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Chapitre 15

Quelques jours plus tard, alors que je rentrais à l'hôtel récupérer quelques affaires, je croisai Jenny dans le centre d'Aston.

Comme lors de notre dernière rencontre, elle resplendissait. Elle avait de larges yeux en amandes, le teint hâlé, et faisait au moins une tête de plus que moi. Ses longs cheveux couleur de jais suivaient chacun de ses pas et se balançaient dans son dos harmonieusement.

Lorsqu'elle m'aperçut, elle me fit signe, et vint vers moi de sa démarche enjouée et sautillante.

— Alex ! Comment vas-tu ? Je me demandais justement pourquoi on ne s'était pas encore croisées ! Aston n'est quand même pas si grand, s'exclama-t-elle en levant les yeux au ciel.

— Ça va, et toi ?

J'éludai volontairement sa remarque. Je n'étais pas sûre de ce qu'elle savait — ou non — et je me voyais mal lui répondre « C'est peut-être parce que je passe tout mon temps dans les montagnes avec ton frère ? »

— Bien, on a récolté assez d'argent, on pourra faire du surf lors de notre voyage scolaire !

Elle frappa frénétiquement dans ses mains pour signifier son excitation.

— C'est super ça, félicitations, la complimentai-je avec un sourire.

— Merci, c'est un peu grâce à toi, tu m'as acheté du chocolat !

— Je suis ravie d'avoir pu aider.

— D'ailleurs, ça fait aussi un moment que je n'ai pas passé de temps avec mon frère adoré, tu crois que vous pourriez déjeuner à la maison demain ? Habituellement, Robin vient au moins une fois par semaine, mais étrangement, on n'a pas eu l'honneur de le voir depuis longtemps.

Elle me fit un clin d'œil et je rougis. Elle savait. En même temps, je m'en doutais. Le revers de la médaille à Aston, c'était que les habitants n'étaient pas connus pour leur discrétion.

— J'imagine que oui. S'il est d'accord bien sûr.

— Superbe ! Vous venez pour midi ? Je demanderai à papa de cuisiner son fameux poulet à l'indienne, tu nous en diras des nouvelles !

— Euh, d'accord.

— À demain alors !

Elle s'éloigna gracieusement, et se retourna une dernière fois pour me faire un signe.

Je n'avais pas osé dire non, j'espérais que ça ne gênerait pas son frère.

Jacinthe m'interpella à mon entrée dans l'hôtel, mon nouveau téléphone était enfin arrivé. Je pris quelques minutes pour le mettre en service, et me rendis à l'épicerie. J'avais décidé de cuisiner ce soir. J'achetai de la farine, de la levure, et de quoi garnir des pizzas. Mon frère Axel était boulanger, il m'avait appris quelques-unes de ses recettes après l'obtention de son diplôme, et il fut un temps où je savais faire la pâte aussi bien que lui. J'avais sans doute perdu la main, mais ça ne coûtait rien d'essayer.

Les bras chargés de mes sacs de courses, je rejoignis Robin au garage. Il allait finir sa journée.

Comme à son habitude, il me sourit avant de m'aider à hisser mes achats à l'arrière de son pick-up. Mes épaules se détendirent. Je me sentais en sécurité, sereine. Mon esprit était clair, mon chagrin se dissipait. Cependant, il devenait de plus en plus compliqué de rester loin de lui. Chaque parcelle de ma peau réclamait la sienne, et je devais lutter pour ne pas le toucher.

Il ferma la lourde porte du garage et s'installa au volant.

— J'ai reçu mon nouveau téléphone, lui dis-je sur le ton de la conversation.