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Chan fulminait, et je devais l'avouer, avoir un peu de vengeance après ses petites blagues nulles me faisait du bien.

Je savais qu'il n'aimait pas me savoir trop proche d'Eunwoo, alors il se pouvait que je devienne soudainement hilare ou très intéressé quand je marchais avec lui devant l'accueil de l'établissement.

« Tu fais exprès, avoue. »

J'avoue, mais c'était simplement justice face à tous les tourments qu'il me causait.

« De quoi tu parles ? Je suis à un déjeuner important là. »

Pas de réponse.

Bordel jamais je n'allais arriver à l'oublier, déjà que ça me paraissait difficile, désormais c'était mission impossible.

L'homme dont je rêvais nuit et jour travaillait quelques étages en dessous de moi, nous étions forcés de ne pas être ensemble et pourtant, il semblait trouver du plaisir à me torturer en me draguant presque ouvertement, bien qu'il avait acheté son billet pour repartir en Australie dans quatre mois et trois semaines. C'était injuste.

Je rêvais de pouvoir lui sauter dessus mais déjà, c'était inapproprié au travail et en plus, je refusais de perdre à nouveau mon travail pour un homme qui allait quitter le continent dans quelques mois. Je devais rester fort, je ne devais pas succomber, tous mes efforts n'étaient pas vains. Plus que quelques semaines et je pourrais définitivement tirer un trait sur notre histoire, tant pis si je n'en avais pas envie.

« Je ne vais pas à la salle après, dispo pour un verre ? »

« Haha. »

« Je suis sérieux. »

« Chan c'est déjà assez compliqué comme ça. »

« Si je ne peux pas t'embrasser alors laisse-moi au moins t'admirer. Je ne tenterais rien, promis. On peut aller où tu veux, ça sera juste un verre entre amis. »

Après un lourd soupire tout en relisant quatre fois le message, j'avais éteint mon téléphone pour me concentrer sur mon travail. Il y avait pleins d'administratif à compléter ou de clients à contacter, je n'avais pas le temps pour ces bêtises.

Alors que je feuilletais des pages pour faire semblant de travailler, mon esprit divaguait à tout autre chose. Je pensais à Jeongin.

Je me demandais comment il allait, ce qu'il faisait, comment était sa relation avec Yeonjin... Si c'était bien son prénom. Elle était très gentille mais pas très intéressante. J'avais dû lui parler une fois à tout casser, à l'anniversaire de mon ancien meilleur ami. Ce foutu anniversaire qui m'avait ruiné la vie.

Est-ce qu'il pensait à moi ? Est-ce qu'il se demandait comment j'allais ? Non sûrement pas, en tout cas j'en doutais fort après tout ce qu'il m'avait dit.

Et Taegwon ? Et leurs parents ? Peut-être que juste un verre avec Chan pour en discuter pourrait être bien.

« D'accord. »

C'est bon, envoyé. Maintenant, place au vrai boulot.

***

Assis en face de moi, une pinte de bière dans la main, Chan regardait les passants flâner près des vitrines de boutiques, un petit sourire aux lèvres.

Il faisait beau et chaud désormais, c'était très agréable. On pouvait se poser en terrasse tranquillement, siroter une bière ou un cocktail, un écouteur dans nos oreilles.

Under the bridge de Red Hot Chilli Peppers tournait, je ne pouvais pas m'empêcher de penser à nos petits moments à deux lorsque nous étions encore deux étrangers l'un pour l'autre. Enfin, deux étrangers, j'étais simplement le meilleur ami de son petit frère mais nous ne nous parlions quasiment jamais, je le rejoignais de temps en temps au fond du jardin et nous partagions un écouteur sans rien dire.

À l'époque, Chan était toujours silencieux. Je pense qu'il était malade, peut-être une dépression ? Il avait plusieurs symptômes. Après il était parti en Australie, j'avais eu le cœur brisé. Quand il était revenu avec Sofia, mon cœur était en miette. Puis un jour, il m'avait embrassé et m'avait révélé qu'il tenait plus à moi que ce qu'il laissait paraître, mon cœur avait battu si fort ce jour que pour la première fois, j'avais la sensation de vivre. C'était stupide, j'avais eu beaucoup de moments de bonheur avec Jeongin, mais tout ça n'était rien comparé à cet instant avec Chan.

Ce sentiment de vivre pleinement me manquait. Devoir me conformer à cette société de merde me brisait un peu plus chaque jour.

Je m'étais mis à fixer mon ancien amant, me répétant à quel point être dans ses bras me manquait.

- À quoi tu penses ? me demanda-t-il en me fixant à son tour.

J'étais resté muet quelques instants, mes yeux avaient dérivé vers ses belles lèvres. Putain qu'est-ce que j'avais envie de l'embrasser.

- À toi.

Il était presque surpris.

- À moi ? répéta-t-il. Pourquoi ?

- Je regrette d'être un homme. Si j'avais été une femme, on aurait pu être si bien ensemble.

Son visage s'était rapproché du mien.

- Je suis content que tu sois comme tu es. Je te trouve parfait.

Ça m'avait fait sourire.

- On peut être parfait ensemble, reprit-il, si tu nous laissais une chance.

- Chan... S'il te plaît, tu sais comme c'est difficile, tu sais ce que je ressens et être obligé de renoncer à une histoire entre nous me fait atrocement souffrir.

- Alors pourquoi tu nous obliges à vivre malheureux ? Hyunjin, il s'emballa, je te protègerais du monde entier, je le ferais sans problème tous les jours si je savais qu'à la fin de la journée, tu étais à mes côtés.

- Je ne veux pas te forcer à combattre la terre entière par ma faute.

- J'en ai rien à foutre, ce que je veux c'est être avec toi !

- Jeongin me hait, je me suis fait virer, je ne veux pas risquer de perdre encore quelque chose parce que je t'aime.

Il leva les yeux au ciel, je détestais quand il faisait ça, encore plus face à moi.

- Jeongin est adulte, s'il ne veut pas comprendre que n'importe qui peut s'aimer alors c'est qu'un con, on n'en a pas besoin.

- Comment tu peux dire ça, c'est ton frère ! je m'étais exclamé.

- Mon abruti de frère qui a brisé l'homme que j'aime, qui est aussi son meilleur ami. Tu trouves sa réaction normale ?! Pas moi.

- Bien sûr que c'est normal, tout le monde réagit comme ça. Au fond ce sont peut-être eux qui ont raison. Peut-être que je suis malade. Peut-être que ça se soigne.

Il me regardait comme si j'étais devenu un monstre. Effrayé.

- Comment tu peux dire des horreurs pareils ?

- J'en sais rien Chan, je ne sais plus ! Pourquoi on nous méprise à ce point ?

- Parce qu'ils sont cons !

- Alors tous les êtres humains sont cons ?

- Exactement.

Un peu stupide comme raisonnement mais ça m'avait fait rire.

Ça m'avait manqué, un moment juste nous deux.

Je l'aimais tellement.
Je l'aimais tellement.

SECRET SECRET. hyunchanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant