Chapitre 33

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J'étais complètement perdue. Je percevais une odeur que jamais je n'avais rencontré. À la fois sauvage, musquée, mais aussi boisée et chaleureuse. Et je ne sais pas pourquoi, mais mon cerveau l'avait directement associée à celle des loups-garous, comme si je l'avais toujours connue. Lorsque Robin s'était transformé, elle m'avait empli les narines, je ne sentais plus que ça.

Le loup devant moi me fixa de ses yeux jaunes puis s'ébroua nerveusement avant de reprendre forme humaine.

— Les gars ne sont pas loin, c'est ça ? lui demandai-je presque apeurée.

Il me prit la main, et le contact de sa peau me raisonna. Que craignais-je exactement ? L'inconnu ? Pas les loups en tout cas. Auprès de la meute, j'avais pu juger de leur valeur, et ils ne m'effrayaient pas. Je savais que la folie d'Elias était un cas isolé.

— Oui, à trois kilomètres environ. C'est peut-être passager, un effet secondaire. Et même si ça ne l'est pas, ça ne veut pas dire que tu vas te transformer en loup toi aussi. S'il suffisait de mélanger du sang lupin à celui d'un humain pour devenir comme nous, ça se saurait.

Il caressa ma joue de sa main en me lançant un regard inquiet avant de continuer.

— Une fois que tu as été remise, j'ai posé quelques questions aux autres meutes. Et c'est quelque chose qui avait déjà été tenté, en espérant soigner des maladies incurables ou après des accidents. Mais personne n'est jamais devenu comme nous.

— Ah oui ? Mais ils ont gagné des capacités eux aussi ?

Il se racla la gorge, mal à l'aise.

— Non, ça n'a pas marché, ils sont morts.

Un énorme poids tomba dans mon estomac. Les autres personnes qui avaient reçu des transfusions de sang de loups-garous n'avaient pas survécu, mais moi oui. Était-ce un hasard ? Peut-être que mes blessures n'étaient pas aussi graves qu'elles le paraissaient ?

Il récupéra ses vêtements et se rhabilla distraitement.

— Concentre-toi, me dit-il. Est-ce que tu sens autre chose ?

Je le regardai impuissante. J'étais trop paniquée pour réussir à faire ce qu'il me demandait. Il se rapprocha de moi et m'entoura de ses bras.

— Ton cœur bat trop fort, me chuchota-t-il en me berçant lentement. Calme-toi, ce n'est rien.

Je posai mon front sur son torse et mes angoisses me quittèrent peu à peu. Je fermai les yeux et pris une grande inspiration en essayant de discerner tous les effluves qui m'assaillaient. Toujours les loups, mais aussi la fumée âcre qui sortait du conduit de cheminée. Puis celle de Robin : suave, boisée et envoutante. J'en profitai quelques instants, puis repris mon observation olfactive. Les sapins dégageaient une forte odeur de sève, et la mousse sous la neige qui sentait l'humidité. Puis, quelque chose de sauvage, désagréable, me fit retrousser le nez.

— Du gibier ? le questionnai-je.

— Oui, un sanglier, sur les hauteurs de la maison.

C'était vraiment étrange. Avec mon odorat, je percevais tout autour de moi, même si je ne voyais rien. Je rouvris les yeux et les odeurs devinrent plus discrètes et se mélangèrent subtilement.

— Tu crois que seul mon flair se développera ?

— Je n'en sais rien, ce sera à toi de me le dire, soupira-t-il en me déposant un baiser sur le front.

***

Les jours défilèrent, et Elias n'avait toujours pas refait surface.

Mon bras était maintenant guéri, seules les quelques cicatrices qui marquaient les crocs du loup-garou persistaient.

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