CHAPITRE 33

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Victor

Musique : (en cours de réflexion)

23 h, Loft de Simon, Monte-Carlo.

— Je sais, soupiré-je en pinçant l'arête de mon nez. Oui... je vais passer par mademoiselle Mesnil... Non, pour l'instant nous n'avons rien trouvé...

Mon interlocuteur me réprimande, je serre les dents et jette une œillade en direction de Simon qui tire sur sa troisième clope de la dernière demi-heure.

Je vais m'en occuper, concédé-je, reste-t-il tout de même de surveillance?

L'homme se tait, expire longuement, ma bouche se tord d'inquiétude. Si Simon perd la surveillance, je ne pourrais plus garder le contrôle sur Simon et avec ses démons bien éveillés, je ne donne pas cher de sa liberté. Je ne le supporterai pas si on l'enferme à nouveau. Quand l'appelant se décide à reprendre la parole, je réalise que mon cœur s'était arrêté de battre. Le soulagement m'arrache un long souffle douloureux. Je le remercie, raccroche puis dépose mon portable sur la table basse.

Je me frotte le visage et lâche un grognement de frustration. Si j'avais conscience depuis le départ que nous devrions utiliser des chemins de traverse dans cette histoire, je ne pensais pas qu'il suffirait de quelques semaines à peine pour que tout parte à vau-l'eau. Je n'ai aucune prise sur Elaïa, Roxanne est un problème plus conséquent que je ne l'avais envisagé et Simon... Simon perd pied et coule trop vite.

J'inspire à pleins poumons et rejoins mon meilleur ami sur la terrasse où ses mégots s'entassent. Je m'installe sur le fauteuil à ses côtés et attrape une clope. Je ne suis pas un grand fumeur mais ce soir, j'aurais clairement besoin d'une bonne cuite, une bonne baise et un paquet entier de clopes.

Je tire une première latte et observe la fumée se mélanger à l'air.

J'ai plusieurs questions mais je sais d'avance que les réponses ne me plairont pas.

Oui, je la suivais hors des horaires de surveillance, réplique-t-il sans chercher à manipuler la vérité. Oui, j'avais envie de les tuer pour ce qu'ils étaient en train de lui faire. Oui, je l'ai rappelée et-

Il s'arrête et mes lèvres se pincent, je suis bien trop conscient de ce qu'il va dire.

Et oui, bafouille-t-il, la tête baissée, je l'ai approché alors que je t'avais promis de ne plus le faire.

Simon, grondé-je, j'ai dû faire des pieds et des mains pour que tu restes de surveillance, tu as grillé tous tes jokers. La prochaine fois que ça dérapera, tu seras sur la touche.

Je soupire et me tourner de trois quarts sur mon fauteuil.

Fini, Simon, insisté-je, ça sera terminé, tu ne pourras plus rien faire. Ni m'aider, ni la protéger, ni le-

Je déglutis, les mots peinent à sortir, il évite toujours mon regard mais je le sens, ça le détruit.

Et c'est ainsi que les démons gagnent, chuchote-t-il, encore.

Non, Simon! Non! Pas cette fois, ils ne gagneront pas.

Tu sais, je n'ai pas menti. J'avais vraiment l'intention de ne plus l'appeler et de ne plus l'approcher.

Je te crois mais tu connais les règles et les conséquences si tu ne les respectes pas.

Sa moue boudeuse a le mérite de détendre l'atmosphère. Simon a peut-être vingt-huit ans, il n'a rien d'un adulte dans ces moments. En revanche à la différence des caprices enfantins, mon meilleur ami a des obsessions totalement destructrices. S'il essaye de s'en défaire, les traumatismes et les démons sont plus forts, trop forts. D'autant plus que ces derniers mois, j'alimente sa décadence. J'ai vu et revu les conditions ainsi que les règles de sa présence à mes côtés avant qu'on entame le processus de surveillance. Si nous n'avons pas minimisé les conséquences de son action, la réalité est que nous n'avions peut-être pas assez conscience du chaos dans sa tête. Après tout, si Simon tente de comprendre les émotions malgré ses importantes lacunes, il reste profondément secret excepté quand tout explose et que l'enfer gagne. Qu'elle gagne.

Sous Le Masque Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant