voulait-elle qu'on aille si on ne bougeait pas d'ici ? C'est là que, sous mes yeux, je l'observe faire, devenant à mon tour un merlan frit.

— Mais qui es-tu ? m'exclamé-je, ahuri. 

°°°

Coucou ! Ce début de chapitre, je voulais savoir, comment l'avez-vous trouvé ? Je voulais rendre ce moment touchant, montrer comment l'amour de Lanterne pouvait se manifester par une terrifiante violence, mais surtout, toute l'importance de Jack aux yeux de sa Lanterne.

Mais vous, qu'avez-vous pensé ?

Ô ! Lanterne, c'est pas le temps de me lâcherOù les histoires vivent. Découvrez maintenant