Tous nos dérapages

8 - Une pièce manquante du puzzle de ma vie

Après cette rencontre inattendue avec Pierre, la semaine s'enchaîne à une allure folle, comme si elle tentait de rattraper le temps perdu. Je reprends mon travail au casino, comme si cette rencontre n'était qu'un lointain souvenir que je devais oublier pour revenir à ma routine habituelle.

Les nuits au casino s'étirent en longueur, et je me retrouve à faire toutes les fermetures, veillant jusqu'à cinq heures du matin. Les jeux, les lumières vives, les visages impassibles des joueurs, tout se mélange dans une toile complexe de distractions et d'illusion. Les heures passent lentement, et l'épuisement s'installe. Parfois, pendant mes pauses, je repense à cette journée ensoleillée à Monaco, à la rencontre fortuite avec Pierre. C'est comme si c'était une réalité parallèle à ma vie quotidienne.

Ce soir-là, au casino, l'ambiance est différente des soirées lors du Grand Prix qui a secoué la ville de Monaco. C'est un soir calme, sans l'effervescence des touristes et des amateurs de Formule 1. Je travaille derrière le bar avec Victor qui a rapidement compris que je n'étais pas au meilleur de ma forme, bien que cela semble être ma condition habituelle.

Victor, de nature empathique et humain, est déterminé à me changer les idées. Il me raconte des anecdotes amusantes sur son enfance, des histoires de bêtises qu'il a faites avec ses amis, des aventures en pleine nature. Ses récits me tirent un sourire, et je lui en suis reconnaissante. Même si je ne peux pas oublier complètement la fatigue qui pèse sur moi, ces moments de légèreté sont les bienvenus.

Pendant que je m'occupe derrière le bar, je pense à Pierre. Je me demande s'il va bien, s'il est en train de préparer la prochaine course, si la pression ne le submerge pas. J'espère simplement qu'il est en sécurité et en bonne santé. Mon cœur se serre en pensant à lui, mais je me dis que c'est tout ce que je peux faire pour lui depuis ma position modeste.

Alors que la nuit avance lentement au casino, je m'efforce de préparer rapidement les cocktails demandés par les clients. Mes gestes sont devenus presque automatiques à force de répétition, et cela me permet de garder un semblant de concentration malgré la fatigue qui me gagne peu à peu.

Soudain, alors que je prépare un mojito, je l'aperçois : Steven. Il débarque dans le casino, comme à son habitude, et se dirige immédiatement vers le bar. J'aurais dû me douter qu'il reviendrait. Steven est un client régulier, à qui il ne faut apparemment rien refuser... Il est lourd, insistant, et il ne semble pas comprendre les limites de la politesse. Je soupire intérieurement en le voyant s'approcher, sachant que je vais devoir gérer sa présence de la manière la plus professionnelle possible. Pas de débordement, cette fois-ci. Et pas de danse non plus.

Il s'installe sur l'un des tabourets, me lançant un regard lubrique qui me fait presque frissonner de dégoût. Malgré mon expérience dans ce milieu, certains clients parviennent toujours à me mettre mal à l'aise. Steven ne tarde pas à entamer la conversation d'une manière qui ne laisse aucun doute sur ses intentions.

- Salut, beauté. Tu sais, t'es vraiment la plus jolie des serveuses ici, me dit-il avec un sourire suggestif.

Je lui réponds poliment, mais de manière réservée, en espérant qu'il comprendra que je ne suis pas intéressée par ses avances. J'ai toujours préféré garder mes interactions au casino professionnelles, mais certains clients persistent à ne pas respecter cette frontière. La nuit promet d'être longue avec Steven à mes côtés.

Victor remarque immédiatement la présence de Steven et ne le quitte pas des yeux. Il connaît bien le personnage, tout comme les autres employés du casino. C'est l'un de ces clients qui pense que sa générosité en pourboires lui donne tous les droits, même les plus intrusifs.